Riche de nombreuses potentialités, le Delta du Saloum veut s’imposer comme l’un des sites incontournables de l’Écotourisme au Sénégal. Dans ce sens, les différents acteurs réclament un meilleur accompagnement de leur secteur d’activité, afin de valoriser le patrimoine naturel de cette région.
Située au sud-est du département de Foundiougne, région de Fatick, et chef-lieu de l’arrondissement, la communauté rurale de Toubacouta est répartie en 52 villages et compte 7 hameaux. Elle compte 33 600 habitants et se veut un pôle économique incontournable dans la région de Fatick, plus particulièrement dans le delta du Saloum. De ce fait, Toubacouta compte s’appuyer sur trois activités principales que sont le tourisme, la pêche et l’agriculture.
''La région du delta du Saloum dénombre beaucoup d’atouts dans l’écotourisme, avec la découverte de la réserve de Faitalah, le safari, mais aussi l’exploration de la mangrove. Cependant, nous déplorons le manque d’eau, ainsi que l’état de la route en construction depuis 2007, pour améliorer la desserte de notre localité’’, déclare Adama Ndiaye, directeur de l’hôtel Kairaba et Président du cadre de concertation du Tourisme de Toubacouta.
En effet, avec une dizaine de camps de vacances, campements et autres hôtels, la localité présente d’innombrables sites écotouristiques, comme le parc du Delta du Saloum, les amas coquilliers ou l’île aux oiseaux ; tout ceci offre un dépaysement complet à une clientèle touristique qui vient la plupart du temps d’Europe.
D’après Issa Barro, Président du syndicat d’initiatives des acteurs du tourisme de Fatick, ledit secteur constitue un levier économique important pour la région et compte près de 1000 emplois permanents et saisonniers compris. ‘’Pour renforcer ce secteur, nous avons décidé d’opérer une réforme qui divise la localité en 4 pôles touristiques, allant de Ndangane à Sokone, en passant par Foundiougne. Ils regroupent les différents acteurs du tourisme et ont pour but de mieux cerner le vaste potentiel écotouristique de la région’’, explique-t-il.
Cheveux au vent et tenue décontractée, Pierre Lebrun, gérant d’agence de voyages en Belgique et non moins ornithologue, est venu découvrir les merveilles naturelles de cette région. Ainsi, entre les cris des milans et des mouettes ou encore des pélicans, son appareil photo crépite et fend le silence des Bolongs que vient seulement perturber le bruit des huîtres qui s’ouvrent sous l’effet de la marée.
‘’Je suis venu pour découvrir cet endroit pour le compte de mes clients. Mais, aussi joindre l’utile à l’agréable, en visitant ces vastes étendues de mangrove et d’îlots, comme celui aux coquillages’’, renseigne Pierre Lebrun. Pour Abou Lô, écoguide ornithologue, ces sites constituent le meilleur atout dont peut se prévaloir la région, s’ils sont préservés par les populations.
TOUBACOUTA
Pôle du tourisme dans le delta
Au village de Toubacouta, il est 13 heures. Les touristes prennent d’assaut les piscines des hôtels et autres pensions de la localité, de retour d'excursion dans la forêt de Sangalkou . Non loin de la route, l’hôtel des ‘’palétuviers’’ se dresse au coin de la rue principale du village. Sur la terrasse qui domine les rivages du bras de mer, le directeur de l’hôtel jette un œil sur les visiteurs.
''La plupart des touristes viennent des tours operators de la Belgique, mais le manque d’eau et l’état de la route, depuis Foundiougne, sont autant d’entraves au développement du tourisme. Ainsi, nous sommes obligés de faire des réductions, lors de la basse saison, entre juillet et octobre, afin de retenir notre clientèle, avec des offres variant entre 40 000 et 60 000 francs, pour une pension complète’’, renseigne monsieur Fall.
Il considère que les centres touristiques jouent un rôle de catalyseur dans la promotion de la production locale. ‘’Nous offrons une tribune d’exposition à nos artisans locaux, en exposant leurs productions dans notre hall, de manière gratuite. Tout ceci dans le but d’éviter qu’ils ne harcèlent notre clientèle et d’œuvrer pour le développement de l’artisanat local’’, souligne toujours monsieur Ndiaye.
