Introduction
Les mécanismes monétaires ne sont pas créés pour eux-mêmes : ce sont des instruments qui facilitent la production et les échanges. En conséquence, ils doivent refléter les mécanismes productifs et s’y
conformer. «L’histoire de l’Union monétaire ouest-africaine» est analysée par la Bceao dans un ouvrage peu connu des chercheurs (Editions Georges Israël, en 3 volumes, 1 200 pages). Les avantages, les inconvénients et tous les projets élaborés depuis soixante ans y sont largement développés. Egalement, le rôle du système financier est examiné ainsi que l’efficacité de la politique monétaire. L’une des
limites de ce travail monumental concerne essentiellement les perspectives évoquées au quatorzième et dernier chapitre de l’ouvrage.
Elles auraient pu faire l’objet d’une analyse plus approfondie. Malheureusement, ce chapitre ne comporte que douze pages au moment où la Zone a atteint un cycle optimal de vie et doit conséquemment subir des
réformes adaptatives devenues inévitables dans le contexte d’une mondialisation darwinienne de haute compétition.
Les mutations démentielles intervenues dans la globalisation financière ont permis aux marchés financiers d’acquérir des pouvoirs trop étendus de contrôler l’essentiel des circuits de financement à l’échelle mondiale et de déterminer les rythmes de croissance des économies. Les transactions opérées sur les marchés de change représentent environ 1500 milliards de dollars par jour, soit plus de 50 fois les flux réels
de marchandises. Cette globalisation financière provoque la multiplication et le durcissement des chocs asymétriques, généralise le régime de change fixe ajustable qui permet de tirer meilleur profit des
avantages compétitifs, globalise l’écosystème financier avec la formation d’un méga marché des capitaux qui installe l’instabilité et les risques au cœur du système monétaire international. Les risques de cette mondialisation financière ont été sous-estimés et les gains surestimés. Elle expose les autorités monétaires à défendre quotidiennement leur taux de change face à la spéculation. Le très libéral hebdomadaire britannique The Economist observait, en 2003, «Désastres financiers périodiques, crises de la dette, fuites de capitaux, crises de change, faillites de banques, krachs boursiers…
C’est assez pour forcer un bon libéral à s’arrêter pour réfléchir». Cette conjoncture coïncide avec une crise des organisations internationales de régulation (Fmi, Banque mondiale, Bri, l’Omc) révélée
par l’impertinence de leur épure théorique, la panne d’idéologie, le manque de légitimité, la concurrence d’autres organes de régulation (Pnud, Cnuced etc.). Cette crise a notablement affaibli leurs
diagnostics et remèdes malgré leur entêtement à les maintenir dans les pays africains.
C’est dans ce contexte qu’un groupe d’économistes réanime un vieux débat dans un ouvrage intitulé Sortir l’Afrique de la servitude monétaire.
A qui profite le franc Cfa ? Pourquoi sortir ? Comment sortir et à quels coûts ? Quelles sont les propositions alternatives ? Quelles incidences sur chacun des Etats membres qui ont des situations économiques asymétriques ? En résumant les idées de ces auteurs, qu’on peut appeler «les souverainistes», on trouve pêle-mêle : le démantèlement de la Zone franc (souveraineté monétaire), la mise en place de politiques monétaires nationales autonomes permettant une manipulation des taux de change et des taux d’intérêt (Références incomplètes et analyses trop insuffisantes du système monétaire des pays émergents d’Asie), l’abandon de la parité fixe et de l’arrimage à l’euro, la résiliation du Compte d’opération pour une utilisation plus productive des ressources de la Bceao et les changements institutionnels de celle-ci.
Le débat mené en ces termes est éminemment politique avec des soubassements analytiques et empiriques plus empreints d’idéologie et d’émotion que de techniques rigoureuses d’approche. Ni les coûts de sortie ni les incidences sur les systèmes productifs ne sont évalués.
