La rentrée scolaire 2016/2017 est prévue ce jour, avec le démarrage des enseignements. C’est le fameux «Ubbi Tey Jàng Tey». Certains établissements seront au rendez-vous, d’autres vont devoir attendre à cause des classes inondées et les mauvais herbes. Les autorités ministérielles feront certainement leur show pour faire croire qu’elles ont matérialisé le concept de Ubbi Tey Jàng Tey». Choisissant ainsi la politique de l’autruche, à côté du vrai sujet de préoccupation, qui n’est pas le démarrage des enseignements, mais la perturbation des cours par les grèves cycliques. Et face au non respect des accords par le gouvernement du Sénégal, les syndicats des enseignants risquent de remettre ça. Ce qui est une forte probabilité. Les parents d’élèves doivent alors s’attendre, sans fatalisme aucun, à ces perturbations, parce que le ver est dans le fruit, du fait du comportement d’un gouvernement qui ne semble pas faire de l’école une priorité.
En plus, notre école est mal barrée, puisqu’en cette année électorale, les autorités n’auront d’oreilles que pour les élections législatives de 2017. Sans langue de bois, il faut alors s’attendre au pire.
MATERIALISATION DES ACCORDS : La seule voie d’une année apaisée
L’année scolaire 2016/2017 est marquée encore par des déclarations d’intention des principaux acteurs du système. Etat et Syndicats d’enseignements veulent repartir sur de nouvelles bases pour une année scolaire apaisée. Toutefois, la matérialisation de ces déclarations d’intention se heurte à des facteurs. Les syndicats veulent la matérialisation des accords, seule voie d’une année apaisée, alors que l’Etat parle d’incidences financières demandant aux enseignants de s’armer de patience.
Que vaut la rencontre de Saly ?
Dans ce sens les différents acteurs s’étaient donnés rendez-vous à Saly pour discuter. Une initiative heureuse, mais que le Cusems juge tardive, estimant que les vacances pouvaient être mises à profit pour régler tous les problèmes, au lieu d’attendre cinq jours avant la rentrée pour le faire. Le nouveau secrétaire général du Saemss Cusems, Saourou Sène estime que «c’est dans ce contexte assez lourd de conséquences que l’année scolaire 2016/17 démarre. La plaie est très profonde, il y a une frustration pour ces enseignants qui n’avaient de tort que de demander l’application d’accords signés depuis le 17 février 2014».
Il rappelle les attentes des syndicats par rapport aux engagements et accords signés en 2014 : «il y a des attentes très fortes qui concernent l’application correcte des passerelles professionnelles. Ce qui est en train d’être fait sur ce point précis des passerelles ne correspond pas à l’esprit du texte du décret qui a été signé».
L’autre élément sur lequel est attendu le gouvernement, c’est surtout l’institution du corps des administrateurs scolaires, tout comme le système de rémunération des agents de la fonction publique du Sénégal. Ce dernier point a fait l’objet d’une étude commanditée par l’État lui-même, réalisée par le cabinet MGP/ Afrique et dont les conclusions ont révélé, selon Abdoulaye Ndoye du Cusems, «une iniquité et des injustices criardes».
Ce qui fait dire au tout nouveau secrétaire général du Saemss/cusems «qu’il est important pour les enseignants et le gouvernement de comprendre que ce pays-là est notre pays à nous tous. Nous voulons le voir émerger et se développer».
Le Cusems également pense que la pacification de l’espace scolaire dépendra de la matérialisation des accords déjà signés. Selon son secrétaire général, Abdoulaye Ndoye, «la paix ne se décrète pas et que les causes fondamentales des perturbations dans l’espace scolaire sont liées au non-respect des accords que le gouvernement a signés avec les syndicats, notamment ceux de février 2014, les procès-verbaux de 2015 et les décisions du Chef de l’État ». Sur un ton ferme, Ndoye rappelle que l’accord est la fin d’un processus, donc ne doit pas faire l’objet de négociations. «Il faut vider le passif, car la violation des accords signés installe le système dans un cycle infernal perturbations», à en croire le responsable du CUSEMS. Il précise que «l’injustice est le lit de la violence.
Tous les enseignants sont victimes d’injustice, notamment sur l’alignement de l’indemnité de logement qui est une revendication centrale pour le CUSEMS et qui a fait l’objet d’un accord et suivi de l’étude citée plus haut et qui a révélé des inégalités et des injustices. Les discussions qui devaient suivre après partage des résultats de l’étude ne sont jusque-là pas tenues. Mais à la rencontre de Saly avec le haut conseil du dialogue social, le ministère de la fonction publique a annoncé que le nouveau système de rémunération des agents de l’État sera disponible à la fin de l’année 2016, estime M. Ndoye
Refusant d’être naïfs, les responsables du Cusems disent attendre l’État sur les actes , «car ce sont les actes qui jugent de la valeur des hommes et des institutions».
