Pape Fara Diallo (enseigant-chercheur en science politique à l’UGB): ‘’Khalifa Sall a redoré son blason…’’ #aDakar

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Pape Fara Diallo (enseigant-chercheur en science politique à l’UGB): ‘’Khalifa Sall a redoré son blason…’’

Publié le mercredi 7 septembre 2016 | Enquête Plus

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La coalition "And Taxawou Dakar" de Khalifa Sall remporte l`élection des membres du HCCT à Dakar
Dakar, le 3 septembre 2016 - Le maire de Dakar a voté pour désigner ses représentants au Haut conseil des collectivités territoriales. La liste de Khalifa Sall a remporté le vote dans la capitale de Dakar.

L’élection avant-hier dimanche, des membres du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) ont permis au maire de Dakar, Khalifa Sall de se refaire une santé politique après le revers du référendum du 20 mars 2016. Mieux, selon Papa Fara Diallo, cette victoire a permis à l’édile socialiste de redorer son blason. Dans cet entretien avec EnQuête, l’enseignant-chercheur en Science politique à l’Université Gaston Berger de Saint Louis, soutient que Benno bokk yaakaar aurait dû suivre le président de la République, Macky Sall dans sa volonté de ne pas présenter de listes à Dakar et à Ziguinchor pour éviter une défaite inutile.

Comment analysez-vous les résultats des élections des membres du Haut conseil des collectivités territoriales sur le plan national.

La victoire de Benno bokk yaakaar (BBY) n’est pas surprenant dans la mesure où c’est une élection particulière ou le corps électoral n’est pas constitué par la population en âge de voter. Mais plutôt, par des conseillers municipaux et départementaux. Lors des dernières élections locales de 2014, la coalition BBY avait gagné beaucoup de localités. Donc par cohérence, ce n’est pas surprenant de voir les conseillers voter pour la coalition présidentielle. Les membres de cette alliance ont fait également une campagne assez intéressante en allant rencontrer des conseillers dans les différents départements pour les expliquer les enjeux de ces élections et essayer de capitaliser leurs votes. Ce qui aurait été surprenant est de voir la coalition BBY perdre une vingtaine voire une trentaine de collectivités locales. Ce serait dans ce cas, un signe avant-coureur, pour les prochaines élections législatives et présidentielles.

Mais BBY a perdu cinq communes durant ces élections.

Oui ! C’est normal. Parce que ces élections ne sont ni locales, ni législatives encore moins présidentielles. Ce sont les grands électeurs qui votent. Il est envisageable qu’il y ait des départements où les coalitions ne font pas partie de BBY. Il y a beaucoup de changement de 2014 à nos jours avec des départs et des arrivées. Donc on peut comprendre que par logique, certains conseils décident de quitter car leur parti est sorti de la coalition.

Est-ce à dire que l’électorat de la coalition présidentielle est en train de s’effriter ?

Je ne le pense pas personnellement. Je ne crois pas que la coalition BBY est en train de perdre de sa superbe en termes de vote parce que les types d’élections ne sont pas les mêmes. Avec le Haut conseil des collectivités territoriales, je n’ai pas assez de matière pour faire de la comparaison.

Kalifa Sall a remporté les élections à Dakar. Qu’est-ce que cette victoire peut lui apporter ?

L’enjeu de ces élections était gros pour la ville de Dakar. On a vu que la bataille au niveau du Parti socialiste a été transposée au niveau des élections du Haut conseil des collectivités territoriales. On a vu nettement que le PS est divisé car BBY a utilisé une partie de la formation politique, notamment celle qui est restée fidèle à Ousmane Tanor Dieng avec le maire de Dakar-Plateau Alioune Ndoye. Et de l’autre côté, il y a un Khalifa Sall qui est dans une posture de défaillance par rapport à ceux qui ont décidé de montrer au président de la République, qu’il ne représente plus grand-chose à Dakar. N’oubliez pas qu’il avait ‘’perdu’’ les élections référendaires.

D’aucun pensaient que c’était une cuisante défaite de Khalifa Sall qui était en train de perdre du terrain dans la ville de Dakar qu’il contrôle depuis 2009. On a même entendu l’ancienne Premier ministre, Aminata Touré dire à l’époque, qu’elle a pris sa revanche sur le maire de Dakar. C’est pourquoi Kalifa Sall et ses lieutenants se sont investis pour montrer à l’opinion, que Dakar reste et demeure dans leur escarcelle et qu’ils ont encore la légitimité de revendiquer leur popularité à Dakar.

En termes de gain politique, que peut-il espérer de cette victoire en perspective des prochaines élections notamment celles législatives de 2017 ?

