La communauté musulmane a perdu, au moment où elle s’apprétait à célébrer la fête de la Korité, un de ses guides avec le rappel à Dieu de El Hadj Moustapha Cissé. Décédé le samedi 24 juin à Dakar à son domicile à Sacré-Cœur, le Khalife général de la cité religieuse Pire a été inhumé le même jour dans sa localité. A coté de son manteau de chef religieux, le responsable de la Fraternité mulsulmane de Pire s’est aussi distingué dans la diplomatie en conciliant le rôle d’ambassadeur qu’il a exercé vingt ans durant dans différents pays arabes avec celui de conseiller des présidents Léopold Senghor et Abdou Diouf.
Alors que l’on s’apprétait à célébrer la fête de l’Aïd el fitr, la Ummah islamique et particuliérement la communauté musulmane sénégalaise a appris, samedi 24 juin, le rappel à Dieu à l’âge de 84 ans de El hadji Moustapha Cissé, Khalif de Pire. Le guide religieux a été inhumé le même jour dans la cité relgieuse de Pire après la priére mortuaire qui a été dirigé le même jour par le Khalif général des Tidianes, El Hadj Abdoul Aziz Sy Al Amine.
La disparution de serigne Moustapha Sy, c’est un chapitre de la vie religieux qui se refermait. A l’image de Serigne Cheikh Ahmed Tidjiane qu’il a déjà cité comme étant une référence, le défunt Khalife de Pire est un homme d’ouverture, un exemple vivant de la parfaite intégration des hommes de daara, des ces hommes dits arabisants qui ont réussi à allier leur mission et la gestion des affaires publiques voire politiques.
Surtout dans le domaine de la diplomatie sénégalaise qui était pendant longtemps la chasse gardée des diplomates de carriére ou autre énarques durant les premiéres décennies de l’indépendance du Sénégal.
Dépositaire du legs de Tafsir Abdou Cissé
Moustapha Cissé était avant tout le Khalife, le dépositaire du foyer de Pire et continuateur de l’enseignement de Tafsir Abdou Birane Cissé, un des premiers compagnons du vénéré Seydi El Hadji Malick Sy mais aussi l’initiateur du célébre Gamou annuel de Pire.
Un événement religieux initié en 1902 et organisé une semaine après celui de Tivaouane. Une manifestation qui contribua, en partie, à redonner à cette cité religieuse, cette vocation de centre d’enseignement islamique et universitaire.
Fondée par Serigne Pire Khaly Amar Fall au 17e siècle, l’Université de Pire tient sa réputation d’être le lieu de passage et ce foyer ardent ayant formé d’illustres personnalités religieuses. On peut notamment citer Thierno Souleyman Baal et Abdoul Khadre Kane qui avaient lancé la fameuse révolution «torodo» dans la région du fleuve en 1776. Au nombre des apprenants, on peut dénombrer Saidou Tall, père de El hadji Omar Al Foutiyou.
On ne peut pas évoquer le Gamou de Pire sans penser à la relation longtemps entretenue entre la famille de Tafsir Abdou Birame et celle de El Hadji Malick Sy et perpétués par Serigne Amadou Cissé et aujourd’hui par El hadji Moustapha Cissé, le Premier petit-fils à accéder au charge de khalifat.
Un Khalifat qu’il a marqué puisqu’il a réussi à transformer le visage de la cité à travers différentes réalisations. Sous l’ombre de son pére Serigne Amadou Cissé, El hadji Moustapha Cissé s’est très tôt signalé en homme d’ouverture. La manifesfation de son engagement sera la création en 1979, de la «fraternité musulmane». Un mouvement ouvert à des hommes religieux et charge de l’organisation du Gamou et l’éducation religieuse et le développement socio-économique de Pire.
L’empreinte du diplomate dans le monde arabe
Serigne Moustapha Cissé a surtout réussi à concilier ces charges de responsable moral de cette organisation avec le rôle d’ambassadeur. Maniant aussi bien le français que l’arabe, il sera cet inamovible diplomate du Sénégal dans le monde arabo musulman.
Sans discontinuer, il va servir pendant 20 ans dans plusieurs pays, notamment en Arabie Saoudite, au Koweit, en Egypte, au Qatar, au Sultanat d’Oman. Il devient le premier ambassadeur du Sénégal auprès de ces pays.
Ambassadeur du Sénégal en Arabie Saoudite en septembre 1970, El hadji Moustapha Cissé avait réussi, comme il le rappelera dans un de ses derniers entretiens accordés à nos confréres de l’Observateur, cette «première mission» de faire venir le Roi Fayçal d’Arabie Saoudite au Sénégal.
«En 1966, le Roi Ben Abdoul Aziz est venu en Afrique, il est allé au Mali et en Guinée, il avait ignoré le Sénégal, parce qu’il y avait Senghor. Certains pays arabes voyaient d’un mauvais œil que Senghor, un chrétien, puisse diriger le Sénégal, à forte majorité musulmane. Certains pensaient que c’est la France qui nous avait imposé Senghor. Mais avec le temps, ils ont tous compris qu’un chrétien peut bien être chef dans une communauté musulmane. J’avais constaté cela avant d’être dans la diplomatie. C’est pourquoi quand j’ai été nommé ambassadeur du Sénégal en Arabie Saoudite en septembre 1970, ma première mission était de faire venir le Roi Fayçal d’Arabie Saoudite au Sénégal. Deux ans après, j’ai réussi à faire venir Fayçal au Sénégal, en novembre 1972 », confiait-il.
Conseiller spécial des Présidents Léopold Senghor, Abdou Diouf, Serigne Moustapha Cissé a été accompagné à sa dernière demeure après la prière mortuaire qui a été dirigée par le Khalife des Tijanes Serigne Abdoul Aziz al Amine.