Le système éducatif produit certes ce qu’il y a de meilleur, mais ce n’est pas une raison d’oublier la médiocrité de la grande masse. Le chef de l’Etat l’a rappelé hier lors de la cérémonie de remise des prix du Concours général au centre de conférence de Diamniadio.
Les meilleurs élèves du système éducatif sénégalais en 2017 se sont retrouvés hier au Centre international de conférence Abdou Diouf. Ils ont été 137 lauréats à avoir reçu leurs distinctions des mains des autorités, sous les yeux de la marraine, l’écrivaine Aminata Sow Fall. Mais bien qu’étant avec eux pour saluer leur mérite, le chef de l’Etat n’a pu s’empêcher de regarder l’autre face moins rassurant du système éducatif. Il suffit de voir les résultats catastrophiques au Bac pour se rendre compte que l’école ne produit pas que des lauréats du Concours général.
Ainsi, dès le début de son discours, Macky Sall a cité le Président-poète Léopold Sédar Senghor qui au soir de son règne s’inquiétait déjà de la qualité de l’école publique sénégalaise. ‘’Il y a 42 ans, exactement le 9 juillet 1975, à l’occasion de la fête du Concours général, le Président Léopold Sédar Senghor avait déjà sonné l’alerte. Évoquant les défaillances du système, Il disait d’une manière on ne peut plus clair, je le cite : il est bon que l’éclat de quelques-uns ne nous aveugle pas sur la médiocrité du plus grand nombre’’, dixit-il. Selon donc le Président Macky Sall, ces propos de l’académicien gardent aujourd’hui plus que jamais tout leur sens. Il suffit juste de voir les résultats des différents examens, avec une moyenne de 30% environ d’admis au Baccalauréat dans les 10 dernières années.
Et pourtant, le pouvoir dit avoir beaucoup investi dans l’école. Si l’on en croit le président de la République, le Sénégal a mis 24% de son budget national dans ce secteur, contre 20% demandé par l’agenda 2030 de l’Education. ‘’Entre 2012 et 2017, 154 milliards ont été investi dans les infrastructures sociales, pédagogiques et matériels didactiques’’, se félicite Macky Sall. Aussi, en plus de faire passer les abris provisoires de 18% en 2011 à moins de 9% en 2017, le gouvernement va bientôt entamer une nouvelle phase de suppression définitive de ceux-ci. D’après le chef de l’Etat, les marchés sont déjà attribués à des entreprises sénégalaises. Il y a donc nécessairement d’autres facteurs explicatifs. La stabilité en fait certainement partie. Le chef de l’Etat semble l’avoir compris. C’est ainsi qu’il s’est dit favorable à un dialogue ‘’ouvert, franc et productif’’ avec les partenaires, dans le respect mutuel des accords.
À propos des lauréats, ils sont 65 filles et 72 garçons qui ont eu du mérite, car au début, il y avait 2725 candidats à avoir composé dans 28 disciplines. Le meilleur élève des classes de première est de nationalité gabonaise. Il s’agit de Sammy Davis Yann Ombandza, pensionnaire de l’Ecole prytanée militaire Charles Ntchoréré de Saint Louis. Le titre de meilleur établissement pour cette année revient au lycée Limamoulaye de Guédiawaye.
‘’La philo à partir de la Seconde’’
Le président de la République a invité les lauréats à s’inspirer de la vie et de l’œuvre de leur marraine. Une écrivaine prolixe, mais aussi une intellectuelle fortement enracinée dans les valeurs africaines et sénégalaises. Il les a également exhortés d’être respectueux de leurs parents. ‘’Pour trouver vos modèles, vous n’avez pas besoin d’aller loin. Vous n’avez pas besoin de chercher dans le virtuel ou l’internet. Vos modèles, ce sont vos parents’’, déclare Macky Sall. Il a insisté sur le respect et l’obéissance que les élèves doivent à leurs parents. Il leur a suggéré également de les traiter avec générosité, si demain ils réussissent dans la vie.
A noter que le prix de philosophie n’a pas été décerné cette année. D’où la volonté exprimée de Macky Sall d’enseigner cette matière à partir de la Seconde.
Ces impairs de l’organisation
Décidemment le Sénégal n’apprendra rien des erreurs du passé. Hier au Centre international de conférence Abdou Diouf (Cicad), une minute de silence a été observée à la mémoire des 8 personnes décédées au stade Demba Diop. Et c’est au même moment que le pays, particulièrement ceux qui incarnent l’Etat reproduisent les mêmes attitudes malheureuses. Le ministère de l’Education, organisateur de la cérémonie de remise des prix, a distribué plus de cartons d’invitation que de places disponibles. À l’arrivée du chef de l’Etat, la salle était déjà pleine. Et pourtant, il y avait presque autant de personnes dehors. Une masse que le président Sall n’a pas voulu laisser sur le carreau.
‘’Le Président est déjà arrivé, mais il y a beaucoup de monde dehors. Dans sa générosité, il a décidé qu’il va attendre que ces gens-là aient accès à la salle’’, déclare le maître de cérémonie. Tout ce beau monde a alors était admis dans la salle. Certains ont occupé les espaces qu’il y avait entre les sièges. D’autres étaient contraints de rester debout durant les 4 heures de la cérémonie. Toutes les voies de circulation ont été bouchées. Il est évident que les règles de sécurité ont manifestement été violées.
Et pourtant, le professeur de Lettres, Samba Ndiaye, trouvait encore dans ce spectacle une source de satisfaction. ‘’Il suffit de se retourner pour voir toute la masse qui entre et qui était dehors. Cela, grâce à la générosité du Président’’. Apostrophant les concernés, il renchérit : ‘’Encore une fois, ceux qui viennent d’arriver, si vous êtes là, vous le devez à la générosité du chef de l’Etat’’. Une dernière remarque qui a excédé un vieux déjà obligé de rester debout. Dans une voie pleine d’amertume, il rétorque : ‘’il fallait d’abord bien vous organiser. Si vous étiez bien organisés, personne ne serait dehors’’. Parole d’un sage !