Les acteurs de la recherche biomédicale doivent, pour résoudre des problèmes majeurs, combler le gap qui existe entre la recherche biomédicale et les réalités socio-culturelles africaines, a déclaré lundi à Dakar le professeur Cheikh Ibrahima Niang, socio-anthropologue à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Il a expliqué que « la recherche biomédicale et les réalités socio-culturelles sont deux mondes parallèles en Afrique qui empêchent de résoudre des problèmes majeurs ».
Au cours d’une table ronde sur "surveillance, préparation et renseignement face aux maladies en Afrique", il a indiqué que « pour casser cette barrière entre recherche biomédicale et réalités socio-culturelles africaines, il faut interpeller les dynamiques sociales, culturelles et politiques en cours ».
Il faut également, a-t-il ajouté, « une construction et une fabrique africaine de la recherche biomédicale axée sur une technologie tenant compte des réalités des populations ».
La table ronde se tient dans le cadre d'un symposium scientifique précédant l'inauguration de l’Institut de recherche en santé, de surveillance épidémiologique et de formation (IRESSEF).
Cet institut dirigé par le professeur Souleymane Mboup, se fixe pour objectif de proposer des solutions au secteur de la recherche et de la formation en santé en Afrique.
Malgré de réels progrès réalisés ces dernières années dans le domaine de la santé publique, la recherche en santé en Afrique subsaharienne est toujours confrontée à des défis majeurs, indique-t-on.
Cette situation est due à la croissance et aux mouvements rapides des populations (280 millions en 1960 et 1,2 milliard en 2016) et la forte émergence et réémergence de pathogènes susceptibles d’engendrer des pandémies. D’ici 2050, le nombre annuel de décès dues aux maladies infectieuses endémiques, y compris la résistance aux antimicrobiens, pourrait atteindre 4 millions.
L’illustration parfaite de cet état de fait est la récente épidémie de la maladie à virus Ebola qui a, par ailleurs, eu des conséquences sanitaires et économiques dramatiques au niveau des pays touchés et la sous-région ouest africaine.
Selon le professeur Niang, « le système sanitaire africain a du mal à détecter ce qui est déjà détecté chez les populations. C'est pourquoi, a-t-il suggéré, ce système sanitaire doit avoir « une capacité de connexion et de communication avec les savoirs et cultures locaux. Pour ce faire, nous devons travailler au changement de comportement des populations qui, traitées avec dignité, peuvent répondre aux défis de la recherche ».
Selon les initiateurs de l'IRESSEF l'incidence des maladies non transmissibles, les taux de mortalité maternelle, les pathologies dues aux toxines environnementales, demeurent élevés en Afrique. En plus de ces préoccupations, les pays africains font face à un certain nombre de défis qui entravent le système de santé, notamment : l’insuffisance des ressources allouées à la santé, l’absence de coordination des laboratoires en réseaux pour une meilleure intervention ainsi que le manque de compétences manifeste dans certains domaines de la recherche.
Pour eux, il reste important pour l’Afrique, afin d’être mieux préparée à protéger sa population contre les maladies, de travailler en réseau et d’utiliser de façon plus efficace ses ressources en santé publique dans les régions.
L'objectif de l’IRESSEF est de devenir une institution de recherche en santé moderne de haute renommée avec des interventions au Sénégal, en Afrique et à travers le monde.
Pour atteindre ces objectifs, il compte développer des laboratoires de pointe, renforcer les sites sentinelles de surveillance et la formation pour une riposte rapide et une prise en charge optimale.