Oubliées, à tort ou à raison, du fait du conflit en Casamance, les populations du Fogny vivent le martyre. L’enclavement, tout comme la quasi-absence d’infrastructures socio-économiques de base, constitue le goulot d’étranglement à partir duquel naissent toutes les difficultés que vit cette partie du département de Bignona. Avec l’accalmie en cours, les populations entendent ouvrir le front du développement.
Petit Koulaye, le 03 décembre dernier. Il est midi passé de quelques minutes. Le récital de Coran organisé par les imans, sages, responsables de femmes et de jeunes d’une cinquante de villages qui composent le Fogny Sud, cette partie du département de Bignona comprise entre la commune de Oulampane, celle de Tenghory et de Bignona, vient à peine de s’achever, lorsqu’arrive le Député- Maire de Bignona. Quelques conciliabules, puis, tous se dirigent vers la grande place de ce village qui, selon certains, constitue la porte d’entrée de l’islam dans le département de Bignona. Situé à une quinzaine de kilomètres de la commune de Bignona, Petit Koulaye fut le premier village du département de Bignona à étrenner une mosquée, souffle-t-on. La grande place du village où tous se sont retrouvés se transforme très vite en un lieu de « lamentations ».
Sur toutes les lèvres, l’enclavement, l’accès à l’eau et à l’électricité. « Pour être un bon musulman, il faut d’abord disposer de l’eau. Mais notre sur-priorité demeure la réalisation de l’ancienne route coloniale appelée route de Sédhiou. Cette route qui va du quartier Bassène à Bignona et qui débouche sur la RN4 en passant par des villages comme Petit Koulaye, Bougoutoum, Mampalago, Nioroki et Koulikan », explique Arfang Bacary Sané, le représentant des Imams de la commune de Tenghory, à quelques encablures de Bignona. « Cette route est impraticable. Alors que cette zone du département de Bignona renferme d’énormes potentialités. Nous avons un sérieux problème de conservation et d’écoulement des produits. Les pertes sont inestimables. Les femmes enceintes tout comme les malades sont évacués, la plupart du temps, en charrette », ajoute le représentant des sages, Vieux Arouna Sané.
Selon Lamine Manga, le chef de village du Koulaye Petit, il faut 4 heures de temps pour rallier Bignona sur cette route distante seulement de 47 kilomètres. Lamine Manga, qui déplore l’absence d’électricité, estime que l’obscurité dans laquelle les populations se retrouvent à la fin de chaque jour crée forcément l’insécurité. « Le vol de bétail est récurrent. Nous n’osons pas sortir la nuit, même si on entend un bruit dans nos enclos, de peur de faire l’objet d’agression », déplore le chef du village.
Au-delà du Fogny Sud, c’est tout le Fogny, cette partie du département de Bignona plus vaste que celui de Ziguinchor pour ne pas dire d’Oussouye, qui a souffert le martyre du fait de la crise en Casamance et qui, aujourd’hui, manque de presque tout. Les populations vivent dans une situation « écœurante », dans une « pauvreté qui déshonore l’humain », regrette le Député Maire de Bignona. Selon Mamadou Lamine Keita, qui a pris l’engagement ferme de porter le plaidoyer à qui de droit, si nous voulons combattre la pauvreté, il faut valoriser tout cet énorme potentiel qui existe au Fogny. « Qu’on ne trompe personne ! On ne peut pas se développer sans routes, sans pistes et sans eau. On ne peut pas mettre en valeur le potentiel économique en Casamance sans eau, ni routes encore moins sans électricité. Je porterai le combat, ensemble avec vous », promet-il.