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Publication - "Le Sénégal: Chronique d’une alternance de braises": Mamadou Ibra Kane ressasse les braises de l’alternance
Publié le lundi 26 decembre 2016  |  Sud Quotidien




Le journaliste Mamoudou Ibra Kane dédicacera au mois de janvier prochain son livre «Le Sénégal : chroniques d’une alternance de braises», Dans ce livre, le journaliste a rassemblé plusieurs de ses chroniques faites avant et durant la deuxième alternance politique au Sénégal. Publié aux Editions Feu de Brousse, le livre reflète la vision de Mamoudou Ibra Kane. C’est «l’analyse critique, des chroniques fortes, profondes, engagées et scrutant avant les acteurs arrivés au sommet de l’Etat, l’horizon d’un pays que les intrigues, les trames, les faits, les coalitions, les trahisons, les machiavélismes politiques, ont, sous nos yeux, coloré pour nous», pour reprendre les mots de l’éditeur.

MACKY SALL SUR L’AUTEL DU SACRIFICE LIBERAL

C’est ton tour mon «frère» ! Dans cette chronique datant de novembre 2007, le journaliste Mamoudou Ibra Kane revient sur le début du différend entre le président de l’Assemblée nationale de l’époque, Macky Sall, et le régime libéral. «Pour Macky Sall, ces mots, terribles comme la sentence qui frappe un condamné à mort, pouvaient sortir de toutes les bouches sauf certainement de celle d’Abdou Fall. Oh que si ! C’est juste un conseil de «frère». Et puis, c’est mal connaître Abdou Fall. Il est, depuis qu’il a fondu sa CDS dans le PDS, l’un des exécuteurs les plus froids de Wade. De la Wadésie», raconte le chroniqueur. Dans cette dualité qui avait finalement abouti à «museler» Macky Sall, Mamoudou Ibra Kane assimile le sort de l’actuel président de la République à celui d’Idrissa Seck. «Dualité. Ça ne vous rappelle pas quelqu’un ça ? Mais, pourquoi pensez-vous à Idrissa Seck ? Vous l’avez compris : Macky-Idy, même chef d’accusation, même sentence. Argument massue de celui qui porte la parole du Maître : Dans des circonstances de dualité, il faut que l’autorité du chef de l’Etat soit restaurée», soutient-il.

ABDOU FALL, L’EXECUTEUR

Allant plus loin, le journaliste évoque que l’opposition à l’époque qui voulait sonner la fin de la récréation n’y pouvait rien comme en témoigne ce passage. «En tous les cas, l’opposition regroupée au sein du Front Siggil Sénégal, si tant est qu’elle ambitionne sérieusement de mettre fin au régime de Wade, aurait tort de croire qu’elle n’a pas à se mêler de «querelles familiales libérales». Ce qui était jusqu’ici une affaire interne au PDS, association privée comme toute autre, est en train de dériver dangereusement vers une crise institutionnelle. Et malheureusement, ce n’est pas avec cette opposition qui ne veut pas «casser des bus» -mais qui lui a demandé de les caillasser d’ailleurs ?- qui arrêtera la dérive ».

Toujours, selon Mamoudou Ibra Kane, «le dérèglement institutionnel qui a vu adopter en Conseil des ministres un projet de loi portant dissolution du Conseil de la République pour les Affaires économiques et sociales (CRAES) et synonyme, une fois voté par l’Assemblée nationale, de destitution du président de cette institution, en l’occurrence Me Mbaye Jacques Diop», c’est ce même dérèglement institutionnel qui va avoir raison du président de l’Assemblée nationale. «Démissionnez, Monsieur le Président!» Tel est l’ordre qui avait été donné à Me Mbaye Jacques DIOP par le président de la République dans une lettre dont l’existence n’a jamais été démentie». Pour lui, «c’est le même ordre, pour peu qu’on sache lire entre les lignes, qui est donné ainsi à Macky Sall par le chef de l’Etat par la voix détournée d’Abdou Fall. Le président de la République ne pouvant pas, au terme de la Constitution, dissoudre une Assemblée nationale qui n’a pas encore deux ans d’existence, sauf si, au sens de la Loi fondamentale, la même Assemblée votait une motion de censure contre le gouvernement- ce que ne ferait jamais Macky Sall à moins qu’il ne soit frappé de cécité politique et ne veuille se faire hara kiri».

MACKY ET IDY, SIMILITUDES

Le journaliste a également trouvé des traits similaires entre les sorts de Macky et Idy. «Entre Idrissa Seck, le maire de Thiès et Macky Sall, le maire de Fatick -il y a tellement de dénominateurs communs entre les deux ! L’un et l’autre ont été Premier ministre avec des fortunes diverses. L’un et l’autre ont été Directeurs de campagne victorieux tous les deux, de Wade. Le premier nommé a été numéro deux du PDS et le second l’est encore (jusqu’à quand ?) Autant de similitudes entre les deux hommes qu’on est tenté de croire qu’ils ont le même destin. Un destin de sacrifiés, sauf volonté divine contraire mettant un terme au cours actuel des choses pour le président de l’Assemblée nationale. A-t-on encore besoin de se demander : demain à qui le tour ? La réponse coule pourtant de source. Demain, ce sera le tour de tous ceux et celles qui se trouveront au mauvais endroit au mauvais moment, -on n’a plus besoin surtout de le déclarer- si on est tant soit peu soupçonné, seulement soupçonné disons-nous, de barrer la fameuse route dont on dit, à tort ou à raison, qu’elle est en train d’être méthodiquement tracée pour le fils du Président. (…) ».

