Le Président turc est décidé à expurger son pays de toute influence güléniste. Depuis le 23 septembre dernier, tous les étudiants inscrits dans les universités appartenant au prédicateur sont persona non grata en Turquie. C’est le calvaire et l’angoisse.
L’aéroport d’Istanbul est le terminus des rêves de plusieurs centaines d’étudiants originaires de plusieurs pays. Les images insoutenables de ces jeunes, parqués dans une salle d’attente, dans l’angoisse, sont la preuve de la répression en cours en Turquie depuis le coup d’Etat avorté du 15 juillet dernier. Considérant Fethullah Gülen comme le commanditaire du putsch, les autorités turques ont fermé les 15 universités ainsi que des centaines d’autres établissements qui appartiennent à son mouvement. Lequel a étalé ses tentacules dans les différents secteurs du pays. Pis, elles ont pris une décision le 23 septembre interdisant l’accès au territoire à tous les ex-pensionnaires de ces établissements. Par exemple, Fatih University compte 102 nationalités. Ce chiffre donne une idée sur l’ampleur de la mesure. Plusieurs témoignages recueillis montrent que la situation est loin de connaître une accalmie à cause de la détermination du Président turc à démanteler l’empire Gülen.
Depuis cette date, la police des frontières et de l’immigration est sur les dents pour traquer les «traitres» et les «sympathisants» du prédicateur qui vit en exil aux Etats-Unis. Le service «Arrivée» de l’aéroport d’Istanbul est le terminal de leur voyage. Ils sont arrêtés, interrogés et remis dans le prochain vol après plusieurs jours d’attente... L’interrogatoire se porte sur les liens supposés avec le mouvement güléniste. De toute façon, les flics disposent de toutes les observations par le biais de la carte de séjour qui est un véritable mouchard, car elle donne les indications précises sur l’université d’appartenance de l’étudiant contrôlé. Même s’il dispose d’une réinscription dans une université publique. Parmi les étudiants expulsés, il y a dans ce lot ceux qui avaient réussi à obtenir un transfert dans les établissements publics turcs. Mais ce passé dans le «giron güléniste» est un délit que les autorités ne sont pas prêtes à oublier dans la guerre qu’elles livrent au fondateur du Hizmet. Cet arrangement fait avec les autorités sénégalaises ne tient pas en constatant ses faits et en analysant la volonté d’Ankara de nettoyer toute présence et influence güléniste sur son territoire.
Aujourd’hui, les étudiants, bloqués à l’aéroport, semblent être les plus chanceux. Ceux qui sont entrés sur le sol turc avant la décision du 23 septembre vivent reclus chez eux et sont dans l’impossibilité de s’inscrire dans les universités publiques. Même s’ils réussissent à le faire, ils doivent signaler cette modification au service de l’immigration turque pour une actualisation de leur carte de séjour. Et inévitablement, ils seront rapatriés. Depuis quelques jours, certains ont décidé de rentrer volontairement et devront s’acquitter de pénalités pour séjour irrégulier. Dans ce cadre, trois étudiants sénégalais devront quitter Istanbul lundi pour rallier Dakar. Ils font partie de la cinquantaine de compatriotes qui sont en instance d’expulsion, comme l’a révélé Le Quotidien dans son édition du jeudi.
Cette «dégülénisation» forcée de la société turque touche tous les secteurs et affecte d’autres pays qui étaient au cœur du système du prédicateur vivant en exil aux Etats-Unis. Cette situation de tension découle du coup d’Etat avorté suivi d’une purge dans les tous les secteurs. En trois semaines, il y a eu 60 mille limogeages, 26 mille gardes à vue et au moins 13 mille 419 détentions préventives et l’Armée a perdu la moitié de ses généraux. Véritable chasse à l’homme.