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L’indigénisation du secteur pétrolier - L’exemplarité du Ghana : levier de développement économique du Sénégal
Publié le mercredi 14 juin 2017  |  Le soleil
Usine
© Autre presse par DR
Usine de traitement de pétrole




Dans le cadre de sa récente tournée sous-régionale, Son Excellence le président de la République du Ghana, M. Nana Akufo-Addo, élu en 2016 au premier tour des élections présidentielles (avec un suffrage de 53 %), a effectué une visite de travail et d’amitié du 15 au 17 mai au Sénégal. Lors de la conférence de presse du 16 mais 2017 au Palais de la République, les présidents Sall et Akufo-Addo ont fait part de leurs décisions d’accroître la coopération bilatérale entre leurs pays respectifs, mais aussi du partage d’expérience du Ghana sur les gestions des ressources naturelles, telles que le pétrole et le gaz. Cette décision du président Macky Sall est à saluer. En effet, le Ghana, récent producteur d’hydrocarbures, a, dans son Code pétrolier, élaboré des cadres juridiques qui serviront d’apport considérable dans son économie nationale.

A travers notre modeste contribution, nous montrerons que cette décision du président Macky Sall de vouloir un partage de savoir-faire ghanéen sur la gestion de ses ressources naturelles n’est pas fortuite, mais bel et bien fondée, et relève d’une vision d’accroître la part de participation locale dans la chaine de valeur pétrolière au Sénégal. Notre analyse portera, en premier lieu, sur une brève comparaison géographique et démographique entre le Ghana et le Sénégal, ensuite nous définirons le concept d’indigénisation d’un secteur, et plus spécifiquement au niveau du secteur des hydrocarbures, ainsi que son impact sur l’économie locale. En troisième lieu, nous analyserons deux cas pratiques d’indigénisation du secteur pétrolier ghanéen à travers le programme appelé « Local content » ou « Contenu local », et montrerons finalement que l’indigénisation d’un secteur n’est pas un signe de fermeture sur soi-même, mais un facteur d’attraction d’Investissements directs étrangers (Ide).

Le Ghana, pays d’environ 28 millions d’habitants (14,5 millions pour le Sénégal), a une superficie de 238.533 km² (196.722 km² pour le Sénégal) et un taux de croissance de 2,42 % par an (2,16 % pour le Sénégal). Sur le plan économique, le Ghana a un Produit intérieur brut (Pib) estimé 22,238 milliards de FCfa (8,200 milliards pour le Sénégal). L’économie ghanéenne repose sur les produits agricoles comme le cacao (deuxième producteur mondial), le café, mais aussi miniers, tels que l’or (dans la région d’Ashanti, Takoradi, etc.), et plus récemment le pétrole. Au niveau du classement des activités portuaires, le Port de Téma traite, chaque année, environs 820.000 conteneurs, contre 400.000 pour le Port de Dakar. Néanmoins, il est à préciser que le Port de Téma sert aussi aux pays voisins du Ghana dont le Nigeria (utilisation due aux difficultés du Port de Lagos), le Burkina Faso et autres Etats enclavés limitrophes.
L’indigénisation est un concept par lequel on rend « indigène » ou on accroît la présence ou la représentation locale dans un certain secteur. Dans le cas d’indigénisation du secteur pétrolier, on accroît la présence locale dans le secteur pétrolier. Ce concept est important dans le sens où on encourage les locaux qui n’ont pas les capitaux pour investir ou la compétence intellectuelle de prendre leurs parts dans cette activité.

Il est à noter que l’indigénisation est un concept graduel, car la présence étrangère est et sera toujours nécessaire à cause du phénomène de la mondialisation. En effet, cette présence étrangère n’apporte pas juste des capitaux mais aussi des compétences intellectuelles. Le transfert de compétences intellectuelles est donc primordial. Ce procédé d’indigénisation accroîtra alors la présence de locaux dans la chaîne de valeur pétrolière, permettra, sur un autre registre, la création d’entreprises appartenant à des Sénégalais(es) et une valeur ajoutée dans l’économie locale.

Une récente étude, menée par le bureau d’études américain Ihs Markit pour le compte du département d’Energie (l’équivalent du ministère de l’Energie), illustre l’importance de la chaine de valeur des hydrocarbures et son impact : « Les avantages économiques de l’activité pétrolière et gazière dans une vaste chaîne d’approvisionnement dépassent de loin les avantages pour l’industrie elle-même. Chaque nouvel emploi de production crée trois emplois dans la chaîne d’approvisionnement et six autres emplois dans l’économie en général. Les contributions au produit intérieur brut (Pib) se multiplient aussi : chaque dollar de Pib créé dans le secteur du pétrole et du gaz génère deux dollars dans la chaîne d’approvisionnement ». A travers ces propos, nous voyons l’impact exponentiel que peut avoir l’activité pétrolière dans une économie. Il est donc recommandé que le Sénégal ouvre l’exploration de ses champs pétroliers au plus grand nombre de candidats ayant la capacité technique et financière.

En 2007, une certaine compagnie dénommée Kosmos Energy (à l’époque dirigée par le légendaire Jim Musselman et dont le film-documentaire, « Big Men », produit par l’acteur Brad Pitt, fait le récit de son aventure ghanéen) fit la découverte d’un important gisement pétrolier d’une réserve estimée entre 1,8 et 2 milliards de barils qui sera nommée le champ Jubilee et dont la production journalière actuelle est entre 100-150.000 barils jours. Quelques années plus tard, en 2013, l’Assemblée nationale ghanéenne a voté la loi L.I 2204, intitulée « Petroleum regulations 2013 (Local content and Local participation) ». C’est une série de mesures ayant pour but d’accroître la présence de Ghanéens ou les entreprises ghanéennes (dans lequel un capital minimal devrait appartenir à une personne de nationalité ghanéenne), dans les secteurs des hydrocarbures.