KARIM WADE «EN ROUTE VERS LE SOMMET»

Maintenant, «l’agenda caché». Pour cette chronique qui remonte en mars 2008, le journaliste parle du début du pouvoir de Karim Wade. Selon lui, tout est parti du 11ème sommet de l’OCI que Wade fils avait dirigé. «Maintenant, confie un proche et homme de confiance du fils du Président de la République, nous allons dérouler l’agenda caché. Et cet agenda caché n’est rien d’autre que la marche du leader de la Génération du Concret vers… un autre Sommet : le Sommet du pouvoir. Y arrivera-t-il ? Y arriveront-ils, les WADE et leurs amis ?». Pourtant, ici il cite l’exemple du fils de l’ancien président ivoirien, Michel Gbagbo qui n’avait pas comme ambition de devenir président de la République en pensant que Karim devrait en s’inspirer. «Mes ambitions sont au nombre de quatre, je voulais d’abord être docteur en psychologie, écrire des livres, ensuite être sénateur de la Jeune Chambre Internationale et enfin être député», disait le fils de Gbagbo.

Pour le journaliste, «Point de «Président de la République» dans les ambitions politiques de l’Ivoirien Michel Gbagbo ! Loin de nous l’idée de dire que le «cousin sénégalais», Karim (Wade) devrait nécessairement s’inspirer de l’exemple du «cousin ivoirien», Michel (Gbagbo). Mais, c’est le cas de le dire : le fils du Président Gbagbo ne manque pas de lucidité politique. (…) ». Et même si le fils de Wade avait des ambitions de devenir Président de la République, il a été emprisonné avec la chute du régime libérale. «Après la défaite de son père Abdoulaye Wade, battu par un de ses fils «d’emprunt» Macky Sall, Karim WADE purge une peine de six ans de prison ferme, dans le cadre de la traque des “biens mal acquis».

«IL EST MIDI, IDY !»

Quant à cette chronique qui remonte en janvier 2009, Mamoudou Ibra Kane parle du cas d’Idrissa Seck en évoquant ces hypothèses. Pour la première, «considérons que Seck soit tombé dans le piège tendu par Wade avec comme objectif pour le chef de l’Etat, de discréditer définitivement son ancien directeur de cabinet. De nombreux arguments militent en faveur d’une telle hypothèse. L’étonnant silence cette fois-ci du Président, à l’issue du face à face de lundi, est en fait un changement de stratégie pas du tout innocent. En laissant Idy aller devant les caméras, donc à Canossa pour annoncer lui-même les retrouvailles, Wade pourra toujours dire en cas d’échec : «Je n'ai jamais parlé de retrouvailles». Une façon bien adroite de s’arroger le beau rôle. «Autre argument renforçant cette hypothèse, les réactions anti-Idy enregistrées au lendemain de l’annonce en grande pompe du remariage. Des réactions venant particulièrement de responsables de la «Génération du concret» et qui laissent penser à un téléguidage portant la signature de Karim Wade, même si le fils du Président, à l’image de son père, se garde bien de parler pour le moment, préférant la posture confortable du tireur de ficelles. Mais de tous ces arguments, l’échec des négociations sur l’alliance électorale en vue des locales du 22 mars parait le plus solide».

La deuxième hypothèse tiendrait aux «limites même de la première. Le risque, voire la peur de perdre prématurément le pouvoir, c’est-à-dire bien avant les «50 ans» promis, cette peur bleue comme la couleur préférée de «Wade family», peut, au nom de la realpolitik, pousser le père à chercher à recoller les morceaux d’une famille éclatée en mille. L’histoire de «Diouf family» en 2000 est là pour attester du risque encouru, surtout au regard de la dynamique unitaire d’une opposition revigorée et faisant dans la devise des trois mousquetaires : «Un pour tous» et «Tous pour un». Et si seulement Maître Wade, fin calculateur, s’était rendu compte que le poids supposé ou réel de la «Génération du concret» que conduit son fils, n’était pas en mesure de compenser ni les dégâts immanquablement causés par le départ de Macky Sall, ni la mise à la touche d’Idrissa Seck, en dépit de son jeu de yo-yo qui a fini par agacer une bonne partie de l’opinion».
Et la troisième et dernière hypothèse consisterait en «l’existence d’un deal qui pourrait dépasser les locales du 22 mars pour couvrir une perspective plus étendue. Un investissement à long terme qui pourrait avoir comme soubassement une réforme institutionnelle permettant à la famille libérale de conserver le pouvoir».
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