Après avoir dénoncé un détournement de 30 millions de F CFA par mois à l’Assemblée nationale, Me El Hadj promet de révéler d’autres magouilles en cours au sein de l’institution dirigée par Moustapha Niasse. Mais en attendant, le ‘’député du peuple’’ semble accorder plus d’importance au déploiement de sa coalition sur le terrain politique en perspective des prochaines joutes électorales. D’ores et déjà, le leader de la coalition ‘’Leeral’’ appelle les Sénégalais à prendre la conscience politique de comprendre qui se bat pour lui et qui prend en charge ses revendications.
En procédant hier au lancement de votre coalition, vous avez porté des accusations gravissimes sur un détournement de 30 millions par mois. Pouvez-vous nous dire sur quoi vous vous fondez ?
Je n’accepterai pas que la presse me détourne de l’essentiel. C’était un détail sur le bilan de l’Assemblée. Il y a d’autres magouilles que je vais sortir au fur et à mesure et d’autres dysfonctionnements. Je ne vais pas m’attarder sur cela donc. Il y a d’autres faits qui m’intéressent, contrairement à ce qui intéresse la presse qui insiste sur des détails et faits divers. Moi, c’est ma coalition qui m’intéresse, l’appel que je lance au peuple, le fait qu’il se familiarise avec ma coalition ‘’Leeral’’. Ce ne sont pas des accusations ou des faits divers qui m’intéressent. C’est juste quelques éléments que j’ai donnés, en passant.
D’aucuns pensent que vous accusez Moustapha Niasse ?
Non, ne me parlez pas de Niasse. Je ne parle de personne. Je dis qu’il y a des dysfonctionnements, des surfacturations, des détournements. Ce n’est pas ce qui intéresse notre coalition, c’est en passant juste que j’ai abordé des choses anormales pour dénoncer le fonctionnement de l’institution parlementaire. Mais ce n’est pas l’heure de s’appesantir sur ces détails. L’heure est à la présentation de ma coalition, que les Sénégalais l’intériorisent au lieu de s’attarder sur des accusations. La preuve, vous me parlez de Niasse et on croit que ce sont des accusations contre sa personne. Niasse ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, c’est plutôt la compréhension que le peuple va avoir de notre coalition. Nous sommes aujourd’hui la coalition la plus crédible, parce que dirigée par le seul député dit ‘’député du peuple’’.
Globalement quel est le bilan que vous faites de la législature sortante et vous, en tant que coalition, qu’est-ce que, aujourd’hui, vous proposez en termes de programme et d’orientation ?
D’abord, un député n’a pas de programme. J’ai suivi des coalitions dire que nous allons faire ceci ou cela. Un député ne peut rien faire. Ça, c’est mentir au peuple. Un député récupère les préoccupations, les questions que se pose le peuple, pour les mettre sur la table. Il n’a pas les solutions. Il interpelle le gouvernement qui peut satisfaire les besoins de la population, comme il peut ne pas le faire. Le député porte à la connaissance du gouvernement les problèmes des populations. Il n’a pas de budget pour réaliser des routes ou des forages encore moins des dispensaires. S’il le dit, il ment. Il recense les problèmes des populations pour leur trouver des solutions auprès du gouvernement. Ce que nous faisons tous les jours, c’est-à-dire nous battre pour le peuple sénégalais.
Vous êtes une coalition électorale, vous avez sûrement des orientations, des propositions à faire au peuple sénégalais pour l’amélioration du bien-être du Sénégalais.
Non, on n’a pas de proposition. La seule qui vaille, c’est nous élire massivement en envoyant notre coalition à l’Assemblée, que la coalition ‘’Leeral’’ soit majoritaire pour prendre en charge toutes les questions que se pose le peuple. Les députés du Président ne vont pas l’attaquer ou interpeller le gouvernement et ceux de l’opposition ne verront jamais les bienfaits du gouvernement. Ils vont s’opposer systématiquement et ça va être la cacophonie. Nous, nous avons une ligne de conduite, celle de la voie du peuple. Donc, si le gouvernement apporte de bonnes choses, on est d’accord et s’il apporte de mauvaises choses, on rejette. Si l’opposition conteste normalement en ayant raison, on soutient et si elle rejette parce que c’est l’opposition, sans raison, sans fondement, on la combat à ce moment.
