La Cour d’assises de Dakar a condamné, hier, le maçon–menuisier Louis dit Moustapha Diouf à 20 ans de travaux forcés pour assassinat.
Amis pendant plusieurs années, Louis dit Moustapha Diouf et Mouhamadou Mbacké Niang étaient devenus les pires ennemis, à cause d’une femme. Le second avait brisé le cœur du premier, en lui arrachant celle qu’il aimait et avec qui il avait eu deux enfants.
Alors que Moustapha n’avait pas encore fini de digérer son dépit amoureux, voilà qu’un jour son ami lui aspergea de l’acide dans les yeux, avant de le poursuivre armé d'une hache. Sauvé par les cris de son épouse, Moustapha prit ses jambes à son cou.
A sa sortie au bout de 11 jours d'hospitalisation, la haine de Moustapha Diouf à l’égard de celui qui fut son ami n’a fait que s’accentuer. Pour éviter l’irréparable, les deux familles ont tenté d’arrondir les angles. Mais en vain, car Mouhamadou Mbacké fut alors condamné à trois mois de prison ferme pour coups et blessures volontaires.
Il avait aussi été condamné à payer à Moustapha Diouf des dommages et intérêts estimés à 1,5 million de francs CFA. Malgré la condamnation de son bourreau, la soif de vengeance de Moustapha grandissait. C’était même devenu une obsession au point même qu’il lui arrivait de faire des cauchemars dans lesquels il était poignardé.
Le témoignage du petit-frère
Ainsi, lorsqu’il a croisé la victime chez son petit-frère, le 24 août 2009, il n’a pas hésité à lui planter deux coups de couteau. Le jour du drame, la victime s’était rendue chez le frère de l’accusé pour récupérer son véhicule.
‘’Je l’ai entendu saluer et demander après moi. Moustapha, qui était devant la porte de ma chambre, s’est dirigé vers lui’’, a témoigné Paul. Avant de poursuivre : ‘’j’ai entendu mon frère lancer à la victime : ‘’je te cherchais et tu viens ici’’ ( tu t’es jeté dans la gueule du loup) et subitement j’ai entendu : ‘’il m’a poignardé’’. Selon le témoin, lorsqu’il est sorti, son frère avait poignardé Mouhamadou au ventre et poursuivait sa victime qui courait.
Il lui porta un autre coup au dos. ‘’Lorsque, je l’ai interpellé sur son acte, il m’a rétorqué : ‘’il m’a aspergé de l’acide, puis il a tenté de me poignarder, donc je l’ai tué pour me venger et c’est fini’’, a conclu le témoin.
Moustapha a réfuté catégoriquement la thèse de la vengeance. Il a évoqué plutôt un certain traumatisme, depuis l’incident de l’acide. ‘’Je ne voulais nullement me venger, car je lui avais pardonné sur demande de mon père’’, s’est-il défendu, tout en avançant qu’une certaine crainte l’habitait.
Surtout que, a-t-il argué, ‘’des gens me demandaient souvent de me méfier de Mouhamadou Mbacké, car il menaçait de me tuer’’. C’est pourquoi, dit-il, il a craint pour sa vie, lorsqu’il a croisé la victime chez son frère. ‘’Il sentait l’alcool et avait le visage renfrogné et quand je l’ai vu prendre quelque chose, j’ai cru qu’il allait me tuer. Pour me sauver, je l’ai poignardé sans viser’’, s’est-il défendu.
Pour le substitut général Madiaw Diaw, rien ne peut justifier l’acte commis Moustapha. A ses yeux, l’accusé ne mérite ‘’aucune mansuétude’’, mais plutôt les travaux forcés à la perpétuité. Me Ndiogou Ndiaye considère que même si son client doit être sanctionné, ceci doit se faire d’une façon ‘’équitable’’.
Car, à son avis, même s’il avait l’intention de tuer, la préméditation n’existe pas. C’est pourquoi, il a demandé que l’assassinat soit disqualifié en meurtre. La Cour ne l’a pas suivi, puisque l’accusé a été condamné à 20 ans de travaux forcés. Les deux veuves de la victime n’ont pas réclamé de dommages et intérêts.