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Serigne Mor Mbaye (psychologue) sur les trois jours de deuil national: ‘’C’est du bling-bling’’
Publié le jeudi 20 avril 2017  |  Enquête Plus
Cérémonie
© Présidence par DR
Cérémonie de levée des couleurs au palais
Dakar, le 7 février 2017 - Le chef de l`État Macky Sall a présidé la cérémonie de levée des couleurs du mois de février. Elle s`est tenue au palais de la République en présence des membres du gouvernement.




Le psychologue Serigne Mor Mbaye considère que le Président Macky Sall n’a pas été préparé, avant de décréter les trois jours de deuil national, dans le cadre de l’incendie survenu au Daaka.

A la question de savoir : quelle appréciation faites-vous des trois jours de deuil national décrété par le Président Macky Sall suite à l’incendie survenu au Daaka avec des pertes humaines et des blessés ? Le psychologue Serigne Mor Mbaye martèle : ‘’Ça n’a pas de sens’’. Et s’en explique : ‘’Parce qu’on ne le sent pas dans ce pays. Quand vous faites un deuil, cela suppose que vous puissiez vous poser des questions, susciter des débats, situer les responsabilités etc. Et faire démissionner des gens, parce qu’il y a des responsabilités, parce que tous ces événements sont précédés de multiples Crd avec des budgets. Et pourtant, il y a échec, catastrophe. Ces gens ont été massacrés’’, fulmine-t-il, au bout du fil.

La psychologue, qui assimile ce deuil national a du ‘’bling-bling’’, est d’avis que cette mesure aurait dû être un ‘’espace d’échanges, de discours’’. Ceci, dit-il, dans le but de permettre aux gens, avec à la fois émotion et enthousiasme, de prendre conscience de l’état de ce pays. ‘’Il devrait être un moment crucial d’introspection. Parce qu’il y a comme une névrose de répétition où les catastrophes se multiplient sans pour autant qu’on s’arrête (…) pour que ‘le plus jamais ça’ ne soit pas un mot vain. Moi qui vous parle, je suis dans la douleur, parce que je connais bien ce milieu-là (…). Tous ces endroits sont des zones à risques’’, glisse-t-il. Avant de plaider pour que les responsabilités soient situées dans cet événement tragique qui a occasionné la mort de plus de 25 morts et des blessés dont le nombre dépasse 75.

‘’Le Président Macky Sall n’a pas été préparé avant de décréter ce deuil national’’

‘’(…) Ce n’est ni une histoire de Dieu ni de Prophète. C’est tout simplement une histoire de responsabilités d’un Etat’’, pointe du doigt M. Mbaye. Avant de faire savoir que les instances religieuses n’ont aucune responsabilité par rapport à la sécurité des personnes qui font le déplacement. Deux jours après ce désastre humain, le Président Macky Sall s’est rendu sur les lieux. Où il a promis de moderniser le site pour éviter des événements de cette nature. Il s’y ajoute l’annonce des trois jours de deuil national formulée sur place, c'est-à-dire mardi (hier), mercredi (aujourd’hui) et jeudi (demain). Cette décision ne laisse pas indifférent Serigne Mor Mbaye. Il analyse : ‘’Moi, je pense que ce décalage est lié au fait qu’il n’était pas préparé pour prendre cette mesure. Donc, c’est venu un peu tard, alors qu’il aurait pu être un réflexe. Dans ce pays, si on devrait décréter un deuil chaque fois, on vivrait dans un deuil interminable. Parce que chaque jour a son lot d’accidents et de catastrophes…’’

Anthropologue de formation, Mamadou Ndiaye a, quant à lui, savouré cette mesure du chef de l’Etat. Parce que, motive-t-il, la nation sénégalaise a perdu un nombre important de morts. ‘’A cet égard, je trouve louable la décision du président de la République. Un deuil national, c’est juste une journée pour rendre hommage à des personnes disparues qui ont fait des actes héroïques ou bien plusieurs morts dans un événement tragique… Et il n’empêche pas les gens de travailler’’, apprécie-t-il. Surpris par le décalage du deuil national, M. Ndiaye essaye tout de même de comprendre les causes. Selon lui, les chefs d’Etat ne peuvent pas se permettre de prendre des mesures à la hâte. ‘’Je pense qu’il a pris cette décision tardivement pour permettre aux membres de la communauté, c'est-à-dire les Chrétiens, de célébrer leur fête’’, avance-t-il.

‘’L’Etat doit jouer son devoir d’anticipation’’

Au-delà de toutes ces considérations, le psychologue se dit préoccupé par l’état de santé mentale de ces centaines de personnes qui ont été exposées à la mort au Daaka. Malheureusement, regrette Serigne Mor Mbaye, personne n’en fait cas. ‘’Les gens qui sont allés, c'est-à-dire les sapeurs-pompiers, ont été eux aussi exposés au traumatisme, y compris le personnel médical à l’accueil. C’est trop facile de décréter un deuil national. Il y a quelques années, plus de vingt enfants talibés ont été carbonisés. Et aujourd’hui, les enfants talibés continuent d’errer. Une société humaine a besoin d’ordre, de sens, d’orientation. Malheureusement, tout ceci n’existe pas au Sénégal (…) On est dans l’incantation’’, déplore M. Mbaye.

En croisade contre ces tragédies humaines, Serigne Mor Mbaye estime que l’Etat doit jouer son devoir d’anticipation qui, selon lui, ne se négocie. Il est, poursuit-il, le garant de la sécurité des personnes et des biens. ‘’Donc, il doit anticiper sur les grands mouvements de population pour éviter le massacre dans un contexte où nous aspirons à un développement. C’est aussi revisiter tous ces espaces de grand rassemblement, faire des études sur les risques (...). Et il faut des simulations, même de catastrophes, dans ces lieux pour que les populations aient de bons réflexes. Je suis persuadé que bon nombre de personnes ont été brûlées parce qu’il n’y a aucun réflexe de survie’’, avance-t-il.
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