Il a fallu que ça arrive le jour de l’anniversaire de sa disparition. Des chercheurs de deux universités britanniques de renom ont conclu hier que le ''Cheddar man'' avait la peau noire.
‘‘Cheddar man’’, le premier homme moderne de Grande-Bretagne était noir. Ce n’est pas une théorie de militants ‘‘afrocentristes’’, mais les conclusions d’une étude scientifique britannique. Un cadeau bien à propos pour Cheikh Anta Diop. Alors que les 32 ans de la disparition du ‘‘Pharaon noir’’ étaient célébrés hier par tout le Sénégal, les résultats de cette étude du Musée d’histoire naturelle de Grande Bretagne ont ‘‘réchauffé’’ sa thèse sur l’origine noire de l’humanité. L’ADN d’un squelette âgé de dix mille ans, trouvé dans une caverne anglaise, suggère que l’ancêtre britannique le plus connu ‘‘avait la peau noire et les yeux bleus, ont déclaré des chercheurs’’ hier, cités par l’agence Associated Press.
Ces chercheurs, ainsi que ceux de la University College de Londres (UCL), ont analysé le génome de ‘‘l’homme de Cheddar’’, découvert dans les Gorges de Cheddar au sud-ouest de l’Angleterre en 1903. Certes les conclusions sont moins catégoriques, moins empreintes d’un militantisme noir, mais rejoignent les critères de scientificité qui avaient présidé à l’énoncé de cette théorie par Cheikh Anta Diop alors invité par une université américaine. ‘‘Si on s’en tient sans préjugés, aux données rigoureusement scientifiques, nous sommes bien obligés d’affirmer en toute sérénité que c’est l’adaptation du ‘‘Grimaldien’’ (homme noir dans le jargon préhistorique) à ce climat froid qui a donné naissance finalement au type qu’on appelle conventionnellement leucoderme ou l’homme blanc.
Le Blanc est sorti du Noir à la suite d’un processus d’adaptation à un climat froid. Et cela, tous les spécialistes le savent dans leur for intérieur même s’ils ne le disent pas avec autant d’honnêteté’’, lançait alors le directeur du laboratoire de radiocarbone de l’Université de Dakar dans une vidéo, non référencée, postée sur youtube le 16 décembre 2012.
L’équipe britannique avec à sa tête l’expert en ADN, Ian Barnes, a percé le crâne du squelette pour extraire l’Adn de la poudre osseuse. Les analyses indiquent qu’il avait des yeux bleus, des cheveux noirs frisés et une pigmentation de la peau ‘‘sombre à noir’’. Les chercheurs ont affirmé que les preuves suggèrent que la teinte pâle des Européens s’est développée ultérieurement plutôt qu’on ne l’avait pensé initialement. ‘‘L’Homme de Cheddar bouleverse les attentes sur quels genres de traits génétiques vont ensemble’’, a déclaré le chercheur postdoctoral au musée, Tom Booth, qui a travaillé sur le projet. Un séisme scientifique similaire à celui provoqué par Cheikh Anta Diop sur tout ce que la communauté scientifique tenait pour acquis.
‘‘Tous des immigrés’’
Le chercheur sénégalais avait même expliqué les modalités de peuplement de la terre par les différents hominidés issus du ‘‘Grimaldien’’. Pour lui, homo erectus, homme de Neandertal et homo sapiens ‘‘sont sortis de l’Afrique. Les uns sont passés par l’isthme de Suez pour aller vers le sud-est asiatique, et les autres sont passées par le détroit de Gibraltar pour aller à travers l’Espagne, dans le Midi de la France, et à partir de là, ont irradié jusqu’au Lac Baïkal, en Extrême-Orient’’, avait défendu l’auteur de ‘‘Nations, nègres et Cultures’’. D’après l’homonyme de l’université dakaroise, l’Homme de Grimaldi ‘‘va vivre en Europe de -40 mille ans à -20 mille ans et c’est pendant cette période d’adaptation à un climat extrêmement froid qui est très différent du climat actuel, car c’est pendant la dernière glaciation que la terre a connue qui a duré 100 mille ans, qui va donner naissance par mutation et adaptation à l’Homme de Cro-Magnon’’.
Selon les conclusions de l’étude des scientifiques britanniques, il semble que les yeux pâles soient entrés en Europe bien avant la peau pâle ou les cheveux blonds, qui ne sont survenus qu’après la découverte de l’agriculture. Ils pensent que les anciens hommes, vivant dans les régions Nord, ont pu développer une peau blanche car elle absorbe plus de rayons solaires dont elle a besoin pour produire de la vitamine D. L’homme de Cheddar partage un profil génétique avec beaucoup d’individus de l’ère mésolithique découverts en Espagne, Hongrie et Luxembourg dont les ADN ont déjà été analysés.
Le groupe aurait migré en Europe en provenance du Moyen-Orient après la dernière ère glaciaire il y a environ 12 mille ans. L’Homme de Cheddar est le squelette complet le plus âgé découvert en Grande Bretagne. Des individus y ont vécu des milliers d’années avant lui mais ont été anéantis par les différentes périodes de glaciation. Il aurait fait partie d’une population minime de chasseurs-collectionneurs. Les scientifiques, qui ont étudié son squelette des décennies, disent qu’il avait apparemment une alimentation saine mais n’excédait pas 20 ans d’âge probablement à cause de la violence. Pour terminer sur une note plus actuelle et plus politique, l’un des modélistes qui a réalisé le prototype du Cheddar man, Alfons Kennis, de lancer : ‘‘Les gens vont être surpris, peut-être que les immigrés se sentiront un peu plus impliqués dans l'Histoire, et peut-être que cela éliminera l'idée que l’on doit avoir une certaine apparence pour venir de quelque part. Nous sommes tous des immigrés.’’