Ces trente dernières années, le gotha sénégalais a pris ses aises le long de la côte. Le littoral dakarois a été détruit à coups de constructions anarchiques. Peut-on encore limiter les dégâts ?
«Je suis un peu comme saint Paul lorsqu’il s’est converti sur le chemin de Damas. Il y a quarante ans, moi aussi je voulais construire sur le littoral », confie Pierre Goudiaby Atepa. Si les textes saints prétendent que c’est en entendant la voix de Jésus que Paul de Tarse, l’ancien pharisien persécuteur des premiers chrétiens, est devenu le « treizième apôtre », ce célèbre architecte s’est quant à lui converti à la préservation du littoral dakarois en écoutant Léopold Sédar Senghor. « La corniche appartient à tout le monde, on ne saurait la privatiser », disait le premier président sénégalais. Une devise qu’il a depuis faite sienne.
En septembre, après avoir alerté la presse, Pierre Goudiaby Atepa mandatait ses avocats pour déposer une plainte destinée à bloquer un énième projet controversé, sur la corniche ouest de Dakar. En cause, un chantier de 40 000 m2 situé en contrebas de l’Espace Senghor – à quelques dizaines de mètres de la maison de l’ancien chef de l’État. Dans sa ligne de mire, le maire de la commune de Fann-Point E, qui a délivré le permis de construire, le groupe Terrou-Bi, qui en a bénéficié et qui possède déjà un hôtel faisant face aux îles de la Madeleine, et le groupe Eco Loisirs, constructeur de plusieurs édifices sur la corniche.
S’ils ne sont pas nommés dans la plainte, les heureux propriétaires des parcelles obtenues depuis le morcellement de ce vaste terrain se sont également sentis visés.
Détenteurs de titres fonciers, par dérogation aux dispositions légales protégeant le domaine public maritime (DPM, théoriquement inaliénable, imprescriptible et inconstructible), certains privilégiés n’ont pas tardé à prendre leur téléphone afin de freiner l’ardeur de l’architecte.
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