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Sénégal : la disparition progressive des studios photos
Publié le jeudi 22 mars 2018  |  Agence de Presse Africaine
Exposition
© aDakar.com par SB
Exposition d`Ousmane Ndiaye Dogo
Dakar, le 2 juillet 2017 - L`artiste Ousmane Ndiaye Dogo a présenté son exposition à la Galerie nationale d’art de Dakar. Les photographies de l`artiste représente les femmes, le littoral, la rue ...
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Ils ne font presque plus partie du décor des rues sénégalaises, notamment celles de la capitale, Dakar, où il y a une quinzaine d’années on les voyait partout. Leurs enseignes, souvent enjolivées par des néons ou des jeux de lumière, attiraient fortement les clients.
Ils, ce sont les studios photos. Depuis l’explosion du téléphone portable et son appareil photo incorporé, ils ont disparu des coins et recoins de Dakar, emportant avec eux tout une civilisation du paraître.

Une fête de Tabaski ou de Korité s’achevait toujours par un détour au studio du coin où, paré de ses beaux habits, on se faisait prendre en photo. Et souvent en bande d’amis.

De même, un soir de mariage se concluait par une visite chez le photographe attitré pour des prises de vue destinées à garnir l’album photo qu’on gardera en souvenir. Les générations des années 50 à 70 mettaient, elles, leurs photos noir et blanc en sous-verre accrochées ensuite aux baraques ou murs des chambres…

Maty Ndiaye Guèye, âgée de 43 ans et habitant Rufisque (région de Dakar), a des trémolos dans la voix quand elle se souvient, durant son adolescence, de son empressement à se rendre au studio photo du coin dés qu’elle avait un habit neuf.

Comme à chaque baptême, mariage et autre cérémonie festive, il lui fallait de nouvelles toilettes, Maty était une habituée des studios photos. Une fois prise en photo, elle retournait ‘’trois ou quatre jours’’ après pour prendre possession des cartes qu’elle mettait ensuite dans ses albums.

« J’avais une collection d’albums que je faisais voir à mes amies quand elles venaient me rendre visite à la maison », se souvient-elle.

Fatou Diop, elle, 55 ans et mère de quatre enfants, garnissait ses albums-photos des images de ses fils, dans le but de les envoyer à son mari, un émigré vivant en Italie.

« Le studio photo n’était pas loin de chez nous et presque chaque mois on s’y rendait pour des photos de famille ou en individuel », raconte la mère de famille qui se rappelle de la dextérité avec laquelle le photographe faisait ses prises de vue et des décors qu’il mettait autour des reproductions.

« C’était vraiment agréable de regarder une carte où il y avait ton image !», n’a pu s’empêcher de s’exclamer Fatou Diop.

Autant les femmes comme Maty et Fatou étaient ravies de leur plastique fixée sur du papier photographique, autant les photographes trouvaient largement leurs comptes dans leurs activités.

A en croire Balla Diouf, ancien photographe et ex président du syndicat des photographes de la ville de Rufisque, le métier nourrissait bien son homme.

Après avoir ouvert son studio photo en 1989, il a tenu bon jusqu’en 2015 avant de fermer boutique pour aller s’occuper d’autre chose. Entretemps, Balla ne s’est jamais plaint de son travail, même s’il ne s’étend pas beaucoup sur ses gains à l’époque. « Vu l’affluence de la clientèle, on avait beaucoup de bénéfices», souligne Balla qui a eu à fixer en noir et blanc les images de ses clients avant de passer à la couleur. Une progression qui lui a valu beaucoup de clients et d’argent…

Djiby Dia, un autre photographe ayant ouvert son studio en 1993, reconnait bien l’âge d’or de son ex-métier et rend surtout hommage aux femmes qui, assure-t-il, constituaient «la majeure partie de notre clientèle ».

Tout n’allait pas dans le meilleur des mondes dans les rapports avec les clients dont certains, pour une raison ou une autre, tardaient à payer les photos commandées. Pour rentrer dans leurs fonds, les photographes faisaient une mauvaise publicité aux récalcitrants en affichant leurs photos et leurs méfaits aux murs des studios et, pour que nul n’en ignore, aux coins des rues du quartier.

Pour ne pas être la risée de tout le monde, on payait immédiatement. Sauf dans certains cas extrêmes où n’appréciant pas du tout le fait d’être trainé dans la boue, des clients s’en prenaient au photographe. Ainsi en a-t-il été d’une amie de Khady Guèye qui s’est bagarrée avec son photographe, coupable de l’avoir ‘’vilipendée’’ dans tout le quartier pour une dette de 15 photos.

Ces explications viriles étaient, au demeurant, rares dans les rapports clients-photographes, généralement bon enfant. D’où la forte nostalgie ressentie des deux cotés, depuis que le téléphone portable a précipité aux oubliettes les studios photos.

A la place des tenants de studio qu’on allait voir, il y a maintenant les ‘’deurej man’’ (photographe ambulant). Appareil numérique en main, ils font le tour des cérémonies familiales, immortalisant les temps forts et, le temps d’aller tirer les photos, vous présentent en quelques minutes des reproductions coûtant 500 FCFA la pièce.

Pour Balla Diouf, les ‘’deurej man’’ et l’appui qu’ils ont auprès des laborantins qui leur tirent des photos généralement peu travaillées, ‘’ont pratiquement fait disparaître les studios’’.

Remarque de ce photographe professionnel, ayant requis l’anonymat : « la plupart des photographes qui tenaient un studio étaient illettrés, donc ils n’ont pas pu s’adapter aux exigences du numérique».
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