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Incarcération du maire de Dakar: La Ville, l’autre front ouvert contre Khalifa Sall
Publié le samedi 4 novembre 2017  |  Enquête Plus
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© aDakar.com par DF
Les maires des villes de Dakar et Montréal signent une convention
Dakar, le 11 Octobre 2015 - La ville de Dakar et la ville de Montréal signent une convention. Cet accord de partenariat vise à bâtir des relations étroites, à poursuivre des objectifs de croissance et développement mutuels. Photo: Khalifa Ababacar Sall, maire de Dakar




Avec son immunité parlementaire en péril, Khalifa Sall doit s’inquiéter aussi de la suppléance prolongée à la Ville de Dakar (VDD), où les conseillers pro-gouvernementaux ne se privent pas de lui savonner la planche

Le maire de Dakar aimante les tirs groupés en provenance de la majorité. Dans la féroce adversité politique qui l’assaille, Khalifa Sall est loin de voir le bout du tunnel. En plus de la phase initiale d’une procédure à l’Assemblée nationale destinée à lui ôter son immunité parlementaire, enclenchée hier, des tractations adverses visant à détricoter son confortable habillage à la Ville de Dakar pourrait constituer le prochain épisode de son inconfort politique. Le vote du compte administratif 2016 à la Ville de Dakar (VDD), finalement adopté ce mardi, a été l’occasion pour les conseillers municipaux qui ne lui sont pas favorables (Apr, Ps ‘‘institutionnel’’) d’agiter le chiffon rouge de la vacance du pouvoir à la tête de la mairie.

‘‘On est dans une situation de jurisprudence où il y a un vide. Ça bloque le fonctionnement de la mairie. On n’est pas capable d’examiner ce compte en sa présence alors que c’est lui qui est comptable’’. Pour le conseiller Benno, membre de la direction nationale de l’Apr et conseiller à la Ville de Dakar, Ibrahima Fall, l’absence prolongée du maire est problématique. ‘‘Aujourd’hui, la Ville est assurée par une suppléance alors qu’elle n’est pas une règle mais une exception. Même pour le vote du compte administratif, on est dans une situation de suppléance, ce qui n’est pas normal. On ne peut le voter en l’absence du maire Khalifa Sall. Cette suppléance ne donne pas tous les droits aux adjoints, certains actes ne peuvent être posés que par le maire lui-même’’, se confiait-il à EnQuête, à la veille du vote.

Aux points 2, 3, 4, 5 de l’article 171 du Code général des Collectivités locales de 2013, le maire de la ville a en charge respectivement de gérer les revenus, de surveiller les services et la comptabilité de la ville ; de préparer et de proposer le budget, d'ordonnancer les dépenses et de prescrire l'exécution des recettes ; de diriger les travaux de la ville ; de veiller à l'exécution des programmes de développement financés par la ville ou réalisés avec sa participation. ‘‘On nous a convoqués pour l’examen et le vote du compte administratif de 2016, qui reflète la gestion du maire. Lorsqu’on examine le compte, le maire qui est ordonnateur des dépenses doit être présent pour répondre à certaines questions. S’il n’est pas présent, qui va répondre de la gestion de 2016 ? Ce ne sont pas les adjoints, car la loi ne le permet pas ; le code ne le permet pas, car ils n’ont été ni ordonnateurs ni administrateurs de dépense’’, a insisté le conseiller de la Ville, M. Fall.

Le président de la séance de mardi, et non moins maire des Parcelles Assainies, Moussa Sy, estime que c’est un faux débat. ‘‘Le compte administratif a été voté à l’unanimité ce mardi. Tous ceux qui agitent cette question sont minoritaires dans le Conseil de ville’’, a-t-il déclaré au bout du fil, lui qui a présidé la séance. Cette absence prolongée, depuis mars 2017, est une ‘‘situation d’exception’’, souligne le conseiller BBY.

Soham Wardini : ‘‘Il n’y a pas de blocage’’

Mais pour l’instant, Khalifa Sall n’est pas ‘‘décédé, suspendu, révoqué ou déclaré démissionnaire’’ pour que cette délégation de pouvoirs à certains de ses adjoints soit rapportée, selon les dispositions de l’article 172 du Code général des Collectivités locales. Le même article stipule qu’il est possible au maire de ‘‘déléguer par arrêté une partie de ses attributions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement de ses adjoints, à des membres du conseil de la ville’’. C’est ce qui explique sans doute l’étonnement du premier conseiller adjoint, Soham Wardini, sur ce point. L’élue est d’avis que l’absence du maire Khalifa Sall n’est pas une première et ne sera pas un blocage pour la gestion de la Ville. ‘‘J’ai entendu parler de blocage parce que Khalifa Sall n’est pas là, mais je ne comprends pas ! Comment pourrait-il y avoir blocage ? Une ouverture de session pour aller en inter-commissions, par la suite, ne peut pas causer de blocage’’, avance-t-elle.

Mme Wardini estime que travailler en l’absence de l’édile n’a jamais été un problème et que les dispositions légales précitées lui permettent bel et bien d’assurer l’intérim de M. Sall. ‘‘On a l’habitude de travailler en son absence, même du temps où il n’était pas encore incarcéré. Il voyageait beaucoup. Il faisait de sorte qu’il y ait toujours une équipe fonctionnelle pour le suppléer. Donc, son absence ne nous gêne en rien dans notre travail. Il est toujours maire de Dakar. On ne l’a pas encore démis de ses fonctions’’, avance-t-elle. D’ailleurs, en dépit de sa marge de manœuvre très réduite, assure l’adjointe, Khalifa Sall gère toujours depuis la prison. ‘‘Tous les courriers lui parviennent en prison. Il est vrai qu’il nous a donné à Moussa Sy et à moi des délégations de pouvoir, mais, c’est lui qui les signe et les traite depuis son lieu de détention. Le directeur des services techniques et le secrétaire général de la Ville vont travailler avec lui deux ou trois fois par semaine. Je ne vois aucun problème’’, ajoute-t-elle.

‘‘Lorsqu’il y a blocage de ce genre...’’

Un problème administratif qu’il serait très difficile de débarrasser de sa part de politique. Tentative d’enterrement politique de première classe ? Ibrahima Fall rejette cette éventualité. ‘‘On ne parle pas politique, mais de gestion de la municipalité’’, a-t-il lancé, assurant qu’à part Taxawu Dakar, la coalition qui a porté Khalifa Sall à la mairie de Dakar, tout le monde était dans cette logique de sédition. Si ce ‘‘hold-up’’ administratif est mis en échec par le vote du compte administratif de 2016, le doute n’est plus permis sur les intentions des conseillers pro-gouvernementaux de la VDD de faire écrouler le plus grand coefficient politique de Khalifa Sall. Tous les moyens sont utilisés. ‘‘Lorsqu’il y a blocage de ce genre, on est obligé de mettre sous délégation spéciale la Ville de Dakar. Il n’y a que cela pour lever toute équivoque et débloquer la situation. C’est un acte qui va mettre fin à la suppléance’’, lâche enfin Ibrahima Fall, concluant une logique de déshabillage institutionnel implacable. Une autre paire de manches.
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