Le procès pour "détournement de fonds publics" du maire de Dakar, Khalifa Sall, opposant au président sénégalais Macky Sall, et de sept de ses collaborateurs a de nouveau été reporté mercredi, à la demande de la défense.
"Le tribunal renvoie la cause et les parties à l’audience du 23 janvier", a déclaré après deux heures de débats de procédure le président du Tribunal de grande instance de la capitale sénégalaise, Malick Lamotte, en présence du maire de Dakar et de la plupart de ses coprévenus.
Le procès de cette personnalité phare de la vie politique sénégalaise, très attendu à un an de la présidentielle, avait été une première fois renvoyé à son ouverture le 14 décembre.
Khalifa Sall et plusieurs responsables financiers doivent répondre de dépenses "non justifiées" de plus de 2,7 millions d’euros prélevés sur plusieurs années, selon la justice, dans les caisses de la mairie de Dakar, ce qu’ils nient.
Dès l’ouverture de l’audience de mercredi, la défense a réclamé le renvoi du procès, arguant que certains avocats n’avaient pas reçu de convocation.
Elle a également avancé qu’elle souhaitait disposer de plus de temps afin de pouvoir faire citer des témoins, dont le ministre de l’Economie et des Finances et celui du Budget.
La défense souhaite "faire retarder autant que faire se peut cette audience" alors que le dossier est prêt à être jugé, a accusé pendant les débats Me Moussa Felix Sow, un avocat de l’Etat du Sénégal, partie civile dans cette affaire.
"Depuis le début de la procédure jusqu’à maintenant, il y a un empressement qu’on peut qualifier d’intolérable, qui fait obstacle à la garantie des droits de la défense", a répliqué Me Ousseynou Fall, avocat de la défense de Khalifa Sall, interrogé par l’AFP à la sortie de l’audience.
Khalifa Sall, 62 ans, vêtu d’un grand boubou blanc, a salué bras tendus et tout sourire ses nombreux partisans, qui ont scandé des slogans en sa faveur dans une salle bondée du tribunal de Dakar placé sous haute surveillance policière.
L’homme politique, ancien ministre, maire de Dakar depuis 2009 et élu député en juillet alors qu’il est en détention provisoire depuis mars, a été exclu samedi du Parti socialiste, en même temps que 64 autres responsables et militants de la formation du premier président sénégalais Léopold Sédar Senghor.
Aujourd’hui membre de la majorité soutenant le président libéral Macky Sall, au pouvoir depuis 2012, le PS accuse Khalifa Sall et ses partisans d’être entrés en dissidence, leur reprochant une "indiscipline caractérisée, un refus systématique de respecter les règles" du parti et "des activités politiques concurrentes et parallèles" aux siennes.
Khalifa Sall avait présenté à Dakar une liste dissidente victorieuse aux élections locales de 2014. Il a ensuite multiplié les critiques contre la coalition présidentielle, appelant notamment à voter non au référendum constitutionnel du 20 mars 2016 porté par Macky Sall.
Ses partisans imputent ses déboires judiciaires à cette fronde et à sa volonté de se présenter à l’élection présidentielle, des soupçons rejetés par les responsables du pouvoir.
Ce procès démontre "qu’il est malheureusement encore possible au Sénégal pour un pouvoir politique d’instrumentaliser la justice dans le seul but d’atteindre un adversaire", a déclaré à l’AFP Cheikh Bamba Dièye, député de l’opposition et soutien de Khalifa Sall.
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