Les semences que le gouvernement a données, cette année, aux paysans ont été jugées mauvaises dans le Ndoukoumane. A Kaffrine, certains paysans ont revendu leur part, alors que d’autres ont préféré boycotter. Un rejet qui a provoqué le renchérissement sur le marché des graines sélectionnées.
La mauvaise qualité des semences dont se plaignent les paysans ne se limite pas uniquement à Kaolack. Dans le Ndoukoumane aussi, il est le principal sujet de discussion. Les acteurs ne cessent de se lamenter de ce qu’ils ont reçu. Dans les départements de Kaffrine et Birkelane, les cultivateurs sont quasi unanimes. Certains ont pris les semences, faute de mieux ou pour en faire un autre usage, d’autres ont préféré ne pas y toucher. À Kathiote, chef-lieu de commune, un jeune père de famille avoue avoir pris sa part, malgré lui. ‘’C’est une très mauvaise qualité. Mais que faire ? Nous n’avons pas d’alternative. C’est comme quelqu’un qui tombe dans un puits, même si vous lui tendez un couteau, il s’y agrippe. Une infime partie pourra être semée. Pour le reste, ce sera pour la cuisson’’, soutient-il.
Si l’on en croit les paysans, les graines sont de petite taille, elles ne sont pas pleines dans la coque. Ce qui fait que beaucoup d’entre eux préfèrent ne pas les semer pour ne pas prendre de risques. Une bonne partie de ceux qui sont partis encaisser leur quota l’ont fait en ayant une autre idée dans la tête. Soit ils se disent que ça peut servir de condiments, soit ils décident de le revendre. Ils sont nombreux à avoir pris cette dernière option. Les commerçants comptent d’ailleurs en profiter. Ce sont surtout eux qui rachètent ces quantités dont les paysans ne veulent pas.
En fait, du fait que les semences sont subventionnées par l’Etat, le kilogramme coûte moins cher que le prix sur le marché. L’Etat les cède à raison de 150 F le kilo. Mais à Kaffrine, les commerçants proposent 25 F de plus sur chaque kilo, soit 175 F. Ainsi, certains paysans ont préféré récupérer puis revendre à un prix supérieur pour aller acheter d’autres graines jugées de meilleure qualité. ‘’Nous sommes allés prendre l’arachide, mais il n’y a rien dans la coque. Nous l’avons revendue. Nous ne pouvons pas semer de telles graines’’, soutient Mamadou Ba du village de Ngodiba. Et comme ce qu’il a ne lui suffit pas, il est allé vendre l’un de ses deux chevaux pour avoir une quantité suffisante de semences. Ceux qui n’ont pas ces moyens alternatifs se trouvent au finish avec des quantités presque insignifiantes pour l’arachide et comptent se rabattre sur d’autres filières comme le maïs ou le sorgho.
‘’Puisque je ne peux pas les semer, j’ai choisi de ne pas prendre’’
D’autres, par contre, n’ont pas jugé nécessaire d’aller prendre leur part. El Hadji Diané, cet autre habitant du village de Ngodiba, en fait partie. ‘’Puisque je ne peux pas les semer, j’ai choisi de ne pas prendre. Ça ne sert à rien d’aller les récupérer pour des bénéfices minimes’’, souligne-t-il. Ce rejet des semences de la part des paysans a occasionné un renchérissement des prix de l’arachide. Le kilogramme de la graine sélectionnée qui se vendait à 550 voire 600 F à une semaine de la Korité a connu actuellement une hausse de 25%. Pas plus tard qu’hier, au marché hebdomadaire de Birkelane, le kilo s’échangeait à 800 F Cfa. Une autre variété à cycle court (fouré en wolof) est cédée à 1000 F contre 700 F, il y a deux semaines. Autant dire que c’est déjà mal embarqué, surtout que l’engrais n’est pas encore à la disposition des paysans, alors que les travaux ont démarré dans le Ndoukoumane, depuis le lendemain de la Korité.
BABACAR WILLANE