L’intersyndicale des travailleurs de l’hôpital de Pikine a fait face aux journalistes hier. Ibrahima Diaw et ses camarades ont réglé leurs comptes avec la presse et la famille de la victime Aïcha Diallo.
L’affaire Aïcha Diallo, du nom de la jeune fille décédée pour négligence médicale, continue à faire du bruit. L’intersyndicale des travailleurs de l’hôpital de Pikine a organisé hier une conférence de presse pour apporter sa version des faits et dénoncer ce qu’il appelle de ‘’l’acharnement’’ de la part de la presse. ‘’Nous n’accepterons pas que des gens mal intentionnés ternissent l’image de l’hôpital. Parce que ternir l’image de l’hôpital, c’est ternir l’image des personnes qui y travaillent.
Alors que depuis dix ans, nous travaillons pour ériger cet hôpital au rang des meilleurs hôpitaux’’, fulmine le secrétaire général adjoint de l’intersyndicale, Ibrahima Diaw. Le personnel médical, paramédical et administratif, qui doute de la version de la maman de la fille, invite la famille de la victime à édifier l’opinion sur les causes du traumatisme de l’enfant. ‘’La maman a dit que l’enfant est tombée du haut d’un étage, a atterri sur un bois qui a perforé l’anus, cela nous pose problème. C’est pour cela que nous demandons à ce que l’enquête soit approfondie’’, renchérit M. Diaw.
L’intersyndicale a, par ailleurs, nié toute négligence médicale. Selon M. Diaw, l’information selon laquelle l’enfant n’a pas été bien prise en charge est fausse. ‘’Nous demandons aux journalistes de faire des investigations, avant de publier des articles. Nous n’avons pas demandé 200 000 F pour sa prise en charge. L’enfant a été prise en charge du vendredi jusqu’à sa phase de décès. C’est la facture présentée à la famille qui a posé tout ce problème’’, a-t-il dit. Se sentant diffamés, les travailleurs ont invité l’hôpital à traduire en justice ‘’toute personne impliquée dans cette affaire’’. ‘’Une plainte contre X sera déposée, parce que nous n’allons pas accepter qu’on nous attaque. Nous avons tous des enfants. On ne souhaite la mort de personne’’, se défend Abdoul Dème, membre de l’organisation.
Ce dernier a rappelé que l’hôpital polarise trois départements (Pikine Guédiawaye, Rufisque), alors qu’il n’a que 125 lits pour toute cette population. Et pour faire face à la demande, des salles d’attente sont en construction. La salle des urgences est en train d’être élargie. Et malgré tout, la consultation est à 3000 francs, alors que c’est un hôpital de niveau 3.
SALIOU FAYE DAFF (SG DU SYNDICAT AUTONOME DE LA SANTE)
‘’L’enquête doit être approfondie’’
Le secrétaire général du syndicat autonome de la santé a pris part, hier, à la conférence de presse. Saliou Faye Daff, venu prêter main forte à ses camarades, s’en est pris lui aussi à la presse. ‘’Il y a deux à trois points extrêmement importants. Le journaliste qui a sorti l’information s’est trompé de bout en bout. Il a déclaré 200 000 F CFA, alors que c’est 115 000 F CFA. Soit 85 000F CFA de différence. Il parle de ’’non-assistance à une personne en danger’’, ce qui veut dire que la personne meurt devant l’hôpital. Mais une personne qui meurt en réanimation, c’est parce qu’elle était prise en charge’’, déclare-t-il. Le syndicaliste a salué le courage du médecin qui, selon lui, a brandi le document médical en promettant de le publier en cas de nécessité, en dépit de son caractère confidentiel.
M. Daff invite les uns et les autres à prendre en compte le fait qu’un hôpital reçoit 12 000 à 14 000 patients par an. ’’Il y a des gens qui chaque matin ne font que fouiner dans nos hôpitaux. Des décisions seront prises avec tous les concernés’’, prévient-il. Prenant exemple sur la réaction des avocats, après la sortie de l’ancien Président Abdoulaye Wade contre les conseils de l’Etat dans le procès de Karim Wade, il a invité ses camarades à faire bloc pour assurer leur défense.
Comme ses partisans, Saliou Faye Daff s’est lui aussi posé des questions sur ce qui s’est passé chez Aïcha Diallo, avant qu’elle ne soit conduite à l’hôpital. ‘’Nous présentons certes nos condoléances à la famille, mais l’enquête doit être approfondie par rapport à la blessure. Et puis, quand a-t-on acheminé l’enfant vers les urgences ? Est-ce qu’elle a saigné ? Est-ce que les habits qu’elle avait portés étaient tachetés de sang ?’’, se demande-t-il. Il reconnaît certes que tout n’est pas rose dans les hôpitaux, mais il tient aussi à ce que la ‘’bravoure’’ de ceux qui se donnent pour la santé soit reconnue. Selon lui, s’il y a un mort sur 1 000 patients soignés, le médecin a mal. ‘’Je pense que ceux qui sont là méritent d’être encouragés et encadrés. Il est temps que les gens se lèvent et disent qu’on ne va plus laisser des gens faire du buzz sur les hôpitaux’’, invite-t-il.
Il a, par ailleurs, profité de l’occasion pour plaider pour plus de ressources financières dans la Santé. Le budget étant actuellement de 163 milliards, il veut qu’il soit porté à 250 milliards.
CHEIKH THIAM