Avant la caisse d’avance, différents différends ont opposé la municipalité de Dakar aux différents ministères du gouvernement. Des objections qui lui ont savonné la planche au point que les projets sont au point mort.
La caisse d’avance aura finalement été fatale au maire de Dakar Khalifa Sall. Son placement sous mandat de dépôt sous les chefs d’inculpation de détournement de deniers publics est le point culminant de dissensions récurrentes qui ont caractérisé ses relations avec le régime actuel. En effet, bien des contentieux l’ont opposé aux différents démembrements de l’Etat, sous le régime ‘‘apériste’’. En 2014, le Conseil municipal de Dakar avait autorisé à la mairie d’émettre un emprunt obligataire sur le marché de l’Union économique Ouest Africain (Uemoa). Celle-ci, dans le cadre de ses activités de développement, devait contracter un emprunt de 20 milliards auprès de la fondation américaine Bill et Melinda Gates, l’Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID) et la Banque mondiale. L’Etat du Sénégal a évoqué des raisons techniques, pour se désister à deux jours du lancement de son lancement. Un retrait qui a plombé tous les projets structurants de la Ville de Dakar.
L’emprunt concernait ainsi le pôle commercial et devait couvrir l’acquisition du foncier, la construction du centre commercial et les projets structurants qui allaient être autour. Il était même prévu des zones de stationnement et des voies qui devaient connecter ce pôle commerce de Petersen au centre commercial Félix Eboué. Dans le sillage d’une politique de réappropriation de l’espace dakarois, ce site devait abriter un espace de commerce destiné à caser non seulement des tabliers, mais également les grandes enseignes. Ceci, afin de désengorger les ruelles de la capitale et permettre aux Dakarois d’acquérir un meilleur cadre de vie. Malgré un recours, le maire sera débouté par la Cour suprême.
Après quatre ans de travail de ses services, l’édile de Dakar s’est indigné du revirement de l’Etat. ‘‘Ce qui nous gêne, c’est que l’Etat du Sénégal puisse se dédire. Tous les partenaires qui se sont engagés dans le projet, l’Usaid, la Banque mondiale, la fondation Bill et Melinda Gates, l’ont tous fait, parce que l’Etat nous avait donné un avis de non-objection’’, a soutenu Khalifa Sall en mars 2015 pour déplorer cet état de fait. Ces tiraillements ayant abouti à l’échec de l’emprunt ont eu un double effet négatif. La municipalité de Dakar, qui voulait rompre avec l’emprunt des banques et pour la première fois se lancer directement sur le marché financier qui polarise chaque année 150 milliards de financement, a vu cette initiative échouer. Ensuite Dakar a perdu sa priorité, puisqu’elle devait servir de phase-test pour la Fondation Bill et Melinda Gates qui voulait étaler les investissements aux autres capitales africaines.
Khalifa a dû se départir d’une autre difficulté auparavant. Après un Acte III de la décentralisation qui lui a retiré pratiquement toutes prérogatives en tant que maire, avec le retrait de la gestion des ordures à la Vdd, l’Etat a dépouillé encore plus le maire de Dakar. Un transfert de compétences annoncé en octobre 2015 par son ‘‘supérieur hiérarchique’’, ministre de la Gouvernance locale, du développement et de l’aménagement du territoire, Abdoulaye Diouf Sarr, présenté comme son plus sérieux concurrent apériste dans le département de Dakar. Ainsi, la gestion des ordures a été confiée à l’Unité de coordination de gestion des déchets solides (UCG), un an après que la coalition du maire Khalifa Sall a étalé le maire de Yoff, dans une éclatante victoire en remportant 16 communes de Dakar sur 19. Un décret qui prend les compétences de la ville pour les confier à l’Etat central, d’après la municipalité. ‘‘Un document politique ne peut pas dissoudre un décret’’, déclarera le maire de Dakar qui a attaqué cette décision devant la Cour suprême.
Après Abdoulaye Diouf Sarr, c’est un autre Sarr, Diène Farba en l’occurrence, qui sera en bisbilles avec l’édile de la capitale dakaroise. La cause ? Un tiraillement sur les projets de la Place de l’Indépendance de Dakar, de la Place de la Nation ex-Obélisque et du Rond-point de la Patte d’Oie. Leur réalisation était devenue urgente, argue l’autorité. Le ministre du Renouveau urbain, en conférence de presse, en octobre 2015, a souligné que Khalifa Sall ‘‘n’a pas lancé un appel d’offres, procédure préalable à toute exécution d’un marché. Il doute que le projet soit exécuté à travers le partenariat public-privé (Ppp), car les décrets d’application ne sont pas encore signés. Ce projet n’est que chimérique et son exécution n’est pas de sitôt’’, déclarait-il.
En janvier 2013 déjà, le ministère de l’Urbanisme, par le biais de la Direction de la surveillance et contrôle de l’occupation des sols (Dscos), avait sommé l’arrêt des travaux du pavage de la Corniche-ouest de Dakar. Un projet de 5 milliards de la Ville de Dakar pour toutes les 19 communes du département bloqué sous prétexte d’un manque d’autorisation. Ce qu’avait véhément nié le responsable du projet, maire des Parcelles Assainies, Moussa Sy. Le premier caillou dans les chaussettes du maire Khalifa Sall qui, depuis, ne cessera d’essuyer une série de blocages.