C’est une histoire vieille de deux ans. Aujourd’hui, réactualisée, elle installe la polémique et la confrontation dans le quartier d’Ouest Foire. Hier, les riverains, qui dénoncent la construction d’une station d’essence à proximité de leurs concessions, et les gendarmes se sont affrontés durant plusieurs heures.
Les résidents de ce quartier fustigent le mutisme de l’Etat par rapport aux risques qu’ils encourent si ce projet est concrétisé. Ce qui est très probable : car les travaux se déroulent sous la haute surveillance des pandores.
Sous un soleil de plomb, des ouvriers s’affairent aux travaux de construction. A l’intérieur du site entouré de tôles de zinc, de fer, des bouts de bois, un chef de chantier et ses maçons font le travail de base. Sous la surveillance des gendarmes, armés jusqu’aux dents «pour intimider de potentiels opposants». La situation est tendue. Alors que les habitants de la cité Ouest Foire étouffent de colère. La cause ? La construction d’une station d’essence et d’un mur pare-feu de 3 mètres sur la bande de terre contiguë à la cité Sonal de Ouest Foire située en face de l’immeuble Diallo Lo, entre les deux stations Shell et Elton du même quartier, distantes de 700 m, par le promoteur de la société Eydon, Pape Makhtar Sarr. Face à cette situation, les habitants de la cité crient au scandale et accusent l’Etat d’être le complice du promoteur.
«C’est une bande de terre et non un terrain»
«On ne va pas accepter la construction d’une station-service à trois mètres de nos maisons. De Sacré-Cœur 3 à la Foire, il n’y a aucun édifice sur cette bande de terre, qui sépare la population de la Voie de dégagement nord (Vdn). Ils ont fait des magouilles à l’insu de la population pour donner le terrain en bail sans se soucier de notre cadre de vie et d’un environnement sain. C’est un scandale foncier», rouspète Abdou Aziz Diouf, président de l’Association des propriétaires et résidents des cités Ouest-foire. Selon son voisin, Khalifa Ababacar Diouf, après avoir exploité le bail à l’origine de l’autorisation de construire, ils ont constaté qu’il était entaché de plusieurs irrégularités. «Ils ont décrit l’espace comme un terrain alors que tel n’est pas le cas. Donc de manière dolosive, ils ont trompé la vigilance de tout le monde en décrivant cette bande de terre comme un terrain», explique cet habitant d’Ouest Foire. Pourtant, à les en croire, sous ledit site, il y a des câbles de la Senelec et un canal d’évacuation des eaux pluviales dans le cadre de l’inondation. Sans oublier des impacts qu’elle aura sur l’environnement. Alors que tout citoyen a droit à un environnement sain.
«L’autorisation, un poignard dans le dos»
Pour Mme Ndiaye, propriétaire d’une maison, qui jouxte le site, l’autorisation de construire délivrée par le préfet de Dakar est un poignard dans le dos. En effet, selon elle, ils avaient un projet d’aménagement du site en un jardin public, mais le gouverneur de l’époque, Ndary Touré, leur avait interdit sous prétexte que cette bande de terre allait servir au prolongement de la Vdn. «Un bon matin, Pape Makhtar Sarr débarque pour construire parce qu’il a un bail qui le lui permet. On se sent alors poignardés dans le dos par les autorités qui ont préféré une station à une aire de détente pour les riverains du quartier», se désole-t-elle, la gorge nouée de colère.
«Le mutisme de l’Etat nous rend perplexes»
Au-delà des inquiétudes et de menaces, les habitants n’arrivent pas à comprendre l’attitude des autorités, qui ont autorisé l’édification de la station en mettant en danger la vie des habitants. «Nous sommes perplexes devant le mutisme de l’Etat qui a fait fi de toutes les observations, qui lui ont été adressées par des correspondances pour autoriser cela, l’attitude du préfet de Dakar nous laisse sceptiques», déplorent-ils.
Pour leur plan d’action face à cet «abus de pouvoir», les riverains informent qu’ils sont allés jusqu’à porter plainte pour alerter sur le danger qui les guette. «Nous avons dénoncé beaucoup d’aspects irréguliers notés sur le bail et nous avons porté plainte. Avant, nous avions été reçus par le maire de Yoff, Abdoulaye Diouf Sarr, qui nous a promis de ne jamais donner l’autorisation au promoteur. Car il était avec la population. Mais il nous a trahis», grogne K. Ababacar Diouf. Dans la même veine, Mme Ndiaye se demande pourquoi l’Etat protège le promoteur en mettant place une unité de surveillance de la gendarmerie pour assurer la bonne marche des travaux au détriment de la santé et de la quiétude des habitants.
Babacar Gaye, responsable commercial d’Eydon Pétrolum : «On préfère éviter la polémique»
Quoiqu’il en soit, Babacar Gaye, responsable commercial d’Eydon Pétrolum, préfère ne pas répondre pour ne pas attiser la polémique autour de cette affaire. «Le terrain est un titre de propriété d’Eydon depuis plus de trois ans. De guerre lasse, on a demandé à l’Etat de nous mettre dans les dispositions nécessaires pour construire notre station. Pour ne pas alimenter la polémique, on préfère ne pas communiquer mais nous mettrons à votre disposition toutes les informations nécessaires pour vous éclaircir sur la situation. Pour une autorisation de construire, il y a des normes auxquels il faut se plier. Sans autorisation, il est clair qu’on ne peut pas construire», a-t-il dit.
Tous les articles d'actualités
.jpg)
