La famille de Mansour Diop alias Thiallé avertit les autorités que l’intéressé ne souffre d’aucune maladie et déclare n’avoir été torturé ni par les policiers qui l’ont arrêté, ni par les enquêteurs du Commissariat central. Une alerte à l’endroit des agents de Rebeuss qui ont l’habitude de faire subir des représailles aux détenus fugitifs remis en cage.
Si la famille de Thiallé lance cette alerte, c’est parce que d’autres fugitifs ont fait les frais de leur fuite, après leur retour à la case prison. Ils sont systématiquement mis en cellule punitive, pendant un mois au moins, selon le règlement intérieur de la prison. Certains d’entre eux sont morts en cellule punitive, d’autres décèdent juste après leur «libération pour raisons médicales». Décédé en prison en 2004 des suites d’une insuffisance rénale, avant même son procès, Alioune Abatalib Samb alias «Ino», qui s’est illustré par plusieurs cas d’évasion, en a été victime. Ses nombreux va et vient en cellule punitive, à Rebeuss, auront contribué à la dégradation de sa santé. C’est ainsi que lors de son procès pour évasion, il avait montré au juge les séquelles, avant de lancer: «Mme le juge, je serai sincère avec vous. Si l’occasion se présente à nouveau, je vais encore m’évader. A la prison de Rebeuss, les conditions de détention sont difficiles, c’est pourquoi je m’étais évadé. Avant tout, je suis un être humain. Après mon arrestation, j’ai fait 38 jours de cellule. Je suis interdit de cour et on me refuse les soins. Ma dignité humaine est bafouée en détention (…)». On se rappelle qu’il s’est s’évadé du Commissariat central de Dakar, pour aller tenter une aventure en Belgique. Mais son aventure ne sera que de courte durée car il sera, à nouveau, remis aux arrêts. Une seconde évasion aura lieu, occasion pour lui de faire équipe avec Alex.
En ce qui concerne Ino, l’action publique a été déclarée éteinte, pour «cause de décès». Mais avant son décès, «il avait fait amende honorable», car ayant regretté ses forfaits. «Il passait tout son temps à prier et chapelet à la main», soutient-on. Enterré au cimetière de Thiaroye, on ne connait pas le lieu où se trouve sa tombe car aucun signe ne permet d’identifier ladite tombe. «Il a été enterré la nuit après sa mort. L’endroit où se trouve sa tombe est tenu secret. Il n’y a rien qui puisse renseigner sur la place où il est enterré car il n’y a ni tableau d’identification ni indication pour permettre à sa famille et à ses proches de venir se recueillir de temps en temps», témoigne un membre de sa famille.
Du fond de sa cellule au camp pénal de Liberté 6, son ex-compagnon, Alassane Sy dit «Alex», n’a pas dérogé à la règle. Même s’il a été condamné à la perpétuité (prison à vie), il a bénéficié d’une commutation de peine. C’est une sorte de réduction de peine qui ramène sa perpétuité à 20 ans de travaux forcés, lesquels expirent en 2018. Contrairement aux allégations faisant état de son décès, ce fils de mécanicien dépeint comme un «as du volant dont aucune sécurité de véhicule ne peut résister» croupit, toujours, au Camp pénal de Liberté 6. En prison depuis le 7 juin 1999, sa libération est imminente dès lors qu’il a déjà purgé 19 ans de sa nouvelle peine.
S’y ajoute un autre élément de cette bande : Abdou Konté. On le surnommait l’homme à la kalachnikov car étant dépeint comme le spécialiste des armes à feu. On l’appelait aussi «le Libérien», en raison de ses origines. Il a été l’auteur de trois tentatives d’évasion en 1999, 2000 et 2001, de la prison de Rebeuss où il était en détention provisoire. Il a été emporté par une «insuffisance rénale». Les archives judiciaires gardent aussi en mémoire le cas de Dame Mbengue, cet évadé qui s’est retrouvé avec des jambes cassées après qu’il a été remis en cage. Par ailleurs, du côté de l’Administration pénitentiaire, l’heure n’est pas encore à la punition réservée à Thiallé, puisqu’il n’est pas encore remis entre les mains des matons.