Ces réflexions sont bien en deçà des travaux des 300 chercheurs africains réunis à Ouagadougou en 2001, travaux consignés dans l’ouvrage L’avenir de la Zone franc que nous avons coédité (aux Editions Karthala)
avec le Professeur Hakim Ben Ham¬mouda (ancien ministre de l’Economie et des finances de la Tunisie), bien en deçà également de la recherche collective menée par des économistes et universitaires de la Cedeao autour du thème «Sortir du sous-développement, quelles nouvelles pistes pour l’Afrique de l’Ouest ?». Nous avons assuré pendant deux ans la présidence du Comité scientifique comprenant les Professeurs Bamba Abdoul Gadiri (Problé¬matique de la convergence), Igue John (Historien,
Le Bénin, un Etat entrepôt) et G. Semedo (La Zone franc : mécanismes et perspectives) et des auteurs anglophones du Nigeria, Ghana, Cap-Vert etc. Un symposium de restitution a été organisé à Ouaga¬dougou en juin 2010, suivi de la publication d’un ouvrage (en 2 tomes à l’Harmattan).
L’expérience montre que l’introduction de nouvelles monnaies nationales engendre :
Premièrement, de lourdes contraintes de régulation institutionnelle pour chacun des Etats : pour quelle économie et quelle politique monétaire ?
Comment gérer les inéluctables mouvements spéculatifs, les fortes anticipations inflationnistes, les réajustements en cascade qui amèneront une perte de confiance aux monnaies nationales respectives et une intensification de la fuite des capitaux ? En exemple, les cas spectaculaires du Zaïre de Mobutu, du franc malien, du dollar de Zimbabwe, ces monnaies ont fait de leurs populations des milliardaires qui ne peuvent pas payer une baguette de pain.
Deuxièmement, des coûts attachés à l’impression et à la fonte d’une nouvelle monnaie fabriquée forcément à l’étranger. Ce sont les fameux «coinage costs».
Troisièmement, des coûts d’apprentissage de la gestion monétaire et d’une nouvelle gouvernance de l’ensemble de l’écosystème monétaire et financier.
Quatrièmement, des coûts liés aux effets externes négatifs des déficits budgétaires considérables, de la monétisation de la dette et de l’intensification de la fuite des capitaux.
Cinquièmement, des coûts quasi permanents d’ajustement et de réajustement monétaire pour faire face à l’asymétrie des chocs externes qui deviendront plus nombreux et produisant de multiples incidences sur le productif et financier.
L’absence de réponses concrètes à ces problèmes intangibles et complexes nous conduit à analyser les avantages de la Zone franc ainsi que ses inconvénients pour mieux cerner les réformes adaptatives et les
ajustements indispensables, en sachant que rôle économique de la ZF dans l’économie française est marginal : 4% des échanges et des investissements à l’extérieur et 1,5% de sa masse monétaire globale.
I/ Les avantages liés à l’appartenance à la Zone franc
La Zone franc a produit des avantages bien connus qui sont au nombre de cinq :
la stabilité de la monnaie que recherchent toutes les monnaies du monde, la convertibilité qui encourage les Investissements directs étrangers rendus nécessaires par le lourd déficit d’épargne, l’accroissement des échanges avec l’Ue qui est la première puissance commerciale mondiale par suite de l’absence de risque de change et de commission, le levier pour l’assainissement des finances publiques et la lutte contre l’inflation et un espace de solidarité et de coprospérité tiré par les principaux moteurs que sont la Côte d’Ivoire et le Sénégal : les excédents des uns ont toujours comblé le déficit des autres.
Ces avantages ont créé un climat de confiance qui a facilité les Investissements directs étrangers et ont eu pour conséquence d’abord une croissance économique appréciable des pays (que de bonnes politiques
d’offre peuvent accroître), ensuite une faible croissance monétaire et une inflation maîtrisée (qui influe sur le pouvoir d’achat), en outre, une forte surliquidité des banques et enfin un niveau appréciable des
réserves extérieures de la Banque centrale. A cela s’ajoute une rigoureuse discipline monétaire consistant à contenir l’expansion de la liquidité pour éviter les tensions inflationnistes ruineuses (Cf, Zaïre,
Mali, Zimbabwe, etc.).
