Dakar - La gestion du paysage historique urbain au Sénégal se trouve confrontée à difficultés liées notamment à la disparation de certains matériaux ayant servi à la construction de certains édifices historiques, a souligné le directeur du patrimoine culturel, Abdoul Aziz Guissé.
"Il est extrêmement difficile de gérer ce paysage historique urbain que nous avons hérité (de la colonisation) et qui fait partie de notre histoire partagée et que nous assumons", a-t-il dit en introduisant, jeudi, à Dakar, une conférence publique sur le thème : Gestion du paysage historique urbain au Sénégal, le cas de Saint-Louis".
Selon Abdoul Aziz Guissé, "non seulement les matériaux qui ont été utilisés à l’époque sont assez spécifiques (bois, pierre, etc.), mais aussi ’’il est difficile de réhabiliter’’ les édifices concernés, "parce que nos entreprises n’ont pas la qualité qu’il faut ni sur le plan technique, ni sur le plan quantitatif".
Des réhabilitations sont malgré tout faites mais celles-ci relèvent plutôt de "malfaçons, des choses horribles, mais on est obligé de réhabiliter", a indiqué M. Guissé, professeur d’histoire et de géographie de formation.
S’y ajoute que les communautés constituent aussi selon lui un autre problème dans la gestion de ce patrimoine architectural historique composé d’ensembles historiques comme le centre-ville de Dakar et le Plateau.
Il y a aussi les blocs administratifs et les logements des fonctionnaires, de places dédiées aux forces militaires comme l’avenue Roume, le camp Lat Dior, entre autres.
"Les communautés, c’est un autre problème, parfois cela peut être une liaison filiale, par exemple à Saint Louis, on parle de +Domu Ndar+, ils sont attachés au pont Faidherbe, au Rognât, à la statue de Faidherbe, si on enlève cela, ils reconnaitront plus leur ville", fait valoir Abdoul Aziz Guissé.
"Parfois, il y a certains qui vous disent : +j’ai envie de démolir cette vieille bâtisse et de construire comme à Dakar+", a-t-il relevé, regrettant que cela soit souvent le fait de "personnes aisées" et dont on peut penser qu’elles sont "capables d’apprécier le patrimoine".
"Malheureusement, souvent, ce n’est pas forcément les populations d’un certain milieu qui veulent démolir, mais des personnes aisées qui sont capables d’apprécier un patrimoine historique", explique le directeur du patrimoine culturel.
"C’est même parfois les gouvernants qui sont à l’origine de ces faits", dénonce Abdoul Aziz Guissé, selon qui il existe pourtant "depuis 1930 un cadre législatif offrant la possibilité de protéger notre patrimoine et qui a été renforcé par le premier président Léopold Sédar Senghor dans les années 1970".
Aussi suggère-t-il de stratégies de sensibilisation "pour montrer aux populations l’importance de conserver nos valeurs, notre histoire porteurs d’un développement profitable à toute la communauté" nationale.
Cette conférence publique animée par le directeur du patrimoine culturel, à l’initiative de l’Institut Léopold Sédar Senghor de Dakar, s’inscrivait dans le cadre de la célébration des Journées européennes du patrimoine.
FKS/BK