Cette présence peut être faite à travers des entreprises de prestations de services telles que :
• Prestations intellectuelles : Bureau d’études ;
• Entreprise de fabrication et de production ;
• Entreprise d’approvisionnement, transport, logistique ;
• Entreprise à vocation Qhse.

Il est important de préciser qu’une chaîne de valeur pétrolière est généralement divisée en trois groupes :
En amont : au niveau des champs pétroliers (offshore ou onshore) où on cherche l’existence de la matière. Et si on en trouve, on l’extrait (donc on produit).
En midstream : à ce niveau, on transporte (à travers des tankers, des barges, des pipes, etc.) la matière première trouvée en amont vers des points de transformation (raffinerie) ou de stockage.

En aval : ici, la matière première a été transformée et est prête à être distribuée à la masse (à travers les stations d’essence par exemple).
L’indigénisation du secteur pétrolier ghanéen affecte toute la chaîne de valeurs ou les trois secteurs qui ont été énumérés plus haut. Nous précisons que le travail en amont étant une phase stratégique qui requiert des moyens (techniques et financiers) conséquents, la présence locale est souvent difficile à garantir. Néanmoins, toutes activités connexes aux activités en amont peuvent voir la présence de locaux.

La loi LI 2204, Petroleum regulations 2013 (Local content and Local participation) a pour objet :
(a) Promouvoir la maximisation de la valeur ajoutée et la création d’emplois grâce à l’utilisation de l’expertise, des biens et des services locaux, les entreprises et le financement dans la chaine de valeur de l’industrie pétrolière et leur rétention dans le pays ;

(b) Développer les capacités locales dans la chaine de valeur de l’industrie pétrolière par l’éducation, le transfert de compétences et le développement d’expertise, le transfert de technologie et de savoir-faire et dans les programmes de recherche et de développement ;

(c) Atteindre le niveau minimum d’emploi local et, dans le pays, dépenser pour la fourniture des biens et des services dans la chaîne de valeur de l’industrie pétrolière comme spécifiée dans la première annexe ;

(d) Accroître la capacité et la compétitivité internationale des entreprise domestiques ».

Un premier exemple de la loi LI2204 stipule que toute entreprise étrangère actif dans les prestations de tous services dans le secteur pétrolier (envers un tiers, ou envers un détenteur d’un bloc pétrolier, ou envers la Société nationale des pétroles) devra créer une entreprise joint-venture avec une société indigène et attribuer au moins 10 % des parts sociales de la société de joint-venture à l’entreprise indigène :

• Interest of a citizen in petroleum operations
(6) A non-indigenous Ghanaian company which intends to provide goods or services to a contractor, a subcontractor, licensee, the Corporation or other allied entity within the country shall incorporate a joint venture company with an indigenous Ghanaian company and afford that indigenous Ghanaian company an equity participation of at least ten percent.

Un deuxième exemple de la loi LI2204 stipule le transfert de compétences techniques et de technologies aux entreprises indigènes ; toute société qui facilitera le transfert de technologies (preuves à l’appui) pourrait être éligible à des avantages fiscaux dont les modalités seront définies par les autorités gouvernementales compétentes :

• Support for technology transfer to indigenous Ghanaian companies
25. (1) A contractor, subcontractor, licensee or other allied entity shall support and facilitate technology transfer as regards the formation of joint ventures, partnering of licensing agreements between indigenous Ghanaian companies or citizens and foreign contractors and service companies or supply companies.
(2) The Minister shall consult with relevant Government agencies to propose fiscal incentives to assist:’
(a) foreign companies which aim to develop technological capacity and skills of citizens; and
(b) Indigenous Ghanaian companies which establish factories and production units in the country.
(3) For the purposes of sub regulation (2), the Government agencies consulted shall collaborate with the Commission.
(4) The Commission shall propose the criteria for obtaining the fiscal incentives
Il est à noter que la Société sénégalaise des pétroles (Petrosen) a, dans son modèle de contrat type de partage de production, en ses articles 19 du Titre IV, des clauses d’indigénisation, telles que le transfert de compétences techniques et la promotion de l’emploi local.

D’après la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced), l’investissement direct étranger (Ide) en 2014 a été de 201,8 milliards de FCfa, mais que les points atténuant les investissements direct étrangers étaient, entre autres, la pauvreté et la faible diversité des activités.

La compétence sénégalaise est connue et reconnue, toutefois, sa difficulté à avoir des fonds de fonctionnement et d’investissement l’est aussi. L’indigénisation du secteur pétrolier accroîtra l’activité économique locale, augmentera le pouvoir d’achat mais aussi et surtout le pouvoir d’investissement local. Ce dernier donnera suite à une pluralité d’opportunités au Sénégal qui augmentera évidemment les investissements direct étrangers.

En conclusion, le chef de l’Etat a la volonté de vouloir rendre le secteur d’hydrocarbures sénégalais le plus inclusif possible. Il est important de comprendre que des dispositions d’indigénisation sont en cours d’élaboration. Une délégation sénégalaise est attendue à Accra afin d’avoir un meilleur aperçu sur les dispositions ghanéennes devant permettre de définir un cadre adapté au Sénégal et qui lui est propre.

Par Mamadou Oumar SY, Ing.
Président du Mouvement Diappo Plateau
Membre du CCR Sénégal
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