Bien des chantiers entamés dans le secteur des arts ont abouti sous le magistère de Macky Sall. Mais peu d’initiatives ont été prises par le régime actuel jusque dernièrement. En une année, Macky Sall a fait plus que durant ses trois ans passés à la tête de l’Etat. A quelle fin ? Quoi qu’il en soit, l’opération de charme est trop flagrante.
‘’C’est avec un plaisir tout particulier que je me joins à vous au milieu de tant d’esprits brillants des arts, des lettres et de la culture. J’ai tenu à être avec vous pour marquer tout l’intérêt que revêt pour moi cet évènement. Tout à fait à côté se tient le Salon international des mines, dont je devais présider la cérémonie d’ouverture et j’ai dû faire un arbitrage en y dépêchant le premier ministre. Paradoxe ! me diraient certains pour le géologue que je suis. Que non ! serais-je tenté de répondre parce que la culture est au début et à la fin de tout. La culture, c’est l’alpha et l’oméga. La culture, c’est l’homme intégral’’. Ainsi s’exprimait, le 8 novembre dernier, le président de la République Macky Sall. C’était à l’occasion de la cérémonie officielle de la commémoration du cinquantenaire du premier festival mondial des arts nègres (Fesman). Seulement, ce que Macky Sall n’a pas dit, c’est qu’au-delà du fait qu’il soit géologue, son choix intrigue parce qu’au début de son mandat, le Président ne semblait pas trop intéressé par la culture.
Dans le programme qu’il a présenté lors de sa campagne présidentielle, on n’y parle presque pas de culture. Idem, dans les discours à la Nation. Cependant, rien qu’en cette année 2016, le chef de l’Etat a fait pour la culture ou promis des choses plus qu’il ne l’a fait pendant ces 3 dernières années. En effet, en fin janvier dernier, il avait reçu des acteurs culturels, triés sur le volet, au Palais, au cours d’un déjeuner. C’était la première fois depuis son accession au pouvoir, qu’il recevait exclusivement le monde de la culture. Lors de cette rencontre, il a annoncé la création du Fonds de développement des cultures urbaines à l’image de celui de promotion de l’industrie cinématographique et audiovisuelle (Fopica). Il leur promet alors une première allocation de 300 millions de F Cfa.
A ce déjeuner étaient présents Malal Talla dit Fou Malade, Simon, Matador, etc. A l’époque, les gens ont pensé à une volonté de soutenir de jeunes entrepreneurs avec des projets porteurs. Seulement, aujourd’hui avec un soudain regain d’intérêt manifesté dans divers secteurs, c’est à se demander s’il n’y a pas anguille sous roche. Non, nous dit une source qui a requis l’anonymat. ‘’C’est juste qu’il comprend mieux les enjeux de la culture. Car c’est un secteur qui fait rentrer beaucoup d’argent, qu’on le dise ou pas, grâce aux projets. La fondation Ford, par exemple, a mis beaucoup de millions dans un projet qui la lie à l’île de Gorée. L’Unesco aussi a investi beaucoup dans le secteur des arts’’, croit-il savoir. Un autre acteur culturel interrogé est du même avis. Pour lui, le Président Sall a toujours su que la culture était importante.
‘’Guerre politique’’
Cependant, leur avis n’est pas partagé par tous. Un autre fonctionnaire du ministère de la Culture et de la Communication pense que ce soudain attachement à ce secteur s’explique par une ‘’guerre politique’’. En effet, il est connu et reconnu et dans le milieu des arts que la mairie de Dakar investit beaucoup et bien dans la culture. ‘’Les projets de Khalifa Sall marchent très bien et sont salués par les acteurs. La politique culturelle de la ville de Dakar est citée en exemple partout en Afrique et même en Europe’’, fait-il savoir. Ce qui n’arrangerait pas le Président Sall.
Surtout que l’édile de Dakar est présenté comme l’un de ses potentiels solides adversaires politiques. Aussi, l’élection présidentielle s’approche. Les artistes font partie de l’électorat en sus de pouvoir en attirer. Il est toujours mieux de les avoir de son bord que comme opposants. Quoi de mieux dans ce cas qu’une meilleure considération de ces derniers. Macky Sall semble l’avoir bien compris. Car, après le Fonds de développement aux cultures urbaines qui sera d’ailleurs effectif en mars prochain, il a signé dans un délai record le décret d’accord d’un agrément à la Sénégalaise du droit d’auteur et du droit voisin (Sodav).
Il avait promis aux artistes de le faire quand il les a reçus alors que cela faisait plus d’un an qu’ils attendaient ladite signature. En outre, ces derniers ont dû attendre près de dix mois pour voir la passation de service avec le défunt Bureau sénégalais du droit d’auteur (BSDA) se faire.
Les acteurs culturels ont d’autres raisons de montrer leur satisfecit au Président même s’il reste beaucoup de choses à faire. Aujourd’hui, Macky Sall a promis de doubler la somme allouée au Fonds d’aide à l’édition qui passe ainsi de 250 millions à 500 millions de F CFA. A cela s’ajoute sa volonté d’organiser chaque année une rentrée solennelle des arts que lui-même présidera comme il l’a fait cette année à l’ouverture officielle de la Biennale des arts de Dakar. Ce fut sa première fois en tant que Président au dak’Art.
En attendant que cette rentrée se concrétise, un appel à candidatures est lancé pour le grand prix du président de la République pour les arts. Les distinctions doivent être remises normalement en début 2017.
Tout compte fait, l’on espère que le Président ira crescendo dans son opération de séduction en allant au-delà de l’animation de l’espace culturel et en faisant mieux que son prédécesseur dans la construction d’infrastructures.