DAKAR, Les députés maliens ont nommé les membres de la Haute Cour de justice, habilitée à juger les ex-chefs d’Etat et susceptible d’être saisie de poursuites contre l’ex-président Amadou Toumani Touré réfugié au Sénégal, selon des sources parlementaires jointes vendredi depuis Dakar.
"Les membres de la Haute Cour de justice ont été nommés lundi (le 10 mars), il y a 18 membres en tout : neuf titulaires et neuf suppléants", a affirmé à l’AFP une première source jointe à l’Assemblée nationale malienne depuis Dakar.
Les 18 députés choisis sont issus des cinq groupes parlementaires de l’Assemblée nationale (quatre de la majorité présidentielle, un de l’opposition), selon leur liste consultée par l’AFP.
"La Haute Cour de justice est compétente pour juger les présidents de la République et ministres ainsi que les ex-présidents ou ex-ministres mis en accusation devant elle pour des crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions", a précisé une autre source parlementaire.
"Mais pour qu’elle commence à travailler, il faut attendre qu’elle soit saisie officiellement. (...) Les juges doivent prêter serment devant l’Assemblée nationale avant d’entrer en fonction", ce qui n’était pas encore le cas jusqu’à vendredi, a ajouté la même source.
Amadou Toumani Touré, surnommé "ATT", est en exil depuis près de deux ans à Dakar. Il est menacé d’un procès pour "haute trahison" par le régime de l’actuel président malien, Ibrahim Boubacar Keïta.
Le 24 janvier, le gouvernement sénégalais avait cependant indiqué ne pas avoir été saisi de poursuites le concernant. "Aucun mandat d’arrêt n’a été lancé" contre lui, avait déclaré le ministre sénégalais des Affaires étrangères, Mankeur Ndiaye.
Le 27 décembre 2013, le gouvernement malien avait annoncé dans un
communiqué avoir saisi l’Assemblée nationale" pour que la Haute Cour de justice engage des poursuites pour "des faits susceptibles d’être retenus contre Amadou Toumani Touré, ancien président de la République, pour haute trahison".
Bamako l’a notamment mis en cause pour avoir, pendant son mandat, laissé le Nord du Mali tomber aux mains de groupes armés, incluant des rebelles touareg et des jihadistes liés à Al-Qaïda qui ont pris le contrôle de cette vaste région pendant près de dix mois entre 2012 et 2013.
Les jihadistes ont été en grande partie chassés par une intervention militaire déclenchée en janvier 2013 par la France, ensuite rejointe par des troupes de plusieurs pays. Cette opération est toujours en cours.
Général à la retraite élu président du Mali en 2002, puis réélu en 2007, Amadou Toumani Touré a été renversé le 22 mars 2012 par des militaires qui l’accusaient d’incurie dans la lutte contre les groupes armés dans le Nord. Le coup d’Etat a précipité la chute de cette vaste région aux mains des rebelles.
M. Touré a ensuite formellement démissionné le 8 avril 2012. Quatre jours plus tard, un président de transition a été installé et onze jours plus tard, l’ex-président a quitté Bamako avec sa famille pour Dakar, où il vit depuis lors.