Présenté en procédure d’urgence aux députés, le nouveau code électoral a été voté au terme de plusieurs heures de débats en plénière. Aucun recours n’est envisagé par l’opposition.
Les députés ont examiné et adopté, hier, le projet de loi N°11/2014 abrogeant et remplaçant la loi 2012-01 portant code électoral modifié dans sa partie législative. 70 députés ont voté pour cette loi, 3 contre et 13 se sont abstenus, après une plénière qui aura duré six tours d’horloge. Ce projet de loi qui a fait l’objet d’une procédure d’urgence, selon le souhait exprimé par le chef de l’Etat, a suscité un grand intérêt des parlementaires. Parce que le nouveau code a introduit de nouvelles dispositions qui ont fait l’objet d’accords et de désaccords au sein de la commission technique de revue du code électoral (Ctrce) qui s’est réunie du 20 janvier au 7 mars 2014.
Il ressort du projet de loi adopté par les députés que 75 points d’accord ont été trouvés sur la centaine d’articles examinés par la commission ainsi que des points de désaccord concernant la clé de répartition entre scrutin majoritaire et scrutin proportionnel pour les départementales ainsi que le mode de scrutin pour l’élection des conseillers de ville.
Sur ce dernier point, le chef de l’Etat a procédé à un arbitrage en fixant les conseillers départementaux à 45 % pour le scrutin majoritaire et à 55 % pour le scrutin proportionnel. Sur les cinq villes que sont Dakar, Pikine, Guédiawaye, Rufisque et Thiès, il est dit que les conseillers proviendront des communes.
Le chef de l’Etat a également proposé d’autres réaménagements comme la production de casier judiciaire pour les candidats élus ; la réduction des délais de dépôt des candidatures avant le scrutin, à 60 jours et de celui de la publication des listes de candidature par l’autorité administrative à 53 jours. Seulement, aux yeux de certains députés, toutes ces modifications et l’introduction du projet de loi en procédure d’urgence semblent être de la précipitation.
« Dessous politiciens »
Dans son intervention, Oumar Sarr va demander les références du décret de convocation du collège électoral. Quant à Thierno Bocoum de Rewmi, il soupçonne, dans certaines dispositions du code, « la satisfaction de visées électoralistes ». Pour le député « rewmiste », ce code est une « série de violations » faites sur le protocole additionnel de la Cedeao et sur la Constitution. Quant à Sokhna Dieng Mbacké, elle aurait souhaité « un consensus et un dialogue franc » autour de ce code, soupçonnant des « dessous politiciens » dans ce code. D’autres députés comme Mously Diakhaté ont plaidé pour le report des élections locales, invoquant la période du ramadan et de la saison des pluies avant le 29 juin prochain. Son homologue Adama Sow signale que le 29 juin, beaucoup d’éleveurs n’iraient pas voter si la date est maintenue, parce qu’étant une période de transhumance pour eux. Pour le socialiste Barthélemy Dias, cette loi, comme les autres, ne peut être parfaite. Mais il signale qu’avec cette loi, il pourra être maire de plein exercice et non plus « maire auxiliaire ».
Pour le président de la commission des lois, Me Djibril War, c’est une loi qui met un terme à la vassalité parce qu’elle va donner aux communes leur dignité.
Deux semaines de campagne électorale
Avec ce nouveau code électoral, bien des choses vont changer. Il s’agit notamment de la durée de la campagne électorale qui passe de 20 à 14 jours. Ce qui a été une proposition faite par l’opposition et les non-alignés. Le casier judiciaire sera exigé aux futurs élus, une fois l’élection terminée. D’ailleurs, l’élu qui ne pourra pas produire cette pièce sera déchu de son mandat et remplacé par son suppléant dans le respect de la parité. Le scrutin au sein des villes sera simplifié avec « l’émergence d’une majorité qualifiée » et une pluralité dans les assemblées. D’ailleurs, le ministre de l’Intérieur Abdoulaye Daouda Diallo a rappelé que la moitié des élus des conseils de ville a toujours été choisie sur une base majoritaire, alors qu’il n’y a jamais eu de liste majoritaire de ville. Et dans les cinq villes que sont Dakar, Pikine, Guédiawaye, Rufisque et Thiès, les conseillers proviendront des communes.
Djibril War, président de la commission des lois : « Une loi qui vient à son heure »
« C’est une loi qui vient à son heure. Vous avez suivi les commentaires de l’Acte 3 de la décentralisation, un acte révolutionnaire, en ce qu’il introduira de profonds bouleversements dans le quotidien des élus et des administrés, de quelques bords que ce soit, avec ses actes majeurs comme la suppression des régions par la communalisation intégrale. Depuis des mois, vous avez entendu dire, par certaines personnes, que la majorité n’est pas prête pour aller aux élections. Tantôt on accélère pour qu’on puisse sortir des élections et nous consacrer à l’essentiel, il y a des voix qui s’élèvent. Finalement, on ne comprend pas. Ce qu’on doit retenir de cette loi, c’est l’esprit avec la prise en compte des aspirations profondes des populations surtout celles qui sont les plus reculées ».
Modou Diagne Dada : « Mon groupe ne tentera aucun recours »
Même si l’opposition éprouvait une certaine gêne de voir un nouveau code proposé à moins de six mois du prochain scrutin, aucun recours n’est envisagé. Du moins, c’est ce qu’a laissé entendre le président du groupe parlementaire libéral Modou Diagne Fada. « Mon groupe ne tentera aucun recours pour vous donner le prétexte à vous et à vos alliés de reporter, à nouveau, les élections locales. Nous tenons à ce que les élections se déroulent à date échue », a clairement indiqué le président du groupe parlementaire libéral. Cette loi ne sera donc contestée ni au Conseil constitutionnel encore moins à la Cedeao. Modou Diagne Fada a même magnifié « certaines bonnes mesures » prises avec cette loi à savoir le décalage de la date de dépôt des dossiers pour le 29 avril, l’exigence du casier judiciaire aux élus après les élections, de même que le renforcement de la proportionnelle sur la liste départementale.