Il faut souligner deux autres aspects remarquables de la Zone franc : la croissance et l’inflation. Les travaux réalisés avec le Prof. K. Kané (Mondialisation et indépendance monétaire : Le Cfa face à l’euro) montrent que les performances de ce binôme croissance/inflation ont été et demeurent, encore aujourd’hui, plus importantes dans la zone que dans le reste de l’Afrique. Le rapport Perspectives économiques mondiales, publié par la Banque mondiale en 2016, observe qu’en «Afrique de l’Ouest, les pays francophones de l’espace Uemoa ont enregistré une progression globale de la croissance supérieure à 6% pour la quatrième
fois en cinq ans (6,3%). Si la Côte d’Ivoire et le Sénégal ont réalisé les meilleures performances (7,8% et 6,6%), la croissance a continué à être robuste dans les autres pays, notamment au Mali où elle s’est
établie à 5,6%, après avoir été de 6,0% en 2015 et de 7,0% en 2014».
Il en va de même pour la maîtrise de l’inflation qui déteint positivement non seulement sur l’activité économique, mais aussi sur la sauvegarde du pouvoir d’achat des populations. C’est pourquoi le ciblage
de l’inflation est un objectif important de la politique monétaire, ce qui est confirmé par le Programme de la coopération monétaire en Afrique (Pcma), adopté en 2002, par le Conseil des gouverneurs de l’Association
des banques centrales africaines (Abca). Cet organisme fait de l’inflation un critère de premier rang en matière de convergence. En la matière, les réussites de la Zone franc sont sans pareil en Afrique :
dans la zone Cedeao, l’inflation serait de 8,3% en 2015 contre 7% l’année précédente, alors qu’elle est restée dans l’Uemoa, maîtrisée à 1%, en-dessous de la norme communautaire de 3%.
*II/ Le système de change et l’arrimage à l’euro avec un taux de parité fixe. Cette question fortement controversée appelle des analyses plus rigoureuses*
L’analyse économique a répondu à la question de savoir pourquoi choisir un régime de change fixe. Il existe une palette de régimes de change alternatifs qui peuvent être regroupés en deux avec des variantes à
l’intérieur de chacun : le régime de taux de change fixe (change fixe pur, change fixe hybride, change fixe ajustable, le currency board, les parités glissantes) et le régime de taux de change flottant (flexible
pur, flexible géré). Quels sont les avantages attachés au régime de change fixe ?
Trois arguments théoriques : d’abord, il limite le recours permanent aux dévaluations compétitives. Ensuite, il impose une discipline monétaire rigoureuse dans la conduite de la politique économique. Et enfin, il a permis de construire l’Europe monétaire après la renonciation au change flottant du Système monétaire européen. Dans le débat actuel, il est souvent proposé deux idées : la résiliation du taux de change fixe et la
déconnexion de l’euro. Il faut observer que le flottement comporte des inconvénients majeurs : une forte instabilité des taux qui accroît l’incertitude et les risques entraînant le retard des investissements comme des désinvestissements (P. Krugman) et pénalise à la fois les importateurs et les exportateurs. La seconde idée est que l’arrimage à l’euro, décrétée monnaie forte, compromet le dynamisme du Cfa pour
impulser la croissance. Il y a deux omissions graves dans ce type de raisonnement d’abord. Le taux de change nominal entre l’euro et le dollar a suivi une «courbe en U», l’euro s’est dépréciée dans un premier temps (1999 et 2000) pour s’apprécier ensuite (2003). La deuxième omission est que l’Europe est notre principal partenaire commercial.
Cela empêche le risque de change et de commission. Un autre palliatif est proposé : le rattachement à un panier de monnaies constitué par les monnaies des principaux partenaires. Toutefois, cette modalité n’établit
en rien une liaison économique rationnelle entre le taux de change et les «fondamentaux» de l’économie. Pour l’histoire, le Malawi est le premier pays africain, en 1973, à rattacher sa monnaie à un panier comprenant la livre sterling, le dollar et le Dts. Il fut suivi de la Mauritanie en 1975, du Kenya, de la Guinée, de l’Ouganda et de la Tanzanie. Aucun pays, sauf le Nigeria pour une brève période, n’a appliqué le flottement (P. Jacquemot, Politique économique en Afrique).
