La Direction de la surveillance et du contrôle de l’occupation du sol (Dscos) a effectué, le mercredi 31 mai, une descente au village de Daral Peul, pour sommer les populations d’arrêter les travaux de construction de leurs parcelles. En assemblée générale ce samedi, la coopérative des Ong de Thiès évoluant dans l’habitat a réclamé l’arbitrage du Président Sall et soutient que la Dscos ‘’agit en faveur de l’Armée’’ qui veut construire sur le site des logements pour les militaires.
C’est un litige foncier qui ne date pas d’aujourd’hui. Car cette crise qui sévit entre la coopérative des Ong de Thiès et l’Armée date de près d’une décennie. Et elle a pris une nouvelle tournure, le 31 mai dernier, lorsque les agents de la Dscos se sont rendus sur place pour sommer les propriétaires des parcelles d’arrêter les constructions déjà entamées. Ces derniers, qui ont mis sur pied une coopérative d’habitat, accusent la Dscos de vouloir octroyer les 351 parcelles à l’Armée sénégalaise. D’après le président de la coopérative des Ong de la région de Thiès, le reliquat du domaine militaire devra permettre à la Comico de construire sur 100 ha au Sud de l’École polytechnique de Thiès (Ept). ‘’Les éléments de la Dscos ont fait une descente musclée sur notre site, à la fin du mois de mai, pour nous demander d’arrêter les constructions. Elle veut octroyer nos parcelles à l’Armée pour la construction de logements pour les militaires de la base de Thiès et deux bataillons’’, dénonce Mamadou Mangassouba.
Le président de la coopérative des Ong de la région de Thiès invite donc tout le monde à se serrer les coudes. ‘’Nous devons nous réunir pour défendre par tous les moyens légitimes et légaux l’inviolabilité de nos parcelles acquises après des années de dur labeur’’, lance-t-il. Avant d’inviter le président de la République à parler à l’Armée pour mettre un terme à cette situation. ‘’Nous lançons un appel à Monsieur le président de la République Macky Sall, pour qu’il intime l’ordre à l’Armée nationale en général, au Commandant de la zone N°7 à Thiès et à la Brigade de la Gendarmerie de Nguinth en particulier, d’arrêter le harcèlement et l’intimidation exercés sur les coopérateurs et leurs ouvriers’’, a lancé Mamadou Mangassouba devant ses pairs. Dans ce sens, lui et ses collègues invitent le gouverneur de la région de Thiès (Ndlr : Amadou Sy), représentant l’Etat et président du Groupe opérationnel, seule entité habilitée à démolir dans la région, à mettre en œuvre les décisions arrêtées par le Chef d’Etat-major des Armées par courrier n°0087/EMG/DE/CLT-T, du 25 mars 2008, adressé à son prédécesseur.
Celui-ci disait que ‘’Les Ong conservent leur lotissement situé au Sud-Ouest de l’Ept (...)’’, rappelle-t-il. Avant de préciser que c’est en 2006 que les Ong de la région de Thiès ont acquis la superficie de 24 ha à Daral Peul, suite à une délibération de la communauté rurale de Keur Moussa. ‘’C’est en 1998 que des agents, membres de différentes Ong évoluant dans la région de Thiès et ses environs, ont eu l’idée de mettre sur pied une coopérative pour l’acquisition de terrains à usage d’habitations. Cela a abouti, suite à une délibération de la communauté rurale de Keur Moussa. La délibération fut consolidée par l’arrêté n°010/05/DRUH/TH du 12 juin 2006 de monsieur le gouverneur approuvant le lotissement du site pour 531 parcelles. Dès lors, des membres de la coopérative ont opté pour la construction de leurs logements. Un certain nombre de ces habitations sont achevées et habitées’’, renseigne Mamadou Mangassouba.
Ces Ong, après acquisition des parcelles, ont procédé à l’installation d’un réseau électrique et d’un réseau d’adduction d’eau, sur une longueur de 6 km. Mais, accuse M. Mangassouba, des éléments de l’Armée sont passés pour ‘’détruire des constructions, des fondations, des poteaux électriques, des lampadaires, des bornes et tout ce qui pouvait l’être, sans sommation ni saisine de notre organisation’’. Au mois de mars 2016, poursuit Mamadou Mangassouba, l’Armée s’est signalée à nouveau et de ‘’la même manière’’.
Hélène Tine : ‘’Les Américains veulent y ériger un centre’’
Venue prêter main forte à la coopérative d’habitat des Ong de Thiès, le député Hélène Tine indique que ce sont des citoyens sénégalais qui occupent cette ‘’assiette foncière sur la base de dispositions légales’’. ‘’Ils sont en train de construire et, aujourd’hui, on vient leur donner des sommations de déguerpissement. Cela est inacceptable dans un État de droit. Au moment où le président de la République et le gouvernement du Sénégal ont annoncé des mesures saluées par tous, pour régulariser tous les titres précaires et révocables pour les transformer en titre foncier à travers le Sénégal, on vient intimider de paisibles citoyens qui ont rempli toutes les conditions de droit pour occuper cette assiette foncière de près de 25 ha’’, lance la parlementaire.
S’il y a des accords qui ont été signés avec d’autres forces militaires d’autres pays, prévient Hélène Tine, il ne faut pas que ces derniers soient en ‘’défaveur’’ des populations. ‘’Et c’est cela le fond du problème aujourd’hui, parce que j’ai mené une petite enquête. Et elle a révélé que ce sont les Américains qui veulent construire un centre sur ce site. Pour vous dire que les choses ne sont pas claires. S’il y a aussi des tentatives de donner une assiette foncière à la Comico, il faut qu’on sache qu’on ne saurait déshabiller Paul pour habiller Pierre, parce que ça y ressemble fort bien’’, précise Hélène Tine.
Elle est d’avis que le gouverneur de la région de Thiès et le préfet du département, le commandant de la zone militaire N°7, doivent agir pour mettre fin à cette crise, car ils sont ‘’concernés par ces conflits fonciers’’. ‘’Nous interpellons aussi le président de la République qui a eu à cosigner le décret 2006-84 en tant que Premier ministre du Sénégal, qui a été signé par le président de la République Me Abdoulaye Wade, pour lui dire que sa signature d’hier est la même qu’aujourd’hui et que nous ne saurions accepter un recul dans ce domaine-là. Il ne peut pas mettre en œuvre des programmes en faveur de l’habitat social et trouver d’honnêtes citoyens qui ont acquis leurs maisons dignement et à la sueur de leur front pour qu’on leur demande de quitter’’, rappelle Hélène Tine, invitant les uns et les autres à se lever comme ‘’un seul homme pour arrêter ces dérives-là’’.