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Mbaye Jacques Diop: Un combattant dans l’âme
Publié le jeudi 15 septembre 2016  |  Sud Quotidien




«Je n’ai jamais été nommé, j’ai toujours eu des mandats électifs»
Cette phrase, le défunt aimait à la répéter, sans doute, avait–il raison. Exception faite de son passage au Conseil de la république pour les affaires économiques et sociale (Craes), l’ancien maire de Rufisque glanait fièrement ses mandats plusieurs fois renouvelés de député et de maire de Rufisque.

Mbaye Jacques Diop, fils unique de sa maman Thiaba Diop et d’un père polygame Madické Diop, est né un 15 janvier 1934 à Rufisque, au quartier Mérina. Très tôt, le fils de Thiaba Diop a eu le sens des responsabilité et s’est toujours battu pour gagner sa vie et aider sa maman, qui vivait dans la grande maison familiale « faite en baraques ». Après des études primaires brillantes à Rufisque, il atterrit à l’école primaire supérieure de Dakar. Comme il aimait le rappeler fièrement aux jeunes. Ses vacances, il les passait à l’usine de Bata où, il recevait une paie chaque semaine et qu’il versait intégralement à sa maman adorée pour l’aider. «Ce n’est qu’à l’approche de la rentrée des classes que je prenais une partie de ma paie pour préparer ma rentrée et m’acheter des fournitures et des livres ». Cette mère, Mbaye Jacques lui vouait une admiration à nulle autre pareille, parce que, disait-il « c’est elle qui m’a pris par la main pour aller m’inscrire à l’école , ce geste m’a valu tous les honneurs que j’ai eu dans ma vie, c’est pourquoi je ne le remercierai jamais assez ». Mbaye Jacques Diop a toujours invité les jeunes à vénérer leurs parents et surtout leur maman.

Après un cursus scolaire écourté pour des raisons sociales, Mbaye Jacques Diop va faire une incursion en politique à partir de 1954. Il traversera toute l’histoire politique des socialistes. Mais en même temps, il prendra le temps de poursuivre ses études de capacités en droit, avant de devenir expert maritime et ayant formé plusieurs générations d’experts.

Il fut membre fondateur du Mouvement des Jeunesses du Bloc Démocratique Sénégalais au congrès de Louga. Il occupa diverses fonctions dans les différents appareils senghoriens. De 1957 à 1964, il fut Secrétaire Général à l’Organisation et à la Propagande de l’Union des Jeunes du Bloc Populaire Sénégalais (UJ-BPS) et du Mouvement des Jeunes de l’Union Progressiste Sénégalaise (MJ-UPS). En juillet 1958, il participa à Cotonou comme délégué de la Jeunesse du Sénégal au Congrès du Parti du Regroupement Africain (PRA) qui réclama « l’Indépendance immédiate » de certains pays africains.

Entre 1964 et 1967, Mbaye Jacques fut premier Secrétaire Général-Adjoint du Bureau National du Mouvement des Jeunes de l’Union Progressiste Sénégalaise (MJ-UPS) et membre des bureaux Politiques du Bloc Populaire Sénégalais et de l’Union Progressiste Sénégalaise. Co-rédacteur de la Charte de l’Inter-Africaine Socialiste (IAS) avec l’égyptien Pierre Boutros Ghali et le tunisien Mohamed Sayah.

Héritier d’Alioune Badara Mbengue, il poursuivi le combat de son mentor, contre Cora Fall, son éternel adversaire dans le parti socialiste. Il fut secrétaire Général de la Coordination Communale PS de Rufisque Mbaye Jacques Diop était élu secrétaire Politique de l’Union Régionale PS de Dakar de 1990 de 2000.

En tant que secrétaire Permanent du Bureau Politique du Parti socialiste de 1977 à 1980, Me Mbaye Jacques Diop prendra part, au nom du Ps, à toutes les rencontres organisées autour de l’élaboration d’un code électoral consensuel entre 1989 à 2000.

A la faveur de l’alternance survenue en 2000, Mbaye Jacques Diop divorça d’avec le PS le 02 mars 2000, dans l’entre deux tours de la présidentielle. Il va fonder son propre parti politique, le Parti pour le Progrès et la Citoyenneté (PPC), après un bref passage à l’AFP de Moustapha Niasse. Il sera nommé à la tête du CRAES (Conseil de la Républiques aux affaires économiques et sociales). Un poste qu’il ne quittera qu’après une brouille avec le seul qui lui accordé un poste de nomination, en l’occurrence Me Abdoulaye Wade.

