‘’Chaque génération a sa mission. Soit elle l’accomplit soit elle la trahit’’. Cette citation célèbre de Frantz Fanon, l’Union des magistrats sénégalais semble bien se l’être appropriée. Pour cette organisation, la seule mission qui vaille, c’est celle de l’indépendance des juges au Sénégal. Deux jours durant, ils ont mené de profondes réflexions sur la question. Malgré les mises au point de la tutelle suite à leurs recommandations, les magistrats ont le sentiment du devoir accompli. Un peu plus réservé que d’habitude, mais toujours aussi ferme dans ses convictions, Souleymane Téliko, de Thiès, livre par correspondance, dans cet entretien concomitamment réalisé avec l’Observateur, ses vérités. Bilan du colloque, divergences de points de vue avec la Chancellerie, réformes du CSM et du statut du Parquet… Rien n’est laissé au hasard.
Quel bilan tirez-vous du colloque national que vous venez d'organiser sur l'indépendance de la justice au Sénégal ?
L’appréciation d’une activité doit se faire par rapport aux objectifs qu’on s’est assignés au préalable. Par la tenue du colloque, nous poursuivions deux objectifs principaux : d’une part susciter un dialogue participatif et inclusif sur la lancinante question de l’indépendance de la justice. D’autre part parvenir, en rapport avec d’autres acteurs de la justice, à s’entendre sur des recommandations fortes qui soient de nature à renforcer l’indépendance de la justice au Sénégal. Sous ces deux angles, je pense que le colloque a été une réussite.
Lors de ce colloque, nous avons entendu des approches divergentes par rapport à la question de l’indépendance de la justice. Votre sentiment ?
L’indépendance peut et doit être appréciée sous ses deux dimensions : personnelle (indépendance du juge) et institutionnelle (indépendance du pouvoir judiciaire). Si toutes les deux dimensions sont fondamentales, il faut tout de même garder à l’esprit que l’obligation faite au juge d’exercer son office en toute indépendance n’est qu’un des moyens d’aboutir à l’indépendance du pouvoir judiciaire. Ceci étant le corollaire indispensable de la séparation des pouvoirs. Et c’est cette indépendance de la justice qui garantit la liberté des citoyens. Comme le rappelait, à juste titre, Montesquieu : ‘’Il n’y a point de liberté si la puissance de juger n’est pas séparée de la puissance législative et de l’Exécutif’’.
Lors de la cérémonie de clôture, le ministre a tenu à préciser que dans notre pays, c’est au président de la République de définir la politique de la nation. Est-ce à dire que les magistrats ont outrepassé leurs prérogatives ?
Bien entendu, nous sommes dans une République et les attributions des institutions sont clairement définies. Il revient au président de la République de définir la politique de la nation. Mais je tiens à souligner qu’en tant que citoyens, les magistrats ont le droit, je dirais même le devoir, de contribuer, par le travail quotidien autant que par des activités scientifiques de ce genre, à l’amélioration de la qualité de la justice. Car c’est par l’expression libre des idées et des opinions que l’on peut faire avancer la cause de la justice. D’ailleurs, le ministre de la justice ne voit pas les choses autrement. Sinon, il ne se serait pas déplacé pour, non seulement présider la cérémonie d’ouverture, mais aussi prendre activement part aux débats.
Quid de la réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature ? En quoi la présence du président et du ministre de la Justice est–elle une entrave au bon fonctionnement de l'institution?
Dans nos sociétés modernes, la simple proclamation de la séparation des pouvoirs ne suffit pas à garantir l’équilibre des pouvoirs. C’est un postulat universellement admis que lorsque, dans un Etat quelconque, l’Exécutif se donne le moyen de choisir les juges et les procureurs, le risque d’instrumentalisation devient réel. D’où l’enjeu que constitue la question de la gestion de la carrière. C’est précisément pour prévenir toute possibilité d’immixtion du pouvoir exécutif dans le fonctionnement du système judiciaire à travers la gestion de la carrière que des mécanismes, appelés garanties, ont été institués. Ces deux garanties dont d’ordre fonctionnel (inamovibilité) et organique (CSM). Or, la composition et le mode de fonctionnement actuel du CSM laissent trop de place à des possibilités d’immixtion de l’Exécutif. Et les propositions qui ont été faites sont justement destinées à prévenir toute possibilité d’instrumentalisation de la justice.