Par ailleurs, la valeur externe future d’une monnaie rattachée à un panier de monnaies est forcément soumise à une plus grande incertitude.
*III/ Que faire des réserves de la Bceao qui ne sont pas oisives ?*
Les analyses sur ce point sont très partielles, car ces réserves sont brutes, donc il faut déduire le montant des usages obligatoires pour avoir les surplus (excédents, bénéfices) qui, placés auprès du Trésor public français (Compte d’opération), sont rémunérés au taux de fiscalité marginal de la Banque centrale européenne. Il semble apparaître un paradoxe seulement apparent entre les besoins de financement des Etats et les réserves substantielles de la Bceao. En réalité, cette question renvoie à deux interrogations, la première est de savoir si effectivement les réserves extérieures de la Bceao sont excessives et la seconde étant, si tel était le cas, comment tirer profit des excédents.
Théoriquement, le niveau des réserves d’une Banque centrale est apprécié selon des ratios clairement établis et qui sont de quatre ordres : (i) le taux de couverture de l’émission monétaire dont le niveau dépend des caractéristiques économiques et institutionnelles, il s’agit du respect d’un ratio des réserves rapportées à la masse monétaire. Il est à hauteur de 60%, il s’est fixé à 183% au Japon, à 53% en Corée et à 71%
en Thaïlande, ce taux est modifiable ; (ii) l’amortissement des risques de change face à la montée en puissance des forces du marché réel ou supposé, auquel cas les actions individuelles des Etats seraient
inopérantes suite à la spéculation financière ; (iii) la couverture des importations surtout incompressibles, ce ratio est de sept mois pour l’ensemble des pays qui ont des propensions vivrières, énergétiques et
de biens intermédiaires à importer très fortes, ce ratio est aussi modifiable, et enfin (iv) les avoirs (non rémunérés) déposés par un système bancaire caractérisé par sa surliquidité provenant de l’optimisation des profits sur le segment des crédits à court terme.
Ces quatre ratios conjugués montrent que le volume des réserves extérieures brutes est moins important que les chiffres faramineux avancés dans le débat. Il faut y soustraire le montant total des utilisations obligatoires, les dépôts du système bancaire et les accumulations d’arriérés extérieurs des Etats. On obtient un surplus
disponible au compte d’opération géré par le Trésor français. Ce surplus est rémunéré par un taux de placement supérieur à celui de l’Euribor, du Libor et à certains taux d’intérêt des obligations émises par les
Trésors publics des Etats membres. Si bien que le rendement des avoirs extérieurs de la Bceao accroît ses bénéfices, alors même qu’elle n’offre aucune rémunération aux banques primaires pour leurs dépôts obligatoires ou libres dans ses comptes.
Quelles sont les affections possibles de ces excédents (surplus ou bénéfices) ? Leur utilisation relève du Conseil des ministres de l’Uemoa (art 67 des statuts). Quatre scénarios d’emploi sont possibles : le premier pourrait être le transfert d’une partie aux Trésors publics des Etats membres. Cela reviendrait tout bonnement à faire des avances directes de la Banque centrale aux Trésors publics. Dans le passé, cette
pratique s’est avérée contreproductive, les ressources étant employées au règlement du déficit budgétaire ou investies dans le calendrier électoral. Le second scénario serait la répartition des excédents aux
Etats membres au prorata de leurs apports respectifs dans les avoirs extérieurs. Dans ce cas de figure, la Côte-d’Ivoire et le Sénégal raflent la mise, certains pays auront des parts modestes et d’autres
pourraient ne rien avoir. Le troisième scénario serait l’Emission d’obligations publi¬ques, soit à la diligence des Etats ou celle de la Commission de l’Uemoa pour financer par exemple le Programme économique
régional (Per) en vue de consolider la gouvernance et approfondir l’intégration par le développement des infrastructures économiques, des investissements productifs dans des projets intégrateurs, la promotion
des ressources humaines, les innovations et la recherche. Le quatrième scénario pourrait être l’affectation d’une partie des ressources excédentaires à la Boad qui emprunte sur les marchés financiers internationaux pour prêter aux Etats membres.
