C’est une ‘’combattante inlassable’’ de la cause des femmes. La présidente de l’Association pour la promotion de la femme sénégalaise (Aprofes) a tourné le dos à la Fonction publique, le secteur hydraulique, pour être plus proche des communautés. Mme Binta Sarr consacre l’essentiel de son énergie intellectuelle et physique à ce groupe vulnérable aux préoccupations spécifiques. D’ailleurs, sa croisade pour le respect de la parité à Kaolack s’inscrit dans cette logique.
Binta Sarr est hydraulicienne de formation. La Présidente de l’Association pour la promotion de la femme sénégalaise (Aprofes), qui a fait 13 ans dans la Fonction publique sénégalaise, s’occupait des contrôles de programmes de forages, de puits, de routes et infrastructures (salles de classe), etc. en milieu rural pour le compte de l’Etat. Originaire de Kaolack, sa région natale, la formatrice en leadership, plaidoyer, a débuté ses études supérieures à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) dans les années 80. Avant d’aller au Burkina Faso pour se spécialiser dans le domaine hydraulique. Bénéficiaire d’une bourse d’étude, issue d’une famille modeste, cette mère de famille s’est envolée aux Etats-Unis. Où elle a suivi plusieurs formations : développement institutionnel, renforcement des capacités des Ong, leadership etc. Riche est le parcours académique de cette dame qui, à ses débuts, a demandé la disponibilité pour aller œuvrer dans le secteur des Ong. Alors qu’elle était pourtant chef de service régional du bureau des aménagements des infrastructures hydrauliques et agricoles de sa localité.
Mme Binta Sarr se dit ‘’impressionnée’’ par la capacité de mobilisation des femmes en milieu rural, de même qu’urbain. Et elle porte en bandoulière la cause de cette couche ‘’vulnérable’’. C’est son combat au quotidien. «Les femmes se mobilisent tout le temps pour la communauté. La synergie et la solidarité existent entre elles. Et je pense que nous avons là des opportunités à exploiter pour faire avancer le Sénégal.
D’ailleurs, c’est une des raisons pour lesquelles j’ai quitté le service public pour être beaucoup plus proche des communautés, m’impliquer pour l’émergence d’une nouvelle génération de femmes leaders», motive-t-elle, timbre vocal pesé, verbe bien maîtrisé. Aujourd’hui, elle est à la tête de l’Aprofes qui regroupe au total 105 groupements (65 en milieu rural et 40 dans la ville de Kaolack) et un réseau de 12 villages situés à Mboss. Son Ong intervient dans la promotion des droits de la femme, leur accès aux ressources productives, la participation aux sphères de prise de décisions, la réduction de la pauvreté, la lutte contre la violence faite aux femmes…
Mme Binta Sarr et son équipe sont dans une perspective d’entrepreneuriat communautaire agricole. Cette ambition vise la sécurité et la souveraineté alimentaire. En outre, le souhait ‘’ardent’’ de cette native du bassin arachidier, c’est de voir les jeunes, notamment les filles, prendre le relais pour assumer les défis liés à la promotion des droits des femmes. Sur le leadership féminin au Sénégal, elle relève que des pas de géant ont été notés. Avec le recul, la militante de la cause féminine savoure : ‘’Rien que la loi sur la parité est un progrès important par rapport aux autres pays africains. Si vous allez au Niger, les gens parlent de quota.
Au Mali, le code de la famille pose problème, parce qu’il y a des discussions pour légiférer. Alors qu’au Sénégal, on a un environnement juridique favorable à la promotion des droits des femmes.’’ Avant de plaider pour l’application effective des textes qui existent au grand bonheur de cette couche de la société. D’ailleurs, pour non-respect de la parité au niveau de la commune de Kaolack, la présidente de l’Aprofes a déjà engagé une croisade dont la finalité est de rétablir les femmes dans leurs droits. Dépitée par cette violation des textes, elle s’indigne : ‘’La parité figure dans la Constitution. Malheureusement, les femmes qui sont arrivées au niveau des conseils municipaux, départementaux, ne se retrouvent pas dans les instances de prise de décisions. Au niveau de notre commune, à part le maire, il y a une seule femme au niveau du bureau, c'est-à-dire huit membres dont une seule femme.’’
Adama Gaye : ‘’Mme Binta Sarr comble le vide à Kaolack’’
Devant cette violation manifeste de la loi, Mme Binta Sarr et ses camarades ont introduit une plainte au niveau de la Cour d’appel de leur localité. Mais ils ont été déboutés. Ils se sont rabattus sur la Cour suprême qui leur a donné raison. ‘’Actuellement, nous attendons que la mairie casse le bureau pour le respect de la parité. Malgré tout, nous continuons le combat’’, poursuit-elle. Selon la responsable du Point d’écoute de l’Aprofes, branche qui lutte contre toute forme de violence faite aux femmes et aux filles, Mme Binta Sarr a un ‘’leadership international’’.
‘’Elle a laissé les avantages qu’elle avait dans le secteur public pour venir œuvrer au nom des femmes. Depuis 1987, nous cheminons ensemble dans cette logique. Nous sommes présents au niveau international, dans la sous-région’’, glisse Mme Ndèye Mbengue, louant les valeurs humaines de sa présidente qu’elle résume en ces termes : son ouverture d’esprit, sa capacité de consulter ses collaborateurs avant de prendre une décision qui engage l’Ong, sa forte capacité d’écoute, etc.
Le journaliste-consultant Adama Gaye est son camarade de promotion à l’école primaire. Il voit en elle une dame ‘’sociable, ouverte au monde, humble…’’. ‘’Je suis fier d'elle. Mais, je suis loin d’être surpris. Elle était ma camarade de classe à l'école primaire de Kassaville, à Kaolack. Elle a toujours été ainsi, brillante et impliquée dans les bonnes causes. Elle est au service de notre ville où elle comble le vide.’’