Abdoul Mbaye estime que ce serait une erreur de reconduire cette législature qui n’a voté aucune proposition de loi, sauf celle sur son règlement intérieur, qui n’a mis en place aucune commission d’enquête. Qu’en pensez-vous ?
Ce qu’Abdoul Mbaye a dit ne m’intéresse pas. Je ne commente pas les propos d’un candidat. Je ne vais pas perdre mon temps à répéter ce que j’ai moi-même dit avant lui. J’ai dit que c’est la législature la plus nulle de l’histoire parlementaire de notre pays. Je n’ai pas attendu Abdoul Mbaye pour en parler. Il ne faut pas venir nous dévaluer ; on n’a pas ce complexe-là. Abdoul Mbaye ou un autre, ce n’est pas notre problème. Moi, j’ai dénoncé le fonctionnement de l’Assemblée avant lui. La preuve, vous dites que j’en veux à Moustapha Niasse tout le temps.
C’est moi seul qui dénonce et finalement les gens pensent que c’est une opposition entre El Hadj Diouf et Moustapha Niasse. Où était Abdoul Mbaye à l’époque ? C’est maintenant que les gens parlent d’une Assemblée nulle qui ne fait pas de propositions de loi. Reconnaissez le travail que j’ai fait, ce que j’ai donné tous les jours. Personne ne reconnaît la valeur du député de ‘’Leeral’’. C’est triste. La presse est l’historienne du présent, mais celui-ci est ignoré par les journalistes au Sénégal. Elle aurait pu se dire : mais, El Hadj Diouf, quel est son problème ? Il n’est pas du PDS, mais se bat jusqu’à être insulté par la dame de l’Apr copieusement. Et quand on m’insulte, on dit qu’à l’Assemblée, les députés ne font que se quereller comme des femmes. C’est malhonnête. Alors que je me bats pour des principes, les femmes m’insultent. Je me suis battu pendant un an pour qu’on restitue à Aïda Mbodj son groupe parlementaire. On a arboré des brassards rouges, on a usé de sifflet pour perturber les plénières à l’Assemblée (il cherche le sifflet dans ses bagages, le sort et siffle). Dans ce pays, je constate que les gens sont méchants de reconnaître l’engagement militant démocratique d’un député qui se bat et qui est agressé. J’ai été agressé par Famara Senghor, lors de la précédente législature, et personne ne le remet sur la table. Après le 23 juin, on m’en a voulu et on m’a agressé. Parce que je dirigeais le 23 juin, ici à l’Assemblée et personne ne veut en parler pour ne pas valoriser le député du peuple. Dans ce pays, la presse est souvent inféodée à un groupe, à des lobbies pour ne pas valoriser un député qui ne contrôle pas ces télés, ces radios et ces journaux. On préfère valoriser des gens qui n’ont rien prouvé. Mais ceux qui se sont distingués dans le combat pour la démocratie comme le leader de ‘’Leeral’’, personne ne va faire leur portrait.
Mais Me, on a fait votre portrait !
Mais c’était pour saboter, pour dire Me ‘’Buzz’’. Est-ce que le 23 juin, c’était pour un buzz ? Vous n’avez même pas parlé du 23 juin dans ce portrait. Au lieu de parler de la deuxième indépendance du Sénégal, le 23 juin 2011, vous parlez de Me ‘’Buzz’’. Le député qui était à l’hémicycle contre son propre groupe parlementaire dirigé par Doudou Wade, c’était El Hadj Diouf. Est-ce que ça, ce n’est pas du mérite ? Pourtant, le 23 juin, regardez Me El Hadj Diouf, c’est un véritable député du peuple.
Où en êtes-vous avec les investitures au niveau de votre coalition ?
