Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article
Société

Après une année d’accalmie : Les travailleurs à nouveau dans la rue
Publié le jeudi 25 janvier 2018  |  Enquête Plus
Comment


Les travailleurs affiliés à la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (Cnts) ont répondu, hier, à l’appel de leur secrétaire général Mody Guiro. Des milliers d’agents de tous les secteurs, arborant des brassards rouges, ont marché de la place de la Nation (ex-place de l’Obélisque) au rond-point de la Rts. Ceci pour réclamer l’amélioration de leurs conditions de travail.



La place de la Nation (ex-place de l’Obélisque) a été envahie, hier, par des travailleurs de tous les secteurs, à l’appel de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (Cnts). En brassards, T-shirts, casques ou tout simplement habillés en rouge, les syndicalistes ont pris d’assaut cette place mythique dès 15 h. Bien représenté, chaque secteur a écrit ses doléances sur des pancartes, des banderoles et même des bouts de carton. Ils veulent tous se faire voir, se faire entendre. ‘’Non au mutisme de l’Etat face aux employeurs véreux’’, ‘’Absence de planification de carrière’’, ‘’Respecter les accords’’, peut-on lire sur les supports de communication.

En réalité, les revendications tournent notamment autour de l’augmentation conséquente généralisée et hiérarchisée des salaires dans la Fonction publique et dans le secteur privé, la révision de la Convention collective nationale interprofessionnelle, la publication et le partage de l’étude sur le système de rémunération des agents de l’Etat. ‘’Nous sommes venus assister à cette marche pour dénoncer le mutisme de l’Etat face aux difficultés que nous vivons. Il est inadmissible que les agents d’un ministère clé, qu’est celui de l’Agriculture, ne vivent pas dans de bonnes conditions. Nous n’avons pas d’indemnité, ni un bon bâtiment de travail, un matériel de bureau et d’équipement non plus’’, explique Cheikh Aba Diémé, porte-parole du syndicat des agents de l’agriculture affilé à la Cnts. Selon lui, aujourd’hui, ils sont ‘’environ 500 agents’’ vivant la même situation. ‘’Nous faisons confiance à Mody Guiro pour la satisfaction de nos revendications’’, ajoute-t-il.

Marchant à côté de lui, Cheikh Ahmed Tidiane Seck, Délégué des travailleurs de la société Sinta Sa, renchérit : ‘’Nous espérons qu’avec cette marche, les choses vont changer. Si l’Etat voit notre message, il va prendre les mesures idoines’’, dit-il.

Ainsi, côte à côte, les travailleurs marchent derrière leur secrétaire général et les autres leaders des autres centrales syndicales venus témoigner leur solidarité à la Cnts. Au rythme de la musique et des tambours, ils avancent à petits pas et tantôt s’arrêtent, le temps d’écouter le message d’un des leurs qui s’exprime avec le micro, refont les rangs et poursuivent leur marche. ‘’Une telle mobilisation nationale, l’Etat ne l’ignorera pas. Il s’agit d’une marche nationale’’, estime le secrétaire général du Satrail, Cheikh Diène. Dès lors, il trouve que la marche vient à son heure, vu que le pacte que leur centrale a signé avec le gouvernement est arrivé à terme. ‘’L’Etat n’a pas respecté les accords signés. Pour notre secteur, on avait plus d’un train par jour, ce qui n’est plus le cas. Depuis que l’Etat a pris Transrail pour le nommer Dvf, nous sommes à l’arrêt, nous n’avons plus de machine, plus de wagon, nous n’arrivons plus à payer les salaires’’, déplore M. Diène.

En effet, depuis deux ans, plus de 200 personnes ont pris leur retraite et ‘’n’ont pas encore obtenu’’ leur indemnité de retraite. ‘’Tout ceci faisait partie de ce pacte qui a été signé avec l’Etat. C’est le moment pour nous de nous montrer. Le chemin de fer est acheté pour mettre le Ter, le train Dakar-Bamako n’existe plus. Ils ont remplacé 1 200 km par 57 km. C’est regrettable’’, lance le syndicaliste.

Une solidarité ouvrière ‘’pour se faire respecter’’

La Cnts/Force du changement, le Syndicat des travailleurs du nettoiement, entre autres centrales ou syndicats, sont venus témoigner leur soutien à la Cnts. Mais, du côté du comité d’organisation de cette dernière, cette solidarité est mal vue. Car les organisations ont essayé, par tous les moyens, d’interdire et même d’intimer l’ordre aux journalistes de ne pas leur tendre le micro. ‘’C’est une marche de la Cnts et vous n’avez pas le droit d’interroger nos invités. Nous n’allons pas vous laisser faire’’, tonne un jeune homme en T-shirt rouge.

