Au Sénégal, 41% des dépenses de santé proviennent des ménages. L’Etat assure les 37%, les bailleurs de fonds 17% et les 5% restants proviennent d’autres horizons. Le pays compte près de 20% de population couverte contre les risques maladies. Avec la Couverture maladie universelle, le gouvernement veut enrôler le maximum de citoyens. Se pose alors la question du financement.
Au Sénégal, beaucoup de services sanitaires sont aujourd’hui gratuits pour certaines couches de la population : la césarienne, la carte d’égalité des chances pour les personnes vivant avec un handicap, la dialyse, le plan Sésame pour les plus de 60 ans. Tout cela coûte beaucoup d’argent au contribuable sénégalais. Cependant, pour que toutes ces politiques sanitaires puissent s’inscrire dans la durée, il faut, selon le directeur exécutif de l’Institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement (Cicodev/Afrique), trouver d’autres mécanismes de financement pérennes de la santé. Cela doit nécessairement passer par la Couverture maladie universelle (CMU).
Pourtant, d’après une étude de Cicodev/Afrique sur cette question, il existe bel et bien des ‘’mécanismes qui sont structurellement ici, qui sont sociologiquement ancrés dans nos valeurs, que les populations elles-mêmes génèrent, développent et mettent en œuvre’’ et qui peuvent aider à financer la CMU. Parmi ces derniers, il y a l’autonomisation des jeunes et des femmes. Un autre mécanisme de prélèvement initié par le Pamecas est le prélèvement de 250 F mensuel pour financer une couverture maladie.
‘’Insécurité budgétaire’’
Si beaucoup d’initiatives en matière de santé ont été lancées et ont échoué, après seulement quelques années de mise en œuvre, c’est parce que, explique Amadou Kanouté, ‘’il y a une impréparation technique et financière derrière ces projets’’. En plus, avec ces projets, souvent la dette des hôpitaux étouffe à cause ‘’de cette impréparation financière’’. Aussi, dit-il, il y a une ‘’insécurité budgétaire’’ qui fait que tous ces programmes qui ont été lancés vers les années 2000 ont eu des ‘’insuccès’’. ‘’La volonté marquée par l’Etat n’est pas traduite en termes budgétaires. Dans la plupart des Etats, le constat est que le financement de la santé est assuré en général par les ménages’’, précise M. Kanouté.
En effet, selon l’étude de Cicodev sur le financement pérenne de la santé, au Sénégal, 41% des dépenses de santé proviennent des ménages. L’Etat, lui, assure les 37%. 17% proviennent des bailleurs de fonds et 5% d’autres horizons. Pourtant, depuis 2001, les chefs d’Etat de l’Union africaine ont pris, à Abuja, l’engagement d’accorder 15% de leurs budgets nationaux à la santé, en 2015. Toutefois, à la date butoir, seuls 8 pays africains ont respecté cette promesse.
Accorder 15% du budget à la Santé
Au Sénégal, la part accordée au secteur de la santé n’a même pas encore atteint 6% du budget national. En 2015, le budget de la santé était de 134 milliards de F Cfa, soit 4,80% du budget national. En 2016, il a connu une légère augmentation en valeur absolue comme en valeur relative, en passant à 150 milliards de F Cfa, soit 5,13%. En 2017, même si le budget alloué au département dirigé par le ministre Awa Marie Coll Seck a connu une augmentation avec 163,522 milliards de F Cfa, en valeur absolue rapportée au budget national, il est à 4,86%, soit en baisse.
Toutefois, le directeur exécutif de Cicodev/Afrique promet qu’ils vont continuer à mettre la pression sur l’Etat pour qu’il puisse respecter l’engagement des chefs d’Etat africains. Mais, conseille-t-il, avant que l’Etat ne puisse augmenter le budget de la santé, il faut trouver des modes de financement alternatifs. Car, avec la croissance démographique qui est de l’ordre de 3% par an, l’Etat du Sénégal va encore continuer à injecter plus d’argent pour assurer une couverture maladie universelle à bon nombre de concitoyens.
‘’Pour assurer la pérennité de la CMU, il faut travailler à la pérennisation de son financement. Il faut qu’on s’assure qu’aujourd’hui, le nombre d’indigents est plus nombreux que le nombre de cotisants classiques dans les mutuelles de santé. On ne peut pas continuer comme ça. Il faut trouver des mécanismes endogènes’’, alerte Amadou Kanouté.