En novembre 2007, Nicolas Sarkozy avait choisi l’université de Dakar pour flinguer les Africains « en marge de l’histoire ».
A travers un discours aussi stéréotypé que condescendant, le président français avait, chez Cheikh Anta DIOP, sorti l’Afrique de l’histoire. 10 ans plus tard, Emmanuel Macron est sur les pas du tombeur de Kadhafi. Au Burkina Faso, le successeur de François Hollande a aussi choisi une université portant le nom d’une figure emblématique, pour faire son cours magistral et remuer les archives d’une histoire contemporaine de l’Afrique dont la France empêche l’exacte restitution.
«Tous les documents produits par administration française pendant le régime de Sankara et après son assassinat soient déclassifiés pour être consultés en réponse aux demandes de la justice burkinabè. (…) Ce qui veut dire que tous les documents que la justice voudra consulter (…) seront ouverts et transmis ». Ces propos d’Emmanuel Macron devraient faire froid dans le dos des Burkinabé mais aussi de tout africain faisant de Thomas Sankara une icône. Depuis qu’il est question de faire la lumière sur l’assassinat de l’ancien président du Burkina, la France, toute tranquille, garde dans ses archives des documents pouvant aider à la manifestation de la vérité. Le 15 octobre dernier, le Comité international mémorial Thomas Sankara (CIM-TS) a initié une marche qui a mobilisé des centaines de personnes pour réclamer la lumière sur cette affaire. C’était la énième manifestation organisée dans ce sens. Et, c’est tout décontracté que le président français annonce leur restitution à la Justice burkinabé qui peine à faire le tour de cette affaire que la censure a complexifiée. Mais, si la France garde secrètement cette importante partie de l’histoire contemporaine du pays des hommes intègres, c’est fondamentalement parce qu’elle quelque chose à se reprocher. Et, il est fort à parier que le président français n’a pas fait une telle déclaration à l’université portant le nom du professeur Joseph KI-ZERBO par hasard. Le président français aime le show. Il en raffole même. Son âge en est probablement pour quelque chose. En bien ou en mal, quel que soit le lieu où il se trouve, Emmanuel Macron cherche à marquer les esprits. Mais avec l’histoire, il ne marche que sur les platebandes de ses devanciers. En effet, les présidents français semblent trouver un malin à s’amuser avec les pages d’histoire de cette partie de l’Afrique qui demeure sous leur joug. Après que Sarkozy a balafré l’histoire avec des propos que des intellectuels africains ont perdu du temps à décrypter, François Hollande l’a singé. Il ne s’est certes pas rendu dans une université comme son prédécesseur, mais à Thiaroye, en décembre 2014, il a voulu marquer les esprits, en passant comme à l’accoutumée par l’histoire. Inaugurant, aux côtés de Macky Sall, un mémorial au cimetière de Thiaroye, il avait indiqué avoir remis «l’intégralité» des archives que la France possède sur Thiaroye. Le chef de l’Etat français, avait le temps d’une matinée, reconnu les crimes et la responsabilité de la France. «Je voulais réparer une injustice et saluer la mémoire d’hommes qui portaient l’uniforme français et sur lesquels, les Français avaient retourné leurs fusils, car c’est ce qui s’est produit », avait-il admis. Pourtant, jusque-là, l’histoire officielle des deux pays continue à mentionner et à raconter que les évènements de Thiaroye étaient «une mutinerie d’ex-prisonniers de guerre ayant nécessité une riposte armée des Troupes coloniales le 1er décembre 1944 ».
Pour ces trois présidents français, les temps des discours énergiques sont dépassés même si les visées de la France sur le continent n’ont pas changé. Depuis Sarkozy, la France a beaucoup plus tendance à reconnaitre oralement ses fautes et à caresser dans le sens du poil les peuples africains de plus en plus réfractaires à leur domination. Mais, aucun d’entre eux ne rame à contre-courant des idées du Général De Gaule dont l’humanité doit la célèbre assertion : «Les Etats n’ont pas d’amis. Ils n’ont que des intérêts ».