On a déjà installé la grande coalition ‘’Leeral’’ qui revient. Je rappelle qu’elle était là en 2012. Malheureusement, les gens ici n’ont pas de mémoire. La coalition ‘’Leeral’’, moi, en tout cas, après avoir participé à l’élection du Président Macky Sall dans la coalition Benno bokk yaakaar, immédiatement, j’ai dit : bien que membre de BBY, j’irai seul aux Législatives avec ma coalition. Alors que tout le monde était avec Macky Sall pour avoir des députés. Il y avait le Ps, l’Afp, le Rewmi, le Pit, la Ld et d’autres partis. C’était plus facile. Mais j’ai choisi la voie la plus difficile. C’est la voie de l’indépendance et de la liberté au niveau de l’Assemblée. C’est dur de payer sa caution, 20 millions en 2012, de financer sa campagne pour près de 200 millions que j’ai puisé dans mes réserves d’avocat pendant une trentaine d’années d’exercice. Cela pour dire simplement que l’Assemblée ne me permet pas de gagner de l’argent. Au contraire, j’y perds de l’argent.
Mais qu’est-ce que vous y gagnez donc ?
Défendre mon peuple ! Pour ça, il n’y a pas de prix. Même 1 000 milliards ne peuvent pas payer cela. Le peuple auquel j’appartiens mérite tous les sacrifices. Il mérite ma vie. J’ai même donné ma vie pour mon pays. C’est pourquoi je fais ces sacrifices. Je suis avocat. Donc, un homme libre. On ne peut pas m’affecter ou me sanctionner pour mes positions partisanes. Ma fonction d’avocat, je la mets au service de mon peuple. Il n’est pas donné à tout le monde d’être indépendant, d’être libre et de dire ce qu’il pense. Un avocat est un homme politique par excellence.
Revenons-en aux investitures au sein de votre coalition. Comment se déroulent-elles ?
Tout s’est bien passé à ce niveau. Nous nous sommes bien entendus. Il y a le parti de Moussa Cissokho, le Front patriotique républicain (Fpr) dirigé à l’époque par feu Ben Yacine Diouf. Moussa Cissokho, c’est le président du Collectif des cadres casamançais. Il sera notre tête de liste départementale à Ziguinchor pour battre Abdoulaye Baldé. Nous avons également dans notre coalition le ministre Mamadou Makalou qui est avocat au barreau de Paris, qui a un parti politique et qui nous a rejoint. Il y a le Parti pour l’avenir et la solidarité de feu Cheikh Djibril Mbaye qui était là avec nous en 2012. Son parti est actuellement dirigé par Laurent Albert Mendy. Il y a également le mouvement du colonel de gendarmerie, Cheikh Sadibou Niang et aussi le Réseau des femmes Lébous pour le développement durable qui, à lui seul, compte près de 12 000 membres composés de femmes dévouées qui travaillent dans le monde des affaires. Bref, presque tous les partis qui étaient avec nous en 2012 sont là, sauf un.
Lequel ?
Ça n’a aucune importance.
Vous avez lancé votre coalition au moment où certains pensaient que vous alliez aux Législatives soit avec Manko, soit avec Aïssata. Qu’est-ce qui explique ce faux bond ?
Je n’ai fait faux bond à personne. C’est mal me connaître que de nous prévoir dans une autre coalition. Nous sommes libres. Nous sommes une coalition de députés libres. Nous avons, après avoir élu Macky Sall en 2012, monté notre coalition ‘’Leeral’’ pour aller seuls aux Législatives. Pourquoi changer de stratégie en 2017 ?
Avez-vous été approché par ces coalitions ?
J’ai été approché par tout le monde. Parce que tout le monde connaît la valeur du député El Hadj Diouf, le député du peuple. Il y a 150 députés et un seul d’entre eux est désigné aussi bien avant et après le 23 juin, par rapport à tout ce qu’il a fait à l’Assemblée pendant dix ans. Dans un mois, je boucle dix ans de présence dans l’hémicycle.
Dans ce contexte électoral, on assiste à la naissance de plusieurs coalitions. Déjà, il y en a 4 du côté de l’opposition. Pensez-vous avoir les chances de sortir victorieux de ces joutes ?
