Alors qu’à travers son discours, le maire de la ville de Dakar, Khalifa Sall, semble se radicaliser, le Secrétaire général du Parti socialiste (Ps), Ousmane Tanor Dieng lui, affiche tout autant sa fermeté. A l’issue du Secrétariat exécutif national tenu hier, il a réitéré toute la volonté du parti d’aller jusqu’au bout de cette affaire afin de situer les responsabilités, avant de prendre toute autre décision politique.
Le saccage de la maison du Parti socialiste, le 5 mars 2016 dernier, livre petit à petit ses secrets. Lentement, l’écheveau est en train d’être démêlé et les différentes responsabilités situées, à travers des auditions de militants et responsables socialistes dont le Secrétaire général, Ousmane Tanor Dieng lui-même et certains de ses partisans. Mais aussi le fils, le neveu et les deux chauffeurs du maire de la ville de Dakar, Khalifa Sall, par ailleurs secrétaire national à la vie politique du Ps.
Cette tournure des évènements ne fait pas que des heureux. Et selon l’édile de Dakar qui a fait une sortie avant-hier, ‘’cette traque constitue un précédent dangereux pour le Ps’’. ‘’Que des contentieux politiques se terminent à la police judiciaire, c’est très grave. C’est un précédent dangereux. Ce qui me gêne dans cette affaire, c’est qu’on est en train d’intimider, mais je ne sais dans quel but et pour quelle raison. (…) C’est une démarche qui ne saurait prospérer. Elle n’est pas dissuasive et c’est une mauvaise solution’’, a-t-il fulminé depuis le Québec où il séjourne.
Mais selon Abdoulaye Wilane, il est hors de question de revenir sur la décision du parti d’élucider cette situation. ‘’Jamais ! Il n’est pas question de retirer la plainte. Ce n’est même pas à l’ordre du jour’’, précise d’emblée le porte-parole du Ps. ‘’Quand on a le courage de violer la loi, d’attenter à la vie des gens, il faut avoir le courage d’assumer ce qu’on a fait’’, renchérit-il. A en croire le porte-parole du Ps, la décision d’aller jusqu’au bout de cette affaire est une demande des instances du parti. ‘’Tous les membres du Secrétariat exécutif national qui ont pris la parole, à l’unanimité, ont demandé à ce que les poursuites continuent’’, a-t-il soutenu, à l’issue de la réunion de ladite instance.
Le maire de Kaffrine d’ajouter : ‘’Le Conseil des sages du parti a reçu la visite de femmes qui appartiennent à l’Union départementale de Dakar. En tant que mères, elles sont venues pour demander pardon pour ceux dont les enfants ou les parents ont pu être convoqués par la DIC. Les sages les ont entendues et leur ont rappelé les faits’’, rapporte-t-il, tout en soulignant que cette affaire n’est dirigée contre personne. ‘’Il n’y a pas de traque contre des jeunes du parti ou contre qui que ce soit. Si maintenant il y a des jeunes qui sont convoqués pour les besoins de l’enquête, il n’y a pas de plus normal. Il faut que les gens répondent de leurs faits. On ne peut pas refuser que quelqu’un soit convoqué à la police pour ce qu’il a fait’’, rouspète le porte-parole des socialistes.
‘’La victimisation ne passera pas’’
En effet, le 5 mars 2016, pendant que le Bureau politique (BP) du Ps était convié à une réunion, des militants et sympathisants socialistes ont fait irruption dans la cour de la Maison du parti. Après presque toute une journée de manifestation contre la volonté du parti de soutenir les réformes proposées par le président de la République, Macky Sall, ils ont fini par déloger les membres du BP avec une rare violence. ‘’Ils ont chahuté, insulté et rudoyé des membres du BP.
Non contents de cela, il y en a qui ont violemment attaqué la salle, après l’avoir caillassée, détruit les chaises, la table de réunion, menacé les gens et séquestré les 191 membres du BP. N’eût été notre sang-froid et la vigilance des forces de sécurité, l’irréparable allait se produire. Nous avons été obligés de suspendre la réunion pour la reprendre le lendemain. Et, au cours de cette rencontre, le BP, après avoir condamné cet attentat lâche et jamais vécu dans les annales du parti, avait décidé d’ester en justice et en a confié la responsabilité au Secrétariat du parti’’, rumine Abdoulaye Wilane.
Pour ce dernier, ‘’il fallait, de l’avis de tous les membres du BP, qu’on cherche à savoir qui a fait cela et qui en était le commanditaire’’. A cet effet, ‘’les premiers à être auditionnés ont été d’abord Ousmane Tanor Dieng, entendu pendant trois tours d’horloge, Alioune Ndoye, Mame Bounama Sall, Jean Baptiste Diouf, Diago Ndiaye, Cheikh Sow, la responsable des jeunesses féminines Yéya Diallo et tant d’autres responsables’’, déclare le maire de Kaffrine. Qui s’émeut que la convocation d’autres militants et responsables socialistes soulève un tollé. ‘’Il a fallu que certains camarades présentés comme tel ou tel soient entendus par la DIC, pour qu’on ameute l’opinion et qu’on joue à la victimisation. Dans un Etat de droit, force doit rester à la loi’’, dit-il. Avant d’ajouter : ‘’C’est à la fois ridicule, puéril et vicieux. Mais la victimisation ne passera pas. Il faut que dans ce pays les gens apprennent à répondre de leurs actes. On ne peut pas passer par perte et profit des comportements aussi condamnables.’’
Pour le porte-parole des socialistes, les militants et responsables socialistes qui vilipendent la procédure enclenchée par le parti ne sont pas cohérents avec eux-mêmes. ‘’Ceux qui parlent gaillardement ou exagérément à la radio, qui s’en prennent à l’image du parti et qui posent le débat en dehors de ses instances, alors qu’ils n’osent pas le poser en interne, ont déclaré qu’ils regrettaient ces évènements. Mieux, ils les avaient condamnés et avaient demandé qu’on clarifie cela, parce que certains d’entre eux avaient été interpellés.
Maintenant que les recherches de la police élucident les choses, on veut donner l’impression que c’est un problème politique ou politicien. C’est faux ! C’est de l’amalgame. Nous souhaitons que l’enquête se poursuive jusqu’à son terme et que les auteurs de ces forfaits criminels soient connus, jugés et sanctionnées à la hauteur de leurs forfaits’’. Car, dit-il : ‘’II faut que cela serve d’exemple.’’ ‘’Quand on saura maintenant qui a fait quoi et qu’il s’avère qu’il y a des socialistes qui sont dedans, nous verrons quelle décision prendre politiquement, mais en tenant compte des réalités du parti’’, souligne Abdoulaye Wilane.