Le chauffeur Ousmane Konté et le marchand ambulant Cheikh Niang ont été attraits hier devant la Chambre criminelle. Ils risquent la prison à vie pour l’assassinat de la belle de nuit Coumba Diop à l’unité 20 aux Parcelles Assainies en 2011. Ce, malgré leurs dénégations systématiques à la barre. Délibéré le 4 juillet prochain.
La parquetière Ramatoulaye Ly Ndiaye veut envoyer Cheikh Niang et Ousmane Konté en prison pour la vie. Hier, devant la Chambre criminelle, elle a relaté par le menu l’affaire d’assassinat dans laquelle ils sont impliqués. Cela s’est passé le 27 juin 2014, au cours d’un vol commis la nuit avec usage de violences ayant entraîné la mort. En effet, le 8 janvier 2011, les éléments de la police des Parcelles Assainies ont été informés par le chef de quartier de l’Unité 20 de la découverte d’un cadavre dans sa localité.
Un transport effectué sur les lieux a permis aux enquêteurs de retrouver dans la chambre sise à l’immeuble indiquée le corps sans vie d’une dame à moitié nue, allongé sur un matelas. Aucune trace d’effraction n’a pu être constatée sur la porte et la fenêtre de la pièce. Même constat a été fait pour des traces de lutte sur les lieux du crime. L’examen sommaire du corps a relevé de graves blessures sur le côté gauche du cou, un morceau de tissu dans sa chair en raison de l’état de décomposition avancée du cadavre. Une situation qui a rendu impossible de procéder à l’autopsie.
Le propriétaire des lieux, Cheikh Lô, a déclaré que la victime était une locataire depuis deux mois et elle se disait restauratrice. Selon lui, elle ne sortait que vers 23 heures pour ne revenir que vers 4 heures du matin. En sus, il y a un véhicule qui venait tous les soirs la chercher. Le sieur Lô a renseigné avoir remarqué l’absence de la dame, car il était au courant des moindres faits et gestes de cette dernière. Et ayant senti une odeur nauséabonde provenant de la chambre de celle-ci, il a avisé le délégué de quartier. Qui a défoncé la porte à son arrivée. Là, ils ont fait la découverte macabre. Témoin oculaire, Ibrahima Loum a indiqué que dans la nuit du 5 au 6 janvier, il a aperçu Coumba Diop et un homme descendre du taxi. Ils ont été ensuite rejoints dans la chambre par le chauffeur qu’il a bien identifié. A l’en croire, ils sont restés enfermés jusqu’au moment où ils quittaient les lieux vers 2 heures du matin. Toutefois, il a signalé n’avoir pas entendu de cris.
De la vengeance ?
Les investigations menées ont permis de mettre la main sur Ousmane Konté qui déposait régulièrement la victime. Entendu, il a affirmé qu’il était son chauffeur attitré et qu’il l’avait transportée pour la dernière fois, le 1er janvier, alors qu’il l’avait prise devant la porte du bar ‘’Les Tropiques’’, vers 2 heures du matin. Puis, son véhicule est tombé en panne pendant une semaine. A la suite de telles déclarations, les enquêteurs ont fait des réquisitions téléphoniques qui ont relevé que Konté était souvent en contact avec la belle de nuit et ce, jusqu’au 5 janvier. Une date coïncidant avec celle où les habitants de cette maison ont vu Coumba Diop pour la dernière fois. Mieux, le téléphone de la victime a été retrouvé avec une autre personne. Qui a déclaré que c’est Ousmane Konté qui le lui a vendu.
Mis au-devant de ces faits, il a radicalement changé de version en soutenant que la prostituée était accompagnée, lors de cette fameuse nuit, d’un homme élancé, de teint clair, habillé d’un tee-shirt jaune et d’un pantalon super 100. Une fois à destination, ils sont entrés tous les trois dans la chambre de la dame. Aussitôt, narre-il, Cheikh Niang a violé Coumba Diop. Après, il s’est rué vers la dame en brandissant un couteau. De peur d’être poignardé, il a pris la poudre d’escampette.
Le 13 janvier, les enquêteurs ont reçu la visite d’une prostituée sous le couvert de l’anonymat, car elle ‘’ne pouvait pas continuer de vivre avec un lourd secret’’. L’informatrice leur a révélé que Cheikh Niang lui a confié qu’il n’osait plus se rendre aux Parcelles Assainies, à la suite d’un meurtre qu’il y a commis.
Arrêté un mois plus tard ‘’Chez Mouna’’, lors d’une soirée dansante, le marchand ambulant a reconnu être l’auteur de ce crime, tout en niant l’avoir violée. Selon le parquet, l’inculpé a expliqué avoir connu Coumba Diop 7 mois auparavant, dans le cadre de son métier. Depuis, il faisait partie de ses fidèles clients. Cependant, raconte-il, un jour, la dame a commandité une agression contre lui. Il a été lynché et son téléphone portable emporté. Du coup, il a voulu laver cet affront. C’est ainsi qu’il l’a rencontrée fortuitement à Ngor, avant de l’inviter au bar ‘’Chez Willy’’. Ayant toujours nourri le dessein de se venger, il a sorti des billets de banque qu’il manipulait pour l’appâter. Sur ce, la belle de nuit est tombée dans le piège, en acceptant de le recevoir dans sa chambre.
Les inculpés nient les faits
Mais face au juge de la Chambre criminelle, les prévenus ont fait des déclarations systématiques pour obtenir l’acquittement. ‘’Je ne connais pas Cheikh Niang. Les déclarations tenues au cours de l’enquête m’ont été extorquées sous la torture’’, a soutenu le chauffeur. Son coïnculpé a soutenu qu’il ne peut même pas reconnaître la victime. ‘’De ma vie, je n’ai jamais tué une personne’’, a-t-il juré. Pour le Substitut du procureur, le chauffeur est une ‘’personne de mauvaise foi’’. Ainsi, il a demandé à ce que le délit de vol commis la nuit avec usage de violences et non-dénonciation d’un crime retenu à son encontre soit requalifié en complicité d’assassinat. En définitive, la parquetière a requis les travaux forcés à perpétuité contre les inculpés.
Avocat de la défense, Me Boubacar Dramé a souligné qu’il n’y a aucun élément de preuves qui permet à la juridiction de retenir la culpabilité de Cheikh Niang, rappelant ainsi que le procès-verbal d’enquête ne sert qu’à titre de simples renseignements. ‘’Ce dossier est une coquille vide, en ce qui concerne mon client. Il faut rendre justice à Cheikh Niang, en l’acquittant’’, a plaidé Me Dramé. La même demande a été formulée par son confrère, Me Adnan Yahya. D’après lui, Ousmane Konté n’était pas dans la chambre au moment des faits. C’est le 4 juillet prochain que les prévenus vont être édifiés sur leur sort.