Pour le représentant d’Amnesty International, le débat sur le rétablissement de la peine de la mort au Sénégal ne saurait prospérer
Avec la série de tueries qui a eu lieu au Sénégal en 2016, le débat sur un retour de la peine a été agité par une partie de l’opinion et certains élus dont les députés Me El Hadji Diouf et Seydina Fall dit ‘‘Boughazelli’’. Pour le chef du bureau régional Afrique de l’Ouest et du Centre, la posture des autorités, rejetant toute idée de rétablissement de la peine capitale, est à saluer. ‘‘Nous estimons que l’actuel gouvernement a fait preuve de courage. Quand des gens ont dit qu’il fallait revenir à la peine de mort, il a eu le courage de dire non. J’ai apprécié la réponse de Seydou Guèye que le gouvernement du Sénégal ne reviendrait pas dessus’’, a-t-il déclaré hier, en saluant auparavant le travail de pionnier abattu par le Président Wade qui a pris la décision d’expurger la peine capitale de l’arsenal juridique sénégalais en 2004.
‘‘Dans les faits, depuis les années 1970, la peine de mort a été abolie au Sénégal. Les Sénégalais sont très réfractaires à cette peine, demandez aux juges ou policiers qui allaient assister. Personne ne supportait les exécutions. Aujourd’hui, c’est la même chose, on a procédé à une cohérence entre la pratique et la culture sénégalaise qui est abolitionniste. Dans la pratique, le Sénégalais a peur du sang’’, poursuit-il. Son adjointe, Samira Daoud, d’en appeler à la responsabilité des politiques et des leaders d’opinion. On ne peut pas continuer à avoir une attitude populiste qui consiste à vouloir dire aux gens ce qu’ils veulent entendre. Il faut qu’ils arrêtent de raconter des histoires aux populations et de leur dire que nous allons rétablir la peine de mort pour diminuer la criminalité. C’est un mensonge. Qu’on n’agite pas ce débat sur la peine de mort pour donner de fausses réponses à de vraies questions liées à la sécurité, à la criminalité ou à la misère’’, défend-elle.
AHMED ABBA
Amnesty International demande ‘‘la libération immédiate et sans condition’’ du journaliste, correspondant de Rfi en langue haoussa au Cameroun, Ahmed Abba. Lors de la présentation de son rapport annuel 2016 sur la peine de mort hier à Dakar, le chef du bureau régional d’Amnesty pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, Alioune Tine, ainsi que son adjointe Samira Daoud, ont fait le plaidoyer en faveur du reporter. Ahmed Abba, en détention depuis juillet 2015, sera jugé le 20 avril prochain. En reportage sur Boko Haram au nord du pays, ‘‘il pourrait être condamné à mort’’, selon Mme Daoud, puisque ‘‘le procureur a requis la peine capitale à son encontre’’, poursuit-elle. Il est accusé de ‘‘complicités d’actes de terrorisme’’ et de ‘‘non-dénonciation d’actes de terrorisme’’.