Dakar (Sénégal) – Le chercheur Babacar Mbaye Diop vient de concevoir un calendrier grégorien dans lequel il remplace les prénoms occidentaux par 365 prénoms typiquement sénégalais « sans aucune connotation religieuse », a confié à APA ce spécialiste de la philosophie de l’Art et de la Culture, soulignant que son travail vise à sauvegarder un « patrimoine » local.
« J’ai fait cela pour la sauvegarde et la conservation de ce patrimoine important. Parce que de plus en plus, on perd ces prénoms au détriment des prénoms d’origine arabe (Babacar, Ousmane, Mouhamed, …) ou occidentale (Jean, Paul, Pierre, …), alors qu’avant d’être des musulmans ou chrétiens, nos ancêtres avaient (leurs propres) prénoms », a expliqué le professeur de philosophie à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Le chercheur qui a mis 12 ans pour parfaire son œuvre, révèle avoir travaillé sur une base de « plus de 500 prénoms » avec des recherches effectuées auprès de « toutes les ethnies du Sénégal ».
« Ça n’a pas été un travail facile, parce que le but est que toutes les ethnies s’y retrouvent. Quand j’ai rempli les 365 jours, il m’en restait plus de 200 que j’ai mis au bas du calendrier », indique l’auteur, soulignant qu’il existe encore beaucoup d’autres prénoms.
Ces prénoms renvoient pour la plupart à des faits « liés aux qualités humaines, à l’histoire, … », selon le Pr Diop qui indique que chez les Halpulaar, par exemple, « Koorka traduit la personne née pendant le mois de Ramadan, Maty la personne juste, Youma le lait nourricier, Thierno le savant ».
Et « cela existe pratiquement dans toutes les ethnies », soutient Babacar Mbaye Diop, ajoutant que chez les Bassari, communauté située dans la partie orientale du Sénégal, ils n’ont que 8 prénoms pour les garçons et autant pour les filles.
Face à la « menace » prégnante des prénoms d’origine occidentale ou arabo-musulmane, ce membre de la Commission Art et Culture du comité de réécriture de l’histoire générale du Sénégal préconise le retour à « nos ressources pour penser africain » mais pour retrouver aussi « ce passé perdu », notamment les noms des jours et des mois en Wolof. Parce que les références utilisées pour les nommer viennent de la culture arabo-musulmane, soutient-il tout en promettant de continuer ses recherches dans ce sens.
Le choix porté sur le calendrier pour répertorier les prénoms sénégalais s’explique par le souci d’être « accessible à tous les Sénégalais », a-t-il fait savoir, ajoutant qu’il aurait pu en tant qu’universitaire produire un article dans une revue, mais avec le risque d’atteindre un « public réduit ».Pour le moment, le calendrier est gratuit.