Ah oui ! Déjà en 2012, Macky Sall venait d’être élu. Il avait une période de grâce. Les soi-disant grands partis, qui ne le sont plus d’ailleurs, n’avaient pas osé y aller seul, sachant que le peuple, dans sa logique, après avoir élu un président, lui donne une majorité confortable à l’Assemblée nationale. C’est automatique dans tous les pays du monde. C’est pourquoi d’ailleurs quand les présidents s’installent au pouvoir, ils procèdent automatiquement à la dissolution des assemblées pour avoir une nouvelle majorité parlementaire. Nous avions osé y aller seul dans ce contexte. Aujourd’hui qu’il n’y a plus cet état de grâce du Président Macky Sall, aujourd’hui que tout le monde s’active et que tout le monde n’a rien trouvé, maintenant que tout le monde reconnaît le travail accompli par le député de ‘’Leeral’’, pourquoi renoncer à se présenter seul ? Qu’est-ce que j’ai fait ? Quel est mon bilan ? Qui interpelle le gouvernement ? Qui pose les vrais problèmes à l’Assemblée ? En tant que membre de BBY, jusqu’à présent, on pense que je suis de l’opposition. Les gens pensent même que je devais aller avec ‘’Manko Taxawu Senegaal’’, parce que ‘’man maay taxawu Sénégal’’ (c’est moi qui défends le Sénégal).
De tout le temps, c’est moi qui défends le Sénégal, qui combats l’injustice sous toutes ses formes. Qui a combattu le vol du groupe parlementaire du PDS qui a été confisqué par Modou Diagne Fada ? C’est El Hadj Diouf et je ne suis pas membre du groupe parlementaire libéral. Je me suis battu jusqu’à obtenir satisfaction un an après pour que Aïda Mbodj récupère son groupe parlementaire. C’est cela le rôle du député. Qui est en train de se battre aujourd’hui pour qu’on libère Khalifa Sall qui a été injustement arrêté avec de fausses accusations ? C’est encore le député du peuple. Pourtant, je suis plus proche de Macky Sall. C’est mon ami. Je n’ai jamais bénéficié d’un quelconque soutien de Khalifa Sall. Aucun membre de ma famille n’a jamais bénéficié de ses largesses. Je ne connais même pas sa maison, alors que sur invitation du Président, je vais souvent dîner ou déjeuner au palais avec lui et Marième.
J’ai des relations particulières avec le Président. Mais dès lors qu’il y a injustice, j’oublie le Président. Quand il envoie à l’Assemblée des projets de loi qui me paraissent erronés, je les combats. Quand ce sont de bons projets de loi, j’applaudis. Je ne suis pas là pour ou contre le Président. Je suis là exclusivement au service du peuple sénégalais. C’est cela l’orientation de notre coalition. Je ne suis ni du pouvoir, ni de l’opposition. A l’Assemblée, nous sommes le peuple. C’est pourquoi je lance un appel solennel à ce peuple, qu’il ait la conscience politique de comprendre qui se bat pour lui, qui prend en charge ses revendications. Au lieu de voter bêtement pour de l’argent ou pour des sentiments, il doit voter objectivement pour la liste du député du peuple incarnée par la grande coalition ‘’Leeral’’.
Quel est le type de député que vous voulez au sein de l’hémicycle ?
Des députés indépendants et libres. Qui ne sont pas des députés choisis par le Président. Vous avez vu les remontrances du Président vis-à-vis de son camp. Il menace son camp et arrête les assemblées générales d’investiture. C’est lui qui va nommer les députés. Ce sont les députés nommés par le Président donc à l’Assemblée, qui vont exécuter ses désidératas et ses vœux. Ce ne seront pas des députés au service du peuple. Mais ils seront des députés au service exclusif du président de la République qui les a nommés. Pour l’opposition aussi, ce sont des députés qui ne seront pas forcements libres parce qu’ils viennent avec une chapelle pour s’opposer.
Même si le gouvernement propose de bonnes choses, ils vont voter contre systématiquement et bêtement. Ils ne vont jamais voter pour. Nous, quand les projets de loi viennent, on les étudie. On n’a pas a priori une position. On étudie dans l’intérêt supérieur de la nation les projets de loi et nous allons les voter ou rejeter toujours en tenant compte de l’intérêt des populations. C’est pourquoi, nous comptons interpeller le gouvernement à tout moment, chaque fois que de besoin, pour qu’il réponde sur son fonctionnement. Est-ce qu’il prend en charge véritablement les préoccupations des populations ? Si ces dernières ont des problèmes, on les pose au niveau du gouvernement pour qu’il les règle. Telle est la fonction parlementaire.