Comment se traduit cette possibilité d’immixtion de l’Exécutif?
Par la mainmise de l’Exécutif sur la carrière des magistrats. Notre Constitution fait du président de la République la clé de voûte des institutions. A cet effet, il nomme à tous les emplois civils et militaires. Pour concilier ces prérogatives du président de la République avec le respect de l’indépendance de la justice, on devrait trouver le moyen de faire de telle sorte qu’à l’exception de l’acte formel de nomination, tous les autres aspects du déroulement de la carrière des magistrats soient dévolus à une entité indépendante du pouvoir exécutif. C’est précisément l’objet des Conseils supérieurs de la magistrature (ou Conseil de justice dans certains pays). Malheureusement, le Conseil supérieur de la magistrature que nous avons au Sénégal laisse apparaître que, pour ce qui est de la nomination des magistrats, la part du lion revient à l’Exécutif (à travers le ministre de la Justice), les autres membres (à savoir les magistrats) se contentant de la portion congrue.
Expliquez-vous !
En droit comme en fait, le ministre de la Justice, représentant de l’Exécutif, joue le rôle de pivot dans la procédure de nomination. Aux termes de l’article 4 du statut des magistrats, c’est le ministre de la Justice, en sa qualité de vice-président du CSM, qui fait les propositions de nomination aux postes. C’est lui qui élabore les critères de nomination (qui peuvent varier d’une réunion à une autre), fixe l’ordre du jour, c'est-à-dire la liste des juges et procureurs susceptibles d’être affectés. Naturellement, dans l’exercice de ses attributions et en fonction du poste concerné, le Ministre peut décider de consulter n’importe quelle personne ou autorité, notamment ses conseillers techniques, les chefs de Cour ou ... le président de la République. C’est après avoir établi sa liste qu’il convoque les membres pour une réunion dans son bureau (pré-conseil) afin de recueillir leurs avis.
L’étendue des pouvoirs du Ministre contraste avec le caractère symbolique des pouvoirs des autres membres du conseil. Ces derniers, qui n’ont pas le droit de faire des propositions, disposent d’une marge de manœuvre très étroite. Ils sont placés devant l’alternative (approuver ou donner un avis défavorable) mais sans pouvoir faire une contre-proposition, le pouvoir de faire des propositions étant conféré à titre exclusif au ministre de la Justice.
Il s’y ajoute que, ne maîtrisant pas les critères sur la base desquels la liste a été établie et n’ayant pas non plus la possibilité de consulter les magistrats concernés, les membres du CSM sont mis, pour ainsi dire, devant le fait accompli. Conséquence : près de 99% des propositions du Ministre passent comme lettre à la poste. Les pouvoirs du Ministre sont d’autant plus pesants qu’à l’exception de quelques-uns d’entre eux, les magistrats sont maintenus, durant la quasi-totalité de leur carrière, dans une situation de précarité totale. En effet, le recours systématique aux notions de nécessité de service et d’intérim donne à l’autorité de nomination la possibilité de contourner le principe d’inamovibilité. Actuellement, plus de 90% des juges sont en situation d’intérim et donc susceptibles d’être déplacés à tout moment. Ce système, qui fait du ministre de la Justice, c’est-à-dire un représentant de l’Exécutif, le ‘’faiseur de rois’’, peut conduire certains à chercher à entrer dans les bonnes grâces du pouvoir, avec tout ce que cela peut impliquer comme risque de compromission au détriment de la justice.
Le ministre vous a appelé à relativiser vos propositions. N’est ce pas un pied de nez?
Nous sommes dans un débat scientifique. S’il dit qu’il faut relativiser, il faut en préciser les raisons. Pour notre part, nous pensons, d’une part, que les débats ont permis de démontrer de façon éclatante que les mécanismes institutionnels prévus pour garantir l’indépendance ne sont pas effectifs. Les magistrats étant, dans leur écrasante majorité, exposés à la possibilité de mesures de représailles. Et ceci me paraît suffisamment préoccupant pour ne pas être relativisé.
D’autre part, les propositions de réforme qui ont été formulées sont, de l’avis même du Ministre, fortes et pertinentes. Le reste est question de volonté politique de procéder à de véritables réformes. Nous laissons cette responsabilité aux autorités.
