Aucun Etat souverain africain disposant de ressources minières n’aurait connu de déficit budgétaire ni moins encore compter sur l’aide publique au développement pour se départir de la pauvreté endémique qui frappe inlassablement nos populations si des politiques minières sont élaborées. Telle est la conviction de Mamadou Goïta, directeur exécutif de l’Institut de recherche et de promotion des alternatives en développement (Irpad). Il s’exprimait hier, mercredi, à Bamako (Mali) sur les politiques publiques et leur évaluation dans le cadre d’une session de formation des médias publics et privés de six pays sur la gouvernance des ressources minières en Afrique de l’ouest.
L’Afrique immensément riche en ressources minières est le continent le plus pauvre de la planète. Une incongruité, qui s’explique par le fait que les biens publics ne font pas l’objet de débats publics dans l’espace public pour une citoyenneté plus active et alerte à même de faire office de médiation entre l’Etat et les populations. Conséquence, l’Etat s’arroge la légitimité sur tout et en tout. Des contrats ficelés tous azimuts sans une adhésion inclusive et participative des populations. Qui eux-mêmes (les Etats) sont soumis à la loi des investisseurs.
Dans l’obsession de se maintenir au pouvoir aussi longtemps que possible, nos dirigeants élaborent des politiques publiques avec des moyens conséquents à mobiliser. Dans cette logique, n’ayant pas les moyens de leurs politiques (mobilisation de ressources financières), les Etats s’offrent en agneau au diktat des investisseurs (les marchés financiers), qui n’ont comme devise la recherche de profit. Sous ce rapport, les compagnies minières profitant des limites des codes miniers en place, notamment d’un cadre institutionnel peu performant, d’une faible capacité d’encadrement et d’accompagnement (absence qualitative et quantitative de ressources humaines…), d’une faible capacité de collecte, de traitement et de diffusion de l’information, d’un cadre juridique et fiscal perfectible, d’un niveau d’infrastructures peu satisfaisant s’activent en alternative au développement de nos Etats. C’est ce qui ressort du premier jour d’une session de formation des médias publics et privés de six pays sur la gouvernance des ressources minières en Afrique de l’ouest. Une formation ouverte hier, mercredi 26 avril 2017, à l’Institut de recherche et de promotion des alternatives en développement (Irpad) de Bamako (Mali) par Gamer Dicko, conseil technique du ministre de la Communication.
Dénonçant amèrement la gouvernance des ressources minières dans nos Etats respectifs, Mamadou Goïta, directeur exécutif de l’Irpad dira qu’il y a une absence totale de vision minière. Sur ce, il dira: «Nos codes miniers sont très limités pour faire face aux mécanismes de fraude et d’évasion fiscale de ces compagnies minières. Mieux, lorsqu’une compagnie obtient une licence pour 10 ans d’exploitation elle est exonérée de 5ans. Après un an de mise en place, elle fait appelle à la société mère pour exploiter à fond les ressources avant la fin de l’exonération fiscale». Par conséquent, «il faut substituer le code minier par une politique minière consistante à bâtir une véritable politique minière dans nos Etats respectifs».
Et mieux, «Aller dans une dynamique de bâtir des consensus forts autours de ces questions d’existence de nos Etats. Car, en définitive si nos ressources minières sont bien gérées, aucun de nos Etats n’aurait connu de déficit budgétaire, pas moins d’appui communément appelé aide au développement». Confortant son propos, il convoque le rapport Thabo Mbeki ou la carte du pillage de l’Afrique qui relève qu’en moyenne, l’Afrique a perdu chaque année 22 milliards de dollars entre 1970 et 1999.
« La cadence s’est accélérée par la suite pour atteindre 50 milliards de dollars annuels entre 2000 et 2008», souligne le rapport. En clair, dira-t-il: «Nous avons une absence totale de vision de la gouvernance des ressources minières». Dans son mot d’ouverture, il fera savoir qu’une chose est de mettre en place un cadre juridique, une autre est de veiller à son application, mais également à une amélioration constante de ces mécanismes de gestion et de contrôle des ressources minières. A ce propos, il laisse entendre que l’Etat malien s’y active constamment. «Nous sommes à notre troisième code minier après celui de 1991, 1999, et 2012. Tout ceci montre la détermination à faire en sorte que les ressources minières soient profitables au pays», a-t-il dit.