Après la ‘’défaite’’ du référendum, il a un peu redoré son blason. Le Président Macky Sall avait décidé que l’Alliance pour la République (Apr) ne présentât pas de liste à Dakar ni à Ziguinchor. Mais certains barrons de la coalition gouvernementale ont voulu le convaincre que Khalifa Sall ne pesait plus lourd à Dakar. Et s’il arrivait à le fragiliser pour ces élections du Haut conseil, ils pourraient le refaire pour les prochaines élections notamment les législatives de 2017 et la présidentielle de 2019. Mais pour ces élections, le jeu est encore trop flou dans la mesure où on ne sait pas si Khalifa Sall va avoir une liste ‘’Taxawu Sénégal’’ ou s’il va aller sous la bannière du Ps. J’avais dit que le ticket Kalifa Sall-Aissata Tall est gagnant. Mais pour l’instant, je ne crois pas que Khalifa soit dans une logique de sortir du Ps. Les différentes coordinations ont commencé à dire qu’ils iront à ces élections sous la bannière de BBY. Je ne pense pas que cela soit le cas de Kalifa Sall. Si les tendances se poursuivent au niveau du PS, il y a de fortes chances que le maire de Dakar présente une liste ’’And Taxawu Sénégal’’ lors des prochaines élections. Mais rien n’est encore sûr. Cette élection que Khalifa vient de remporter peut permettre de renforcer son potentiel de légitimation pour les prochaines élections. Quoiqu’on puisse dire, il a réussi un coup de maître en remportant les trois sièges de Dakar à l’occasion de ces élections.

Est-ce à dire que Khalifa a eu raison de Ousmane Tanor Dieng après ces élections ?

Probablement ! On peut le penser. Mais dans tous les cas, on peut dire que les socialistes qui étaient dans la liste de ‘’And Taxawu Dakar’’ ont pris une certaine revanche par rapport aux pro-Tanor. Rappelez-vous le soir du référendum du 20 mars, les pro-Tanor avaient dit que leur secrétaire général a eu raison sur Khalifa Sall. Maintenant que Khalifa a gagné ces élections, pourquoi ne pourront-ils pas dire la même chose ? Le Parti socialiste n’a pas un problème de personnes mais de leadership. Si cette question et celle de la candidature ne sont pas évacuées, le Ps risque d’être noyé lors des prochaines élections à venir.

Cette défaite est-elle bonne pour la coalition Benno Book Yakar ?

Non ! La coalition BBY a joué et a perdu. Elle aurait dû suivre la logique de Macky Sall qui ne voulait pas présenter des listes à Dakar et à Ziguinchor. Son parti aurait pu dire : nous laissons la latitude aux autres membres de la coalition de prendre leurs responsabilités. S’ils veulent présenter des listes, ils n’ont qu’à le faire. Mais l’APR ne va pas participer aux élections. Maintenant, puisque ce sont les Abdoulaye Diouf Sarr et autres qui ont choisi de participer à ces élections dans le cadre de la coalition BBY, on peut considérer que c’est une défaite de l’APR. Dakar est la capitale du Sénégal. C’est aussi le bastion de Khalifa Sall. L’enjeu de Dakar est énorme. Donc le perdre est une situation que Macky Sall aurait dû éviter.

Le Pds a également perdu du terrain pour ces élections ; est ce que le parti de Me Wade n’est pas en train d’effectuer une chute libre en perspective des prochaines élections ?

Le Parti démocratique sénégalais (PDS) est en train de perdre du terrain. Ces élections ont montré que même les conseillers qui étaient élus sous la bannière du PDS lors des dernières Locales, ont transhumé pour aller vers l’APR. Ces gens-là ont voté pour BBY. Le PDS est en train de perdre du terrain à cause d’un problème de leadership. Une véritable crise qui a pour conséquence, un problème de représentativité dans tous les départements. Ceci parce que l’APR a entamé une campagne de débauchage depuis 2012. A un moment, il y a eu la libération de Karim Wade et d’aucun pensaient que le PDS allait se refaire une nouvelle santé. Mais leur candidat est resté aphone parce qu’étant absent du pays. Ce qui fait que les militants à la base sont dans l’expectative. Le Pds qui jadis, était dynamique, me semble aujourd’hui dans une profonde léthargie.

Macky Sall et sa coalition ont également remporté les élections du HCCT dans la commune de Thiès avec le boycott d’Idrissa Seck. Quelle conséquence politique pour le leader de Rewmi ?

Le boycott du parti Rewmi ne peut pas avoir d’impact négatif sur le déroulement de cette élection. Il y a des conseillers de Rewmi qui ont aussi participé à ces élections malgré l’appel au boycott. Et même si le mot d’ordre était largement suivi par les responsables du parti, cela n’aurait pas d’impact. Les résultats ne devaient pas surprendre le leader de Rewmi. Car BBY est en train de gagner du terrain là-bas pour récupérer cette ville qui était totalement acquis par Idriss Seck. Ils en ont fait un grand défi qu’ils sont en train de relever. Donc ces élections pour le HCCT étaient un test grandeur nature. Le boycott du parti Rewmi est un boycott de principe. Parce que quand on écoute les arguments développés par les responsables de ce parti, l’on se rend compte qu’ils sont valables. Ils avaient voté NO N au référendum et c’est par cohérence qu’ils ont choisi de boycotter ces élections.