Ainsi, l’homme bouscule les journalistes au moment des interviews avec le secrétaire général de la Cnts/Fc, Cheikh Diop, devant le rond-point de la Rts. ‘’C’est une marche de la Cnts que nous sommes venus soutenir. Nous partageons entièrement les préoccupations des travailleurs en général. Nous voulons mieux organiser les luttes. Car nous pensons que nous appartenons à une coalition de centrales syndicales’’, précise-t-il après l’intervention des autres syndicalistes.

Etant les plus représentatifs, Cheikh Diop soutient qu’il y a ‘’lieu de mieux organiser’’ les luttes, mieux les déférer. ‘’Il est nécessaire qu’on se retrouve dans l’unité, pour prendre en charge les préoccupations des travailleurs. C’est dans cette logique que s’inscrit la Cnts/Fc. Nous allons faire le tour des organisations syndicales pour que les préoccupations majeures de l’ensemble des travailleurs soient prises à bras le corps par les centrales pour les faire aboutir’’, poursuit le syndicaliste.

Pour sa part, le secrétaire général du syndicat des travailleurs du nettoiement, Madani Sy, reconnait que cette marche symbolise ‘’vraiment une situation exceptionnelle’’ du monde du travail. ‘’Il faudra une solidarité ouvrière pour se faire respecter. Parce que nous avons l’impression que ceux qui votent les lois sont ceux-là même qui les transgressent. Comment peut-on signer des accords sans pour autant les appliquer ? Et aujourd’hui la Cnts a organisé cette marche pour dénoncer les problèmes qui existent au sein des entreprises’’, indique Madani Sy.

D’ailleurs, ce syndicaliste affirme que certaines sociétés en liquidation ont licencié des travailleurs ‘’sans droit’’. Une situation qui, selon lui, ‘’n’honore pas’’ le monde du travail. ‘’Et dans le cadre de la solidarité ouvrière, nous sommes venus apporter notre soutien pour montrer que seule l’union fait la force. Le monde du travail a besoin d’une unité autour de l’action pour permettre à l’Etat du Sénégal de respecter ses engagements’’, insiste-t-il.

2018 étant décrétée par le président de la République comme une ‘’année sociale’’, Madani Sy pense, dès lors, que ‘’qui dit année sociale, dit année de satisfaction des revendications des travailleurs, la pérennisation des acquis’’. ‘’Cela prouve que les syndicalistes ne ménagerons aucun effort pour le respect de toutes les plateformes revendicatives. Mais, malheureusement, nous avons constaté un certain tiraillement au sein même des syndicats. Chacun veut être devant l’autre et ça constitue un désordre. Ainsi, l’Etat va en profiter pour faire ce qu’il veut’’, dit-il.

Les agents de sécurité réclament la matérialisation de leur convention

La marche de la Cnts a été ‘’une opportunité offerte’’ aux agents de sécurité, selon le délégué de personnel du syndicat de la société de gardiennage Sps (Servir-Protéger-Sécuriser) affilié à cette centrale, Youssou Mbaye, ‘’face à l’Etat’’, de réclamer la matérialisation de la convention concernant leur statut. Mais, aussi, de lui demander ‘’surtout l’assainissement’’ du secteur du gardiennage.

‘’Mieux encore, mettre un terme à la concurrence déloyale. Car beaucoup de sociétés ne respectent pas les lois édictées par le Code du travail sur les prises en charge, les cotisations à l’Ipres, à la Caisse de sécurité sociale, etc.’’, souligne le syndicaliste. Au-delà d’une simple revendication, ces derniers ‘’l’exigent de l’Etat dans les meilleurs délais’’. ‘’Nous sommes victimes de cette injustice. Après tant d’années de négation et de travail sur cette convention, nous avons jugé nécessaire, face à l’émergence incarnée par le président de la République, de demander qu’elle soit effective. Aujourd’hui, la convention de commerce qui loge la nôtre est obsolète. Toutes les conventions collectives ont été ratifiées sauf la nôtre’’, peste-t-il.

D’après Youssou Mbaye, beaucoup d’agents de sécurité reçoivent 40 000 ou 50 000 F Cfa par mois comme salaire. ‘’C’est un montant dérisoire. C’est un secteur qui demande à être assaini. Ce n’est plus le temps où le secteur était incarné par des analphabètes. Aujourd’hui, la sécurité est au cœur du développement. Toutes les grandes entreprises sont surveillées par des agents de sécurité. La quasi-totalité de ces derniers ont exercé sous le drapeau national. Donc, ils ont une matière grise. Intellectuellement, ils sont bien formés’’, affirme le délégué de personnel du syndicat de la société de gardiennage Sps.

Mariama Dieme / Gabriel Diouf
Commentaires