TEMOIGNAGES

DERNIER HOMMAGE D’UN QUARTIER A SON FILS : Les jeunes refusent le corbillard pour la marche funèbre
Mbaye Jacques Diop a été inhumé, le lundi 12 septembre, au cimetière de Thiawlène, où il repose désormais à côté de sa maman Thiaba Diop. Pour ce dernier voyage, la population rufisquoise lui a rendu l’amour qu’il vouait à la ville de Mame Coumba Lamb. Ils étaient nombreux, adultes et jeunes sans distinction de coloration politique, à l’accompagner à sa dernière demeure.
Les jeunes de son quartier ont refusé que la dépouille de Mbaye Jacques soit transportée au cimetière par le corbillard, ils ont exigé et obtenu de la famille et des proches de porter leur père sur une distance de près de 1500m avec des chants à la gloire de Dieu. Certains parmi ces jeunes, une fois à l’intérieur du cimetière, n’ont pu s’empêcher de tomber en transe, avec des pleurs et des évanouissements. Certains qui n’ont pu accéder au cimetière, ce sont massés sur le barrage pour suivre le rituel de l’enterrement.
Auparavant, à la levée du corps, à l’hôpital Principal de Dakar, c’est les représentants de tous les segments de la société qui lui ont rendu un vibrant hommage. Hommes politiques, syndicalistes, universitaires, patronat etc ont tous loué les qualité d’un homme multidimensionnel dont le nom se confond à l’histoire du Sénégal d’avant et d’après indépendance.

ISMAÏLA DIAKHATE EXPERT MARITIME : «Sa carrure politique a tendance à éclipser sa dimension professionnelle»
Rufisque a perdu un grand Monsieur. Mais la carrure politique a tendance à éclipser sa dimension professionnelle. J’ai été formé dans son cabinet, comme expert maritime de 1984 à 1991, je retiens de lui un homme honnête, intègre et d’un très grand professionnalisme. Et comme il disait, il voulait toujours ce qu’il y a de meilleur pour les autres, j’espère que son héritage professionnel sera perpétué. Il a formé des gens qui en ont formé d’autres qui rayonnent en Afrique. Tous ceux qui sont sortis des flancs de son cabinet gèrent aujourd’hui de très grands cabinets. Donc, il ne faudrait pas aussi qu’on occulte cette dimension, c’est quelqu’un qui toujours travaillé, qui a gagné sa vie à la sueur de son front et qui nous a inculqué de grandes valeurs comme la rigueur professionnelle, l’honnêteté intellectuelle. Il disait : nous ne détenons pas la vérité, mais celui qui veut nous enlever notre travail, il n’a qu’à se donner plus que la peine que nous nous sommes donné pour l’enlever. Il disait aussi : n’ayez pas peur de la solitude de la vérité parce qu’on vous reviendra. Il disait surtout une compétence sans valeur morale, ce n’est rien du tout.

ARONA BATHILY, ANCIEN CHEF DE CABINET DE MBAYE JACQUES : «C’était un homme de rigueur dans le travail»
Pour avoir été son chef de cabinet à la mairie et son attaché de cabinet au conseil de la République aux affaires économiques et sociales, je retiens de Me Mbaye Jacques Diop un grand homme, un homme de rigueur dans le travail, un homme de perfection, exigeant sur les valeurs. Il est surtout un maître spirituel qui nous a formé, qui nous a forgé dans l’amour de Rufisque d’abord et du Sénégal ensuite. C’est un homme qui vouait un amour profond à Rufisque, j’en veux pour preuve son combat pour que Rufisque puisse profiter des retombées de la Sococim. Quand il fallait privatiser la Sococim, Mbaye Jacques Diop parlementaire et maire de Rufisque, s’est mobilisé pour dire qu’il n’était pas question que Sococim soit privatisée alors que Rufisque qui abrite l’usine et souffre de ses nuisances, n’en soit pas bénéficiaire. Ce qui a poussé la Sococim à prendre l’engagement de verser un pourcentage de son chiffre d’affaires pour l’éducation et le développement dans la ville de Rufisque.

OUMAR GUEYE, MINISTRE DE LA PECHE ET DE L’ECONOMIE MARITIME : «Il a été témoin de l’histoire politique du Sénégal»
Ce n’est pas seulement Rufisque qui a perdu un grand homme, mais tout le Sénégal. Me Mbaye Jacques Diop était un symbole d’engagement et de détermination. Il a beaucoup œuvré pour le développement de Rufisque. Il a toujours su incarner les valeurs de la démocratie. Je retiens toujours une phrase de lui : « L’élu prime sur le nommé ». Il a été témoin de l’histoire politique du Sénégal. Nous nous rappelons des porteurs de pancartes, tout cela nous le devons tous à la clairvoyance et à la détermination de Me Mbaye Jacques Diop.

GENERAL MAMADOU GUEYE FAYE : «Le Sénégal a perdu un grand homme»
Le Sénégal a perdu un grand homme. Je l’ai connu à travers un cousin feu Pape Gora Faye, ancien maire de Rufisque Est. Il m’appelait toujours mon neveu. Je l’ai rencontré pour la dernière lorsqu’il a été décoré. Nous prions tous pour que le bon dieu l’accueille dans son paradis céleste.
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