Le prochain président de l’Union des magistrats sénégalais sera connu ce week-end, à l’issue de leur Assemblée générale. Trois candidats sont en lice : le président sortant Magatte Diop, le juge Souleymane Téliko et leur collègue Marième Diop Guèye. Le scrutin s’annonce serré et très disputé. EnQuête présente leurs profils.
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Magatte Diop, le Benjamin !
Candidat à sa propre succession, Magatte Diop a du pain sur la planche. Ce samedi, il devra batailler ferme pour arriver à bout de ses adversaires dont Souleymane Téliko.
Il a l’avantage de la jeunesse. Mais aussi celui du candidat sortant. Pour sa réélection, le président Magatte compte non seulement sur son bilan qu’il juge reluisant, mais aussi sur le dynamisme et l’efficacité du bureau sortant qui le soutient toujours. Il déclare : ‘’Nous sommes une équipe. Nous resterons toujours sereins et nous nous conduirons toujours en dignes et loyaux magistrats. C’est ce qui caractérise le bureau actuel de l’UMS. C’est un groupe soudé et dynamique. Ce qui nous a valu tous les acquis qu’on a obtenus, depuis que nous présidons aux destinées de cette structure’’. Mais cela n’est pas suffisant, selon ses détracteurs. ‘’Un dirigeant doit faire des sacrifices. Avec lui, l’UMS était presque morte’’, argumente l’un d’eux.
Mais Magatte Diop pourrait pâtir d’une étiquette qui lui colle à la peau. Il lui est reproché une certaine proximité avec la tutelle. A cela s’ajoutent ses positions jugées peu courageuses à l’occasion des grands débats qui ont secoué la magistrature. Des magistrats lui en veulent de n’avoir pas assez porté leurs véritables préoccupations auprès de l’autorité. L’un d’eux l’accuse ouvertement : ‘’Il n’y a aucun doute. Magatte Diop est le candidat de la hiérarchie. On ne peut rien attendre de lui’’. Mais le juge du siège maintient le cap. Bottant en touche les accusations, il mène sa campagne. ‘’Mon seul combat, dit-il, c’est la défense de la corporation. Je suis prêt à y laisser ma vie. Je ne suis pas le candidat de la hiérarchie. Je suis le candidat de l’unité. Je suis soutenu à titre principal par les jeunes. Allez au TGI et au TI (tribunal de grande instance et tribunal d’instance), vous allez vous en rendre compte. Et puis, la hiérarchie ne peut imposer personne. Elle ne représente même pas 10% du corps électoral’’.
‘’J’étais à la tête du combat’’
Jugeant donc les accusations mal fondées, il renvoie ses détracteurs à son bilan. ‘’On s’est toujours battu contre l’injustice. Tout le monde se rappelle les années de braise de la magistrature. J’étais à la tête du combat. Je me battrai toujours contre toute tentative de diabolisation et d’humiliation des magistrats’’. Vice-président de l’UMS à l’époque, il fait allusion aux remous de 2011, vers la fin du régime de Wade. A l’époque, les magistrats avaient, pendant deux jours, paralysé les tribunaux pour réclamer des maisons, l’augmentation de l’indemnité de judicature et plus d’indépendance pour les juges. L’ancien Président sénégalais demandait à ses ministres de ne pas signer des engagements que le gouvernement ne pouvait respecter. Ce qui avait enlisé la situation.
La quarantaine révolue, Magatte est magistrat depuis 20 ans. Ce samedi, il fera face à une opposition farouche. C’est pourquoi il poursuit sa campagne en défendant son bilan bec et ongles. Selon lui, même ceux qui s’agitent devraient les remercier. ‘’C’est grâce à nous que l’accès au grade hors hiérarchie est passé à 18 ans’’, dit-il. A propos de ses challengers, il souligne que ‘’chacun est libre d’être candidat’’. ‘’Au sortir de l’élection, il n’y aura ni vainqueur ni vaincu, car nous tous œuvrons pour l’intérêt de la magistrature ’’, ajoute-t-il. Confiant de sa réélection à la tête de l’UMS, il lance un message de fair-play à ses concurrents. ‘’En tout cas, si nous sommes tous animés par l’intérêt des magistrats, il ne doit pas y avoir de problème. C’est juste des élections, on va vite les dépasser. Et seule la magistrature triomphera’’, déclare-t-il.
Durant sa riche trajectoire, Magatte Diop a été président du Tribunal de grande instance de Fatick, président de la quatrième chambre correctionnelle du tribunal régional hors classe de Dakar. Dans cette chambre, il a eu à conduire de grands dossiers politico-judiciaires comme l’affaire Diombass Diaw... Dans le procès Karim Wade, il a été assesseur du juge Henry Grégoire Diop. Par la suite, il a été nommé juge à la commission d’instruction de la même juridiction. Poste qu’il occupe toujours en cumul avec sa qualité de président de la deuxième chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Dakar.
MOR AMAR