Dans le sillage de son collègue du Saemss, il rappelle la situation tragique de l’année dernière où le pire a été frôlé. «Les libertés syndicales ont été confisquées et où l’école sanctuaire des valeurs de la République et creuset de la citoyenneté, a été piétinée », soutient-il.
Dans ce contexte, le responsable syndical estime qu’aujourd’hui le gouvernement est obligé de respecter ses engagements. Ce qui peut garantir la stabilité, et atteindre la rupture.
Les mises en solde et les rappels : le numérique comme solution
«Que des agents dans leur carrière avancent et sentent cet avancement dans leur salaire, il n’y a aucune innovation à ce niveau », rappelle Saourou Sène. Même s’il salue le fait que l’État est en train de résorber un gap accumulé depuis longtemps. C’est dans l’ordre normal des choses. Et sur ce point d’ailleurs, le Cusems juge qu’il y a des «lenteurs inexplicables qui ne militent pas en faveur de l’avancement des agents». Cela pour dire que malgré l’opération coup de poing, le problème reste entier avec les nouvelles vagues de titularisation et de mise en solde qui viennent chaque année se greffer sur le stock. D’où la nécessité d’un basculement vers le numérique comme solution. Le problème réside dans le stock qui se renouvelle avec l’arrivée de nouveaux contractuels et les nouvelles titularisations. « Il faut un rythme soutenu des mises en soldes », dit M. Ndoye.
La vraie innovation saluée par les syndicats même si, le secrétaire général du Cusems refuse pour sa part de verser dans l’euphorie, c’est l’annonce de rencontres régulières entre le ministère et les syndicats pour faire le point sur les actes posés et la gestion démocratique du monde enseignant et le lancement du prix du président de la République pour l’enseignant. «S’il décide d’être disponible c’est une bonne chose. Mais l’essentiel c’est le respect des accords. Si on se rencontre chaque jour, toute la semaine et que les problèmes ne sont pas réglés, on reste toujours à la case départ».
Mettant en garde contre les informations tendant à dire que les syndicats ont signé une résolution pour une année « zéro perturbation », Abdoulaye Ndoye précise que son syndicat n’a rien signé dans ce sens et la pacification de l’espace scolaire du niveau de matérialisation des accords signés. Mais cela n’occulte pas la préoccupation majeure des enseignants qui est centrée sur le respect et la matérialisation des accords déjà signés. Un protocole qui insiste sur la nécessité de refonder le système de rémunération, qui inclut du reste la question de l’indemnité de logement, pour plus d’équité et de justice entre les agents de l’État, c’est là une exigence des enseignants.
La formation des enseignants : une priorité !
Sur le plan pédagogique, les syndicats mettent en avant surtout la question de la formation des enseignants, aussi bien la formation initiale que la formation continue dans un contexte de mutations technologiques avec le TIC qui ont introduit beaucoup de données nouvelles.
Ce chapitre concerne notamment les détenteurs de diplômes spéciaux qui sont dans l’enseignement et qui ont besoin d’une formation diplômante pour leur profession mais aussi pour leur plan de carrière. Parmi ceux-ci, il y a les titulaires du B et des diplômes de gestion et qui enseignent les mathématiques dans les classes.
Les effectifs pléthoriques constituent aussi également des contraintes pédagogiques qui peuvent altérer la qualité de l’enseignement. «Quand un professeur se trouve avec 120 élèves dans une classe cela pose problème », dit Saourou Sène qui indexe également l’environnement scolaire avec les nombreux abris provisoires et les écoles sans clôtures ni les commodités minimales qui ne participent pas à de bonnes conditions de performance.
Pour sa part, le secrétaire général du Saemss/Cusems estime qu’il est nécessaire de mettre en place une gouvernance apaisée faite de concertations et de dialogue entre les différentes familles d’acteurs. Ce qui importe, c’est de corriger les injustices du système de rémunération, une résorption des abris provisoires et effectifs raisonnables dans les salles de classe.
À l’issue des concertations de Saly, les projections pour un meilleur futur de l’école sénégalaise, mais avertit M. Sène ce qui amène vers ce futur rêvé, c’est aujourd’hui qu’il faut le construire, «c’est que le gouvernement aille dans le sens de matérialiser concrètement les accords signés avec lui. Ce ne sont pas des questions de revendications et le gouvernement avait dit qu’il avait signé des accords réalistes et réalisables ».La réalisation des accords est seule à même de garantir une année scolaire apaisée, pensent les différents responsables syndicaux.