*IV/ Les réformes institutionnelles et de gouvernance de la Bceao : de nouvelles attributions dans la perspective d’une Banque centrale indépendante.*
La principale mission de la Bceao, prêteur en dernier ressort, demeure toujours de garantir la stabilité de la monnaie avec de nombreuses règles prudentielles, d’assurer un certain niveau de liquidités pour
lutter contre l’inflation comme objectif central (contestée par les partisans de la free banking comme Mamadou Koulibaly). Depuis la sévère crise financière de 2007/2008, les Banques centrales ont de nouvelles attributions : booster l’économie, protéger les Etats par des taux directeurs très bas, injecter plus de liquidités afin d’inciter les banques à accroître les prêts. Ces fonctions prennent du relief pour un système bancaire caractérisé par une forte concentration de l’activité sur le court terme, l’absence de différenciation de l’offre bancaire (mêmes types de produits et de services), la présence de plus en plus affirmée de nos banques sur certains segments de marché bancaire (Marchés contestables avec entrée et sortie à moindre coût, Pape Diallo, Isf, Financial Afrik).
Ce système bancaire ne finance pas le long terme et sert des taux d’intérêt élevés. En évaluant la courbe des taux, les rendements à court terme sont de loin supérieurs à ceux à long terme, ce qui signifie que
les banques vont logiquement arbitrer en faveur des opérations de court terme (80 à 90%) au détriment de l’investissement productif (moins de 5% des crédits long terme). Seule la Bceao peut inverser cette courbe des taux pour faire que les rendements à long terme soient supérieurs à ceux du court terme. Dans ce sens, de multiples leviers existent. Par exemple établir une corrélation entre taux directeur et taux d’intérêt, exonérer les crédits d’investissements lourds de la Tob, réviser à la baisse ou éliminer même les réserves obligatoires des banques (nonobstant les recommandations de Bale 1, 2 et surtout 3). Toutes ces fonctions sont celles d’une Banque centrale indépendante bien qu’il soit vrai que la souveraineté de la Banque centrale ne soit pas inscrite dans les traditions monétaires en France et même en Europe. Cette option d’autonomie de la Bceao est réalisable progressivement par amélioration des organes d’audit, de contrôle interne de gestion et par révision de la réglementation bancaire en supprimant les multiples protections
dissuasives. Le Sénégal, de par sa stabilité, pourrait abriter des «banques offshore» (Le premier Président sénégalais de la Chambre de commerce, Issa Diop, avait fait la proposition au Président Senghor dans les années 70).
*V/ En conclusion : Ces réformes adaptatives peuvent être mises en relation avec la création d’un ordre monétaire régional dans un espace caractérisé par un morcellement des monnaies.* Ces réformes à venir de la Zone franc peuvent être articulées aux propositions de création d’une monnaie unique de la Cedeao qui devrait définir de nouvelles règles de parité entre toutes les monnaies, des règles de convertibilité et des règles de gestion de la monnaie centrale (Kassé, Pour un système monétaire régional, 1994). La constitution de la monnaie unique de la Cedeao reportée à 2020 est un véritable serpent de mer, car depuis l’élaboration de la stratégie «Approche accélérée de l‘intégration» formulée en décembre 1999 à Lomé, les échéances sont toujours ajournées.
D’initiative en initiative, la stratégie tarde à se matérialiser à cause des difficultés d’instaurer des mécanismes de convergence économique et d’harmonisation budgétaire et fiscale. Cette limite a conduit au blocage
de la première phase relative à la création de la seconde zone au sein de la Cedeao, dénommée Zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest (Zmao), censée regrouper des pays à indépendance monétaire, mais fortement asymétriques (Nigeria, Ghana, Guinée, Sierra Leone, Gambie). Les reports successifs du lancement de cette zone ont alimenté le doute quant à la volonté politique des Etats de la Zmao d’aller, comme prévu, à la création et à la fusion de différents mécanismes monétaires avec ceux de
l’Uemoa pour former l’union monétaire de la Cedeao. Malgré l’établissement de la feuille de route, les progrès sont faibles et l’échéance projetée à 2020 restera encore incertaine.
SourceProfesseur Moustapha Kassé, Doyen Honoraire de la Faseg