Le soleil ardent brûle les grandes artères du village. Dans sa cabane qui fait office de boutique, les masques, sculptures en bois et en bronze et autres produits faits en cornes de Zébu ou de phacochère ont du mal à se faire une place sur les étroites étagères. ‘’Notre association regroupe plus de 60 membres qui évoluent dans le monde de l’artisanat.
Il y a quelques années, elle a décidé de ne plus collaborer avec les hôteliers. Car, c’est difficile de transporter les œuvres depuis les ateliers sans les endommager. Ainsi, nous avons décidé de cesser notre collaboration et de rester dans le village artisanal de fortune, en attendant de trouver une meilleure vitrine pour nos produits’’, s’insurge Modou Marie Diouf.
À 12 kilomètres de Toubacouta, au bout d’une route poussiéreuse, se dresse le village de pêche de Missirah, près de l’aire marine protégée de Bambouck.
MISSIRAH
Port de pêche et touristique
Des paniers remplis de saules sont transbordés depuis des pirogues, sous les yeux d’Alassane Mbodj. C'est le président de l’association des pêcheurs de Missirah et vice-président de l’Aseco qui regroupe les guides touristiques de la localité. En dehors de la pêche, l’écotourisme occupe une grande importance dans l’essor de ce petit port sur le delta.
C’est un village de transit vers les sites naturels, comme le parc naturel du Saloum ou les ‘’Bolongs’’ qui sont les voies d’accès à la mangrove. ''Nous espérons des infrastructures touristiques de l’État'', déclare monsieur Mbodj. ‘’Nous avons, dit-il, décidé de former les guides touristiques, afin d’améliorer les services d’accueil des touristes. Et nous espérons, avec ce programme financé par le ministère du Tourisme, faire de la destination de Missirah une escale incontournable dans la découverte des merveilles de ce terroir.’’
En finir avec la réciprocité des visas
Même son de cloche chez les propriétaires de campements. Cheikh Ahmadou Sow Sidibé, gérant de l’auberge des ‘’Bolongs’’, réclame la fin de la réciprocité des visas appliquée, depuis mai 2013, qui décourage fortement la clientèle touristique, surtout lors de la pleine saison, entre février et mai. ‘’Nous avons beaucoup de clients qui se plaignent de cette mesure.
Car cette procédure constitue une source intarissable de tracasseries qui desservent grandement la destination Sénégal. Les modalités de délivrance de visa touristique dure des heures et même des jours. Ceci se traduit par un réel manque à gagner pour les hôteliers, malgré des tarifs très abordables 10 000 francs la nuitée ’’. Il raconte qu'il y a quelques jours, une cliente s'est fait expulser, parce qu’elle n’avait pas pu obtenir son visa.
L’un des secteurs les plus touchés par cet état de fait est la restauration. Assane Senghor, propriétaire d’un restaurant à Toubacouta, révèle que la fréquentation de son restaurant a fortement baissé, depuis 2008. ''La baisse de la fréquentation m’a obligé à me séparer de mon personnel. Et de ce fait, on ne reçoit plus le trop-plein des hôtels qui faisait vivre notre activité''. Il dit attendre l’aide des autorités, afin de faire redémarrer les activités écotouristiques à Toubacouta, pour faire revivre la région.
DELTA DU SALOUM
Ce patrimoine mondial de l’Unesco
Le delta du Saloum, classé patrimoine mondial de l’Unesco en juin 2011, renferme une grande diversité de paysages et d’écosystèmes particuliers. Il permet la survie de nombreuses espèces animales et végétales. La réserve de biosphère et le parc national du delta du Saloum s’étendent sur environ 500 000 ha. Il comprend 72 000 ha de zone maritime, 23 000 ha dans la zone estuarienne et 85 000 ha d'îlots terrestres.
La partie la plus riche en biodiversité est la forêt de Fathala. Environ 34 espèces de grande et moyenne taille ont été signalées dans la région. La mangrove avec des espèces Rhizophora et Avicennia forme l’écosystème dominant.
Mais le delta combine également les caractéristiques de zones humides, estuariennes, lacustres, palustres, ainsi qu’une partie constituée de la savane. Le Sénégal a aussi ratifié, sur le plan international, toutes les conventions pertinentes portant sur la gestion des ressources naturelles pour compléter ses dispositions juridiques. Les principaux facteurs de dégradation du paysage sont la baisse de la pluviométrie, les cycles de sécheresse et les changements climatiques.