Concernant la généralisation de la retraite à tous les magistrats hors hiérarchie, le ministre a répondu en disant que l'Etat ne gère pas que des magistrats. N’en demandez-vous pas trop ?
Concernant la proposition visant l’uniformisation de l’âge de la retraite, je tiens, pour éviter tout amalgame, à faire une mise au point. Je rappelle que c’est le gouvernement qui avait, d’autorité, décidé de proroger l’âge de la retraite pour un certain nombre de magistrats. Nous avons toujours estimé, et nous continuons encore à soutenir, que cette loi est à la fois discriminatoire et, qui plus est, attentatoire à l’esprit d’indépendance. Le problème de cette loi, c’est qu’en subordonnant la prorogation à l’occupation de certains emplois, laquelle dépend du bon vouloir de l’Exécutif, elle place les magistrats dans une situation de dépendance extrême. Actuellement, un magistrat en position de prorogation peut se retrouver à la retraite du jour au lendemain par la seule volonté de l’Exécutif. On n’a pas besoin d’être spécialiste en droit pour comprendre que ce n’est pas un moyen de favoriser l’indépendance des magistrats. Il est de l’intérêt de tous que chaque magistrat soit placé dans une position qui lui permette d’exercer son office en toute sérénité.
Pour mettre fin à cette situation de dépendance, nous avons proposé que la prorogation introduite par les autorités soit adossée au grade et non à l’occupation d’un emploi. La généralisation en soi n’est donc pas une exigence pour nous. Nous posons une question de principe et non d’intérêts ou de carrière. Du reste, si le gouvernement nous propose une autre solution, nous sommes preneurs. L’essentiel, c’est que l’on revienne aux fondamentaux d’une justice fondée sur des principes de rigueur et de respect absolu des valeurs d’indépendance et d’impartialité.
Certains disent que c'est juste un colloque de plus puisque certaines de vos recommandations audacieuses n'ont aucune chance de recevoir la bénédiction du gouvernement. Citant par exemple la suppression des ordres non écrits. Et celle des ordres de non-poursuite. Êtes- vous de cet avis?
L’avenir nous dira si cette rencontre n’aura été qu’un colloque de plus. Mais permettez-moi d’insister sur une particularité qui mérite d’être soulignée.
Le colloque a été précédé d’une série de rencontres entre les magistrats sur toute l’étendue du territoire. Des journées d’études ont été tenues aussi bien à Dakar, Thiès, Kaolack, Saint-Louis que Ziguinchor. Ce sont les propositions issues de ces journées d’études qui ont été examinées par les participants au colloque, lequel a réuni des représentants de la société civile, des avocats et des universitaires. Ne serait-ce que pour la dynamique interne et inclusive entamée à travers cette démarche, ce colloque ne peut être considéré comme un séminaire de plus. En tout état de cause, nous tenons et œuvrons à ce que les propositions soient considérées avec le plus grand intérêt et surtout, qu’elles soient mises en œuvre pour le grand bien de la justice.
Pouvez-vous revenir, schématiquement, sur les principales propositions formulées lors de ce colloque ?
Je voudrais insister sur le fait que toutes les propositions sont sous-tendues par le même objectif : éliminer toute possibilité légale d’immixtion de l’Exécutif dans le fonctionnement du système judiciaire. On pourrait les ranger en deux catégories. D’abord, il y a les propositions visant à éliminer les risques d’immixtion de l’Exécutif à travers la gestion de la carrière. Partant du constat que le CSM, dans sa formation et son mode de fonctionnement actuels, ne garantit pas une gestion autonome, indépendante et transparente de la carrière des magistrats, nous avons proposé une recomposition du Conseil et la redéfinition de ses attributions. A l’instar de toutes les grandes démocraties modernes, le Sénégal doit disposer d’un CSM dirigé par des personnalités qui n’ont aucun lien avec l’Exécutif. Du point de vue symbolique comme dans le fond, ce serait l’unique moyen de prévenir toute possibilité d’immixtion du pouvoir exécutif dans les nominations. Actuellement, même en Afrique, beaucoup de pays dont la Guinée Bissau, le Togo, le Burkina Faso, la Tunisie et dernièrement le Maroc ont adopté ce système. Il ne s’agit pas de copier ce qui se fait ailleurs, mais de s’inscrire dans une dynamique de renforcement de notre Etat de droit et ce, pour le bien de la justice.
