Balla Gaye 2 accompagne le Président Macky Sall à Ziguinchor ce lundi pour le lancement du projet pôle de développement de la Casamance. Un voyage qui intervient dans un contexte particulier : le lutteur fait l’objet de toutes les convoitises politiques. Il risque d’être écartelé entre la fidélité à son ami El hadj Malick Gackou, numéro 2 de l’Afp, et les frères Sall –Macky et Aliou- qui veulent contrôler Guédiawaye.
Le produit est très prisé. Très convoité. Parce que tout simplement il est rare, dans un contexte politique particulier caractérisé par la course aux voix pour briguer la direction des Collectivités locales. Aujourd’hui, à Guédiawaye le célèbre lutteur Balla Gaye 2 fait l’objet de tous les… combats politiques. Même le premier des Sénégalais ne veut pas bouder son plaisir de le voir de son côté. La preuve : le Président Macky Sall – sauf surprise de dernière minute – sera ce lundi en Casamance avec le chef de file de l’Ecole de lutte Balla Gaye (Elbg). Omar Sakho, à l’état-civil, en faisant le voyage de Ziguinchor avec le chef de l’Etat, pour le lancement du Projet pôle de développement de la Casamance (Ppdc), fera profiter à coup sûr au non moins président de l’Alliance pour la République (Apr) de ses bains de foule, mais aussi de son aura dans la capitale du Sud, son «fief», pour y avoir appris à construire sa réputation à travers ses victoires qu’il a engrangées haut la main dans l’arène. Mais aussi avec les nombreuses caravanes pour la paix qu’il organise chaque année et qui font le tour de la Basse et Moyenne Casamance : les régions de Ziguinchor et de Sédhiou. Une initiative qui lui a permis de rallier à sa cause les chefs religieux et coutumiers les plus significatifs de la région : l’Imam ratib de Bignona Fansou Ousmane Bodian, l’évêque de Ziguinchor Mgr Paul Abel Maba Diatta, le roi d’Oussouye Sibulumbaï Diédhiou, etc. Eux ou leurs proches collaborateurs ont toujours accueilli à bras ouverts le fils de l’ancienne gloire des arènes sénégalaises, Mamadou Sakho alias Double Less. Et prié même pour lui, à l’occasion de ses nombreuses caravanes.
Un champion de lutte, de surcroît Roi des arènes, ça draine des milliers de fans, de proches, de parents, de citoyens de pays voisins… Le Président Sall qui l’a compris a pris la calculette politique pour compter les gains que Balla Gaye 2 peut lui apporter, à travers le lancement du Ppdc. Une sorte de discrimination positive pour une région meurtrie par plus de trois décennies de conflit.
Un engagement de Balla Gaye 2 aux côtés du Président Macky Sall pourrait entraîner un ralliement des plus réticents à la transhumance à l’Apr. Dans une ville où le maire –Abdoulaye Baldé, président de l’Union des centristes du Sénégal (Ucs) – est loin d’être un enfant de chœur pour le chef de la majorité présidentielle. Et où aussi aucune figure politique d’envergure n’émerge des rangs du parti présidentiel. Même si le champion de lutte avait récemment déclaré, lors d’un point de presse de lancement de ses projets économiques pour la Casamance, qu’il ne ferait pas de la politique.
Balla Gaye 2 : l’autre combat entre Aliou Sall et Gackou
Aliou Sall, frère du président de la République, travaille à contrôler – à défaut de s’emparer de toutes les Collectivités locales – la plupart des Collectivités locales du département de Guédiawaye. Toute une ambition dont la finalité n’est rien d’autre que de reléguer au second plan une figure politique de la banlieue dakaroise : El hadj Malick Gackou. Un objectif irréalisable ? Sall frère croit dur comme fer à son étoile. Et pour y arriver, s’appuyer sur la jeune star Balla Gaye 2 ne serait pas un exercice de trop. Et la résolution de cette équation pour Aliou Sall réside dans la stratégie qu’il mettra en place pour séduire le Roi des arènes. Mais Sall frère devra se rappeler qu’un homme de pouvoir puissant, le Président Abdoulaye Wade, s’y était essayé en vain, à coup de promesses de voitures, d’équipements et en se faisant introniser président d’honneur de l’Ecole de lutte Balla Gaye (Elbg) alors que celle-ci en avait un : El hadj Malick Gackou. On connaît la suite puisque les muscles politiques du lutteur n’ont pas pu empêcher les «quatre appuis» de Wade face à Macky Sall lors du «combat» du 25 mars 2012.
Balla Gaye 2 va-t-il rendre à Gackou la monnaie de sa pièce ?
Devant la crise en Progrès que connaît sa formation politique, Gackou a certainement besoin de prendre date. Pour les Locales prochaines et pour un éventuel contrôle de l’Afp, après la retraite du Président Moustapha Niasse. Mais une telle ambition ne pourrait se construire en se mettant à dos le leader de l’Elbg. Le numéro 2 de l’Afp doit reconnaître que la difficulté de la tâche s’expliquerait par son embarras : contrôler le département de Guédiawaye tout en restant dans la majorité présidentielle ou se mettre à dos celle-ci en croisant le fer avec le petit frère du Président Macky Sall. Ses atouts : il n’affronte pas le suffrage universel pour la première fois. Il a dirigé le Conseil régional de Dakar avant de devenir ministre- des Sports puis du Commerce et de l’Industrie- dans le gouvernement de l’ex-Pm Abdoul Mbaye. Il s’est fait une certaine popularité dans la banlieue dakaroise et dans un secteur qui draine des foules, la lutte. Où il a investi depuis des années à coups de millions par le système du parrainage. Et puis Gackou a toujours été aux côtés du Roi des arènes et de son écurie. Lui rendre la monnaie de sa pièce sonnerait la défaite des frères Sall et de leurs partisans. Le lutteur va-t-il s’impliquer cette fois-ci ? Il faut toutefois signaler que Balla Gaye 2 n’a jamais pris de position politique publique en faveur de El hadj Malick Gackou.