Le secrétaire général de la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture de Diourbel, Mamadou Ndiaye et son homologue de Kaolack, Abdoulaye Thiam sont d’avis que la volonté de l’Etat de supprimer les Chambres consulaires régionales constitue un ‘’recul grave’’. Les deux secrétaires généraux pensent que les références du Sénégal en matière de chambres de commerce ne devraient pas être le Burkina Faso ou le Mali mais plutôt la France, la Tunisie ou le Maroc qui disposent toujours de chambres régionales.
Le Sénégal va vers une réforme de ses Chambres consulaires. Le président de la République avait confié la mission au chef du gouvernement lors du Conseil des ministres du 22 juin dernier. Ce processus qui était dans le circuit depuis plus d’un an devrait enfin aboutir. Ainsi, on ne parlera plus de Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture. L’agriculture sera détachée et il faut désormais dire chambre de commerce, d’industrie et de services. Mais à côté, il y aura en même temps une ‘’Chambre nationale’’. Ce qui va entraîner de facto la suppression de toutes les chambres consulaires régionales. Cette dernière option du gouvernement, le secrétaire général de la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture de Diourbel le considère comme un ‘’recul grave’’.
‘’Avec tous les efforts de décentralisation qui ont été mis en œuvre avec les Chambres de commerce installées depuis l’époque coloniale, on ne peut pas venir aujourd’hui nous parler de Chambre nationale. Tout sera reconcentré à Dakar. Les gens de Tambacounda, de Kédougou, de Sédhiou, s’ils ont des besoins, seront obligés de se déplacer jusqu’à Dakar. Je ne pense pas que cela soit un projet de l’Etat’’, dénonce Mamadou Ndiaye. Son collègue, secrétaire général de la Chambre de commerce de Kaolack, est du même avis. Car, d’après Abdoulaye Thiam, les Chambres consulaires régionales sont des structures essentielles dans les dispositifs d’appui aux petites et moyennes entreprises. Certaines institutions consulaires, dit-il, datent même de l’époque coloniale. Avec tous les acquis qui ont été enregistrés dans ce domaine, il dit ne pas comprendre comment l’Etat peut remettre tout cela en cause.
Si le gouvernement veut supprimer les Chambres régionales, c’est pour une ‘’harmonisation’’ avec ce qui se fait dans les pays de l’UEMOA notamment le Mali et le Burkina Faso. Or, d’après M. Thiam, le Sénégal est de loin devant ces pays. Ses références en matière de décentralisation devraient être la France, la Tunisie, le Maroc. Ces pays, renchérit le secrétaire général de la Chambre de commerce de Diourbel, disposent tous de Chambres régionales. ‘’L’argument disant que dans tous les pays de l’Uemoa, il y a des Chambres nationales ne tient pas la route. Je pense qu’il faut comparer ce qui est comparable. Quand nous avions nos Chambres de commerce dans toutes les régions du Sénégal colonial, dans toutes les régions du Sénégal indépendant, ces pays n’avaient pas de Chambres. Ils ont commencé par créer des Chambres nationales. Ils sont en train de décentraliser en créant des délégations régionales qui vont devenir des Chambres régionales’’, renseigne Mamadou Ndiaye. Au contraire, ajoute Abdoulaye Thiam, ces pays devraient s’inspirer du Sénégal qui dispose de Chambres de commerce depuis plus d’un siècle.
Absence de concertations
Par ailleurs, Mamadou Ndiaye et Abdoulaye Thiam se demandent pourquoi l’Etat se précipite à aller vers une Chambre nationale alors qu’en même temps, il est en train de mettre en œuvre l’acte 3 de la décentralisation. Un paradoxe, selon les deux secrétaires généraux de Chambres de commerce. Mais cela ne les surprend guère, parce que tous les deux avouent qu’aucune concertation, en amont comme en aval, n’a été faite pour ces réformes. ‘’Il n’y a aucune concertation sur les réformes. Nous n’avons pas été associés de même que les opérateurs économiques dans nos régions respectives. Je pense que c’est un projet d’un groupe d’individus qui, sachant que les étapes pour le renouvellement des Chambres de commerce sont ouvertes, veulent créer un problème pour bloquer le processus électoral et nous faire perdre du temps’’, croit savoir Mamadou Ndiaye. Même son de cloche du côté de Abdoulaye Thiam qui soutient que ‘’l’Etat est en train de discuter avec un groupuscule de personnes pour mettre en place ces réformes en laissant de côté les vrais acteurs économiques que sont les élus’’.