Certains ont exprimé la crainte que le départ de l’Exécutif ne favorise le mandarinat et le règne de la hiérarchie. Mais c’est précisément pour prévenir ce risque qu’il a été proposé que le nombre de membres de droit soit réduit à deux et que le nombre de membres élus soit revu à la hausse. Dans la même optique, d’autres propositions visent à sécuriser le déroulement de la carrière du magistrat : il s’agit de l’encadrement des notions d’intérim et de nécessité de service. Pour éviter que le respect du principe d’inamovibilité ne conduise à l’immobilisme dans certains postes, on a imaginé des mesures incitatives de nature à favoriser la mobilité : il s’agit des propositions suivantes :
Concilier la mobilité avec l’inamovibilité par un principe de limitation de la durée d’exercice de certaines fonctions. Prévoir que l’accession au grade hors hiérarchie et l’accession aux fonctions de chef de juridiction seront subordonnées à l’affectation préalable à au moins deux juridictions. Naturellement, tout ceci ne peut se faire que si le CSM dispose d’une autonomie budgétaire et d’un siège.
Les propositions visant à éliminer les risques d’immixtion par le biais du principe de subordination hiérarchique du parquet.
Pour concilier la nécessité de permettre au ministère public de conduire la politique pénale et celle de garantir l’indépendance des magistrats du parquet, il a été proposé la suppression de la possibilité reconnue au ministre de la Justice de donner des instructions dans les affaires individuelles. Dans le cadre des instructions générales données par le Garde des Sceaux, chaque procureur devrait donc exercer librement ses prérogatives d’agent du Ministère public. Avec cette proposition, la liberté du Ministre s’arrête là où commence celle des magistrats du parquet. Bien entendu, cette redistribution des rôles entre le parquet et la chancellerie pourrait être trahie dans la pratique si le ministre de la Justice continue de garder le moyen de les déplacer à sa guise, comme c’est le cas actuellement. A cet égard, Deux options ont été proposées : Première option : le CSM fait les propositions de nominations pour tous les magistrats (du siège comme du parquet). Seconde option : Le Garde des Sceaux garde l’initiative des propositions pour les magistrats du parquet auquel cas, on propose que l’avis du CSM soit conforme (c'est-à-dire que l’avis s’impose à la tutelle NDLR).
On le voit, vous avez fait des propositions ambitieuses, au cas où le gouvernement rechignerait à se soustraire à vos recommandations. De quels moyens disposez-vous pour l’y contraindre ?
Soyons clair ! Nous n’avons aucun moyen de contrainte sur le Gouvernement. D’ailleurs, nous devons être cohérents avec nous- mêmes. Nous militons pour un renforcement de l’indépendance de la justice par respect au principe de la séparation des pouvoirs. Par souci de cohérence, nous devons respecter les attributions des autres pouvoirs et éviter tout ce qui pourrait être assimilé à des injonctions. Mais n’empêche, je le répète. Nous sommes conscients que notre système judiciaire comporte de sérieuses insuffisances et notre devoir, en tant qu’acteurs de premier plan, est de contribuer à l’améliorer. Je crois que si tout le monde le comprend ainsi et met en avant l’intérêt supérieur de la justice, des progrès peuvent être réalisés.
Vous réclamez plus d'indépendance pour le parquet. Certains comme Doudou Ndoye demandent, en plus de cette indépendance, la limitation des pouvoirs des procureurs, notamment en matière de détournement de deniers publics où le Juge d’instruction est obligé de le suivre. Sans parler des mandats de dépôts automatiques. Quelle appréciation en faites-vous?
En fait, du point de vue de l’indépendance de la justice, ce n’est pas tant l’étendue des pouvoirs dont dispose le Ministère public qui pose problème que l’influence que le ministre de la Justice peut exercer sur ce dernier. Les pouvoirs du Ministre doivent être appréciés à l’aune du principe de la subordination hiérarchique auquel est soumis le parquet. Le statut des magistrats en son article 7 consacre cette subordination hiérarchique. Et l’article 28 du Code de procédure pénale précise que ‘’le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, peut dénoncer au Procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui enjoindre d’engager ou de faire engager les poursuites, ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le ministre juge opportunes’’. Et aux termes de l’article 25 du Code de procédure pénale, ‘’Le ministère public est tenu de prendre des réquisitions écrites conformes aux instructions qui lui sont données dans les conditions prévues aux articles 28 et 29’’.
