L’historien sénégalais Buuba Diop et d’autres intellectuels réunis samedi à la librairie L’Harmattan Sénégal ont suggéré de faire du 13 mai, "une journée de la production critique" en hommage au Professeur Amady Aly Dieng, décédé jour pour jour en mai 2015.
Ils en ont émis l’idée lors d’un hommage rendu au Professeur Dieng, par "L’Harmattan Sénégal", autour du thème "Les livres se souviennent du doyen Amady Aly Dieng".
"Il est bon que le 13 mai soit une opportunité de revenir sur la production critique, sur la vente des produits culturels et le livre le plus vendu, mais aussi sur le destin des travailleurs culturels", a lancé le Pr Buuba Diop. D’après lui, "tout cela intéressait Amady Aly Dieng".
Il s’agit de "restituer à la critique scientifique" sa place, a renchéri le philosophe Alpha Amadou Sy, qui relève le caractère "constant", "intègre", et le "sens de la critique" du défunt critique littéraire qui a tendance à se perdre aujourd’hui. "Dans notre culture, on n’aime pas la critique, il faut être fou ou vieux pour le faire", a-t-il fait remarquer.
Mais pour Seydi Ababacar Ndiaye, l’ancien secrétaire général du Syndicat autonome des enseignants du Sénégal (SAES), "cet esprit de rébellion, de contestation" doit continuer". Un trait de caractère qu’Amady Aly Dieng a inculqué au sociologue Ibrahima Niang. "Il nous disait de savoir dire non, il a développé en moi cette culture d’achat d’ouvrages", témoigne-t-il, affirmant que le Professeur Dieng était "en déphasage" avec la société.
"Amady Aly Dieng nous a appris à nous départir du mimétisme", estime de son côté le Professeur Thierno Diop, enseignant au Centre d’études, des sciences et techniques de l’information (CESTI).
Les personnes ayant assisté à cet hommage, ont tenu à témoigner sur l’homme qui a "vécu pour et par ses idées et autour du livre". Un homme qui était guidé par le tryptique "amour-savoir et transmission", selon son fils Baïdy Dieng.
Pr Amady Aly Dieng était selon son ami camerounais, Bernard Founou, "une personne qui avait un modèle de vie lié à l’éthique de risque au profit des choses qui sont les plus importantes dans la société, c’est-à-dire il faut savoir se mettre à l’abri de toutes les sollicitations qui peuvent vous empêcher de lutter pour la récupération de la dignité des Africains et de l’Afrique".
La discussion s’est cristallisée autour du livre "Doyen
Amady Aly Dieng, le transmetteur intégral (1932-2015)", de l’historien Abdarahmane Ngaïdé, publié au mois d’avril dernier. Selon l’auteur, Amady Aly Dieng est "la résilience à l’état humain", "un homme qui est resté fidèle à sa pensée".
Selon les témoignages, le défunt chroniqueur des "Notes de lecture" dans la presse sénégalaise, était un intellectuel soucieux des échanges entre univers linguistique et solidarité académique. "Il faisait des notes sur des textes d’auteurs non francophones et il disait souvent qu’il faut sortir de notre univers francophone et regarder ce qui se passe ailleurs", se rappelle Pr Buuba Diop.
Il invite la nouvelle génération à prendre le relais pour relever le défi, tout en déplorant le retard pris dans l’hommage et la reconnaissance que l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) doit rendre au Professeur Amady Aly Dieng.
L’idée d’immortaliser le critique littéraire à l’intérieur de l’UCAD a été aussi soulevée, avec l’idée d’ériger d’une stèle ou celle d’un espace de débat à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines. Certains ont émis le vœu de donner à la future Bibliothèque nationale, le nom d’Amady Aly Dieng.
Amady Aly Dieng, 83 ans, était à la fois un économiste et un critique littéraire. Il a publié de nombreux ouvrages dont l’un porte sur Lamine Guèye, une des grandes figures politiques africaines (1891-1968) en 2013. Il a aussi tenu dans la presse sénégalaise, une chronique hebdomadaire de "Notes de lecture".