Les populations du Fassagna composé de 42 villages dans la commune de Dialambéré sont coupées du reste du monde. Il n’y a pas de réseau téléphonique, malgré les injonctions du chef de l’Etat de connecter tout le territoire. Elles n’ont aussi ni eau potable ni de collèges d’enseignement moyen. Reportage.
En ce 21e siècle, le réseau téléphonique n’est pas encore arrivé dans la zone du Fassagna. Et si l’on en croit les explications des opérateurs de téléphonie, la région n’est pas encore près d’être connectée au reste du monde. Une difficulté qui vient s’ajouter aux nombreuses autres difficultés qui plombent le développement des localités telles que Bassoum, Kandiator, Saré Lao, Saré Dicory, en passant par Sinthiang Samba Diabouding, Sinthiang Pathé.
Ici, le réseau de téléphonie mobile et internet continueront encore longtemps à être aux abonnés absents. Certains opérateurs mobiles interrogés expliquent que la zone, comme tant d’autres de la région, est très peu peuplée. Cet état de fait ne les incite pas à équiper ces localités qui ne seraient pas, selon eux, rentables. Ainsi, cette zone de la commune de Dialambéré n’est desservie par aucun réseau de téléphonie mobile ou internet. En dépit de l’injonction du président de la République à l’Artp, au mois de mai dernier, de couvrir tout le territoire national.
‘’Nous parcourons 7 km pour passer un appel’’
« Nous sommes dans un monde de concurrence. Donc, nous ne pouvons pas installer nos antennes dans une zone qui n’est pas peuplée, mais aussi où nous n’allons pas obtenir un bon nombre d’abonnés. Il n’y aura pas de rentabilité. C’est une perte énorme. Parce que nous débloquons des milliers de francs pour installer des antennes », explique un représentant d’opérateur de téléphonie mobile. Conséquences : les populations de cette contrée ont une vie « sans portable ni internet ».
« Même si tu possèdes un portable, un ordinateur et une clé USB, alors que ta zone n’est pas couverte par un réseau téléphonique, tu es considéré comme quelqu’un qui n’en possède pas. C’est ce que nous vivons ici », constate avec fatalisme Moussa Baldé, un habitant de Bassoum trouvé devant son domicile. Dans cette zone du Fassagna, il arrive d’assister à des scènes cocasses, lorsqu’il devient urgent de passer un appel. « Certains habitants comme moi, qui ont des portables, sont obligés de monter sur des arbres pour chercher le réseau. Ce qui n’est pas normal. Parce que tu peux tomber », regrette Sambel Baldé, habitant de Saré Lao. Son ami Abdoulaye Diao de renchérir : « Parfois, nous les jeunes, nous parcourons cinq (5) ou sept (7) kilomètres avant de capter suffisamment de réseau pour passer un coup de fil ». Cette situation, poursuit-il, est un véritable frein aux activités touristiques dans ces villages. ‘’Parce que c’est compliqué d’expliquer aux visiteurs qu’ils ne pourront pas passer un seul coup de fil avec leur portable.’’
Fassagna, une zone assoiffée
Dans cette contrée, les problèmes ne manquent pas. En dehors de l’absence du réseau de téléphonie, il y a aussi le manque d’eau potable. Dans ces 42 villages visités, il n’y a que des puits de 35 à 45 mètres qui fonctionnent. Dès le petit matin, les femmes et les enfants effectuent le trajet jusqu’au puits pour y chercher l’eau nécessaire à la famille. Ce liquide précieux, qui sert de boisson, à la cuisson des aliments et permet à toute la famille de faire sa toilette, constitue ici un enjeu majeur. La corvée d’eau dure toute la journée, dans un incessant va-et-vient. Ce combat, exclusivement mené par les femmes, donne une idée précise de la féminisation de la pauvreté.
Malgré cette vie de galère, elles se chamaillent, s’esclaffent, devisent tranquillement et naturellement avec les visiteurs qui ont du mal à comprendre comment elles supportent cette situation pénible et désagréable savamment masquée par des sourires larges et gentils pour accueillir leurs hôtes. A les voir puiser, faire la navette entre les concessions et les puits, on a l’impression qu’une malédiction est tombée sur elles. Ces braves femmes, qui parfois portent sur leur dos des bébés, sont obligées de faire ce trajet un nombre incalculable de fois, par jour.
Le manque d’eau n’est pas le seul fardeau qui pèse sur les populations du Fassagna. Dans la zone, la diarrhée fait partie du quotidien. L’eau est potable à la source, mais toute l’activité autour des puits laisse des traces. Des objets jetés par les enfants, des substances d’origine animale et des bactéries infectent les puits. « Nous nous réveillons à 5 heures du matin pour puiser de l’eau. Nous passons presque toute la journée au puits, jusqu’à 21 heures, pour pouvoir nous ravitailler en eau. Pourquoi ? Parce qu’à 7 heures du matin, nous nous affairons autour du petit-déjeuner pour la famille, lavons les enfants et nettoyons la cour. Nous utilisons aussi cette eau pour laver les ustensiles ayant permis de préparer le repas. Nous l’utilisons pour boire, pour faire la lessive et pour abreuver le bétail », déplore Coumba Baldé, porte-parle des femmes du Bassoum.
« Dans ces conditions, les personnes ne sont pas épargnées par la diarrhée, notamment nos enfants. Il y a aussi les maux de ventre, surtout en cette période de pluies », soutient Boubacar Baldé, chef de famille à Kandiator. L’autre problème qui mine le quotidien des populations de la zone, c’est aussi l’absence de collèges. Les écoliers sont obligés de rallier certaines communes du département de Kolda comme Dabo, Mampatim, etc. pour étudier. Ce qui impacte sur les résultats.