L’intersyndicale des travailleurs du chemin de fer est persuadée que l’Etat veut sacrifier Dakar-Bamako ferroviaire au profit du Train express régional (TER). Hier à Thiès, ils ont décliné un plan d’action (arrêt de travail, marché) pour amener l’Etat à réagir et à participer au processus de relance des activités du chemin fer qui a besoin d’une ligne de crédit de 10 milliards de F Cfa pour sortir de l’ornière.
Depuis quelques années, le train ne siffle presque pas dans la cité du Rail. Les cheminots vivent une situation difficile et paient, aujourd’hui, les impairs de la privatisation et de la transition de la société Transrail devenue Dakar-Bamako ferroviaire (Dbf). En assemblée générale de remobilisation et de relance des activités du chemin de fer, hier, les cheminots ont annoncé une batterie de mesures au plan local pour amener l’Etat à réagir. A l’issue de leur rencontre, des grèves et des marches ont été prévues, dans les jours à venir. Ces décisions vont être entérinées, aujourd’hui par le secrétariat exécutif de l’intersyndicale des travailleurs du Rail, pour déterminer les dates, les heures et les itinéraires.
Selon le secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (Cnts/Force du Changement), l’heure a sonné pour les cheminots. D’après Cheikh Diop, ils doivent prendre "à bras le corps leur combat’’ pour tracer leur propre destin. Il appelle, également, à la mobilisation de toutes les forces sociales du pays autour du chemin de fer pour faire face à l’Etat et "combattre l’injustice’’. "A l’heure où nous tenons cette assemblée générale, les travailleurs du chemin fer n’ont toujours pas reçu leurs salaires du mois de septembre. Les retraités sont dans la même situation: leurs cotisations sociales ne sont plus versées et leurs familles sont laissées à elles-mêmes. Ils vivent une situation compliquée, et c’est l’Etat du Sénégal qui est le principal responsable’’, fulmine le syndicaliste.
10 milliards pour relancer Dakar-Bamako ferroviaire
L’intersyndicale des travailleurs du chemin de fer demande à l’Etat une valeur de 10 milliards de F Cfa pour relancer définitivement les activités de Dakar-Bamako ferroviaire (Dbf). Un montant qui n’est toujours pas mis à leur disposition. C’est pourquoi le secrétaire général du Syndicat autonome des travailleurs du rail (Satrail) estime que le président de la République a échoué sur le plan ferroviaire. En lieu et place du chemin de fer, soutient-il mordicus, le président Macky Sall veut installer le Train express régional (TER).
"Le chef de l’Etat veut enterrer définitivement le chemin de fer et mettre en place son TER. Et nous ne l’accepterons jamais. Ce projet va coûter à l’Etat du Sénégal plus de 500 milliards de F Cfa. Or, les cheminots n’ont besoin que de 10 milliards F Cfa. Le Président Macky Sall doit revoir sa politique. Le Train express régional, c’est de la traîtrise. C’est pour se débarrasser des travailleurs du rail qu’il a initié un tel projet. Le gouvernement a échoué dans le processus de privatisation et la reprise de DBF. Il faut oser le dire’’, tempête Mame Mbaye Diakhaté sous les applaudissements de ses collègues travailleurs. Aussi, ajoute-t-il, le combat pour "restaurer leur dignité’’ ne fait que commencer et va se poursuivre dans la "souveraineté’’.
"Pour inaugurer le TER, l’Etat doit passer sur nos corps’’
Pour sa part, Mame Mbaye Tounkara soutient qu’il est temps de joindre l’acte à la parole. La grève, affirme-t-il, est le seul moyen de faire réagir l’Etat du Sénégal. "Nous avons combattu Jaber (Abass Jaber, ancien patron de Transrail et de la Sonacos: NDLR). Il est parti. Quelqu’un me disait qu’il a regretté son départ, parce que DBF, qui se trouvait être la solution idoine au problème des travailleurs du chemin de fer, est plus que jamais dans la tourmente. Jaber payait au moins les salaires. Aujourd’hui, nous sommes face à un gouvernement qui a lamentablement échoué dans sa politique de transition. L’Etat nous parle du TER. Nous ne voulons pas de ce projet’’, lance avec fermeté M. Tounkara.
Le secrétaire général du Syndicat unique des travailleurs du rail (Sutrail) de dire que pour procéder à l’inauguration de son projet, "l’Etat va passer sur leur corps’’. A ce jour, 71 retraités du chemin de fer courent derrière leurs indemnités de départ. Retraité et ancien secrétaire général du Syndicat autonome du chemin de fer, Oumar Bâ pense aussi que la priorité de l’Etat du Sénégal, c’est le TER et il veut "détruire’’ le chemin de fer. "Nous ne sommes pas contre le TER, mais le président de la République doit aussi savoir que le chemin de fer constitue un maillon essentiel dans l’économie du pays. Il nourrit des milliers de familles. Il est temps qu’on s’arrête pour régler définitivement ce problème. Si le gouvernement accepte de mettre sur la table 10 milliards de F Cfa, le problème sera résolu’’, souligne Oumar Bâ, invitant tous les travailleurs au respect des décisions prises dès aujourd’hui.
GAUSTIN DIATTA