D’autre part, le ministère public, qui peut recevoir des instructions écrites de la part du Ministre, dispose d’énormes pouvoirs. En effet, le ministère public peut non seulement décerner mandat de dépôt en cas de flagrant délit, mais de manière générale, en matière de détention provisoire, le recours et les délais de recours du ministère public, ordinaire comme extraordinaire, sont suspensifs d’exécution, avec toutes les incidences liberticides que cela peut impliquer. Il s’y ajoute qu’aux termes de l’article 139 du Code de procédure pénale ‘’sur les réquisitions dûment motivées du ministère public, le juge d’instruction est tenu de décerner mandat de dépôt contre toute personne inculpée de l’un des crimes ou délits prévus par les articles 56 à 100 et 255 du Code pénal. La demande de mise en liberté provisoire d’une personne détenue provisoirement pour l’un des crimes ou délits spécifiés à l’alinéa précédent sera déclarée irrecevable si le ministère public s’y oppose par réquisition dûment motivée ». Autrement dit, dans ces cas spécifiques de détention provisoire, l’opposition du ministère public prive l’inculpé de toute voie de recours.
C’est le duo pouvoirs du ministère public – subordination hiérarchique qui est à revoir car le ministre de la justice dispose indirectement du moyen de s’immiscer dans le traitement des affaires pénales. Ce qui, à notre avis, pose un sérieux problème pour l’indépendance de la justice. Pour résoudre cette équation, il y a deux solutions : soit on réduit les pouvoirs du ministère public, ce qui reviendrait à réduire, indirectement ceux du ministre. Soit on redéfinit les rapports entre le ministre de la Justice et le ministère public. C’est précisément cette dernière option qui a été choisie lors du colloque qui a proposé la suppression de la possibilité reconnue au ministre de donner des instructions dans les affaires individuelles.
Continuez-vous à dénoncer les consultations à domicile ?
Les consultations à domicile avaient été dénoncées à cause de leur utilisation dans des situations qui ne revêtaient aucune urgence. Mais je dois dire que ce n'est plus le cas depuis plusieurs mois. Si les propositions faites lors du colloque sont appliquées, je pense qu’on ne parlera plus des consultations à domicile.
Pensez-vous à l’heure actuelle, avec toutes les complaintes de concitoyens contre la Justice, que le service public de la justice est rendu normalement au Sénégal ?
Sans aucun doute, le service public de la justice est rendu normalement au Sénégal. La judiciarisation de la vie à laquelle on assiste actuellement en atteste suffisamment. Néanmoins, il faut reconnaître qu’il y a beaucoup de difficultés que les autorités de ce pays s’attellent à résoudre avec plus ou moins de bonheur. Il y a des efforts réels de modernisation qui sont également à saluer, même si l’état de certaines de nos juridictions continue à être préoccupant.
Mais comme nous avons eu à le dire, la justice n’est pas un service public comme les autres. Elle est aussi un pouvoir et sous ce rapport, la question de son indépendance doit être appréciée avec beaucoup de sérieux.
En dehors de l’Indépendance de la justice, quels sont les autres chantiers de l’UMS ?
Les problèmes de la justice ne se limitent pas à l’indépendance. Nous sommes conscients du fait qu’en tant que service public, la justice est confrontée à plusieurs difficultés dont, entre autres, la lenteur des procédures, l’engorgement des prisons ou le lancinant problème de l’exécution des décisions de justice.
Il s’y ajoute qu’actuellement, le droit est en train de s’internationaliser. Je pense en particulier à la justice pénale internationale. Sur toutes ces questions, l’UMS, dans la mesure de ses modestes moyens, compte organiser des activités scientifiques dans le but, soit de renforcer les capacités des acteurs, soit de faire des recommandations comme cela a été le cas avec ce colloque.
Où en est votre traduction devant le conseil de discipline des magistrats ?
Je considère que cette affaire est définitivement classée.