Poursuivie pour les délits d’attentat à la pudeur et atteinte aux bonnes mœurs, Ramatoulaye Diallo plus connue sous le nom de Déesse Major a vu son dossier classer sans suite par le Parquet.
C’est hier, en début de matinée, que la chanteuse Déesse major s’est pointée à la cave du Tribunal de Dakar. Après plus de 72 heures passées dans les locaux de la Sûreté urbaine de Dakar, Ramatoulaye Diallo, très en verve lors de son déferrement, n’a passé que le temps d’une rose dans le bureau du Procureur adjoint, Amadou Seydi, selon nos sources. Ce dernier a décidé de classer le dossier sans suite, après son face-à-face avec la chanteuse. L’on nous signale aussi que le Parquet a reçu sur sa table la lettre de désistement du Comité des valeurs morales au Sénégal (CDVM) qui avait porté plainte contre l’artiste.
Selon l’avocat de l’artiste, Me Bamba Cissé, c’est une décision sage, salutaire et opportune. ‘‘Nous exprimons toute notre satisfaction. Nous exhortons à davantage de respect de la vie privée et de tolérance. Le parquet a décidé de faire un classement sans suite, car les poursuites ne sont pas opportunes. Vous savez, lorsque le parquet reçoit une plainte, il y a ces voies suivantes : aller en information, en flagrant délit, ou décider de classer l’affaire sans suite’’, fait savoir M. Cissé. D’après ses explications, un classement sans suite, c’est quand une procédure qui est sur la table du Procureur comporte une infraction qui rend la poursuite inopportune.
Autrement dit, il peut y avoir infraction, mais le parquet estime qu’il n’est pas opportun de lancer des poursuites. La robe noire pense par ailleurs que le désistement du CDVM n’a aucun impact sur l’issue heureuse de ce dossier. Et pour cause : ‘’En matière de mœurs, se désister de sa plainte n’a aucun impact. D’ailleurs, la lettre de désistement n’était même pas dans la procédure’’. Selon Me Cissé, ils ne sont pas en matière de diffamation ou d’injure où le retrait de la plainte entraine la fin des poursuites. Mieux, poursuit-il, le CDVM n’était même pas plaignant, mais il a juste fait une dénonciation.
Après sa libération, la chanteuse Déesse major, trémolos dans sa voix, yeux imbibés de larmes, a remercié toutes les personnes qui l’ont aidée dans de cette épreuve. ‘‘En tant que musulmane, je dis AlhamdouliLah. Cela a été une épreuve. Peut-être que cela devait arriver et c’est arrivé. Je remercie tout le monde. Le mouvement Hip Hop qui a été là, depuis le début, le collectif Y’en a marre, la presse’’, a-t-elle déclaré, juste après sa libération. A la question de savoir, si elle compte déposer une plainte contre la personne qui a mis la vidéo incriminée en ligne, elle a préféré ne pas en parler.
Ce qui n’a pas été le cas de son avocat qui est d’avis que le moment venu, il avisera. ‘’Il y a quelqu’un qui a procédé à une extraction de la vidéo dans le compte appartenant à Déesse major pour le mettre à la disposition des uns et des autres. C’est là où effectivement cette personne a commis une infraction qui peut être poursuivie devant les juridictions pénales’’, a dit Me Cissé. A signaler qu’en dehors du mouvement hip-hop, l’ex secrétaire général de l’Association des métiers de la musique (AMS) Guissé Pène était présent, hier.
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REACTIONS
MALAL TALLA (fou malade) RAPPEUR
‘’Il n’y a pas à s’excuser’’
‘’Pour nous, la liberté d’expression, c’est un acquis dans ce pays et nous ne pouvons pas retourner en arrière. Les gens se radicalisent, de plus en plus, avec certaines positions qui sont inadmissibles. L’auteur du piratage de son compte n’a pas été sanctionné. Et je pense que quand même, si nous sommes un pays de tolérance, on doit accepter ce genre de chose. Heureusement, que l’affaire a été classée sans suite. Mais, on ne peut continuer à agir comme ça dans ce pays. Les artistes sont des personnes à part qui ne sont pas comme les autres. Ils s’habillent de manière particulière, parlent de manière particulière et portent un discours à travers leur manière de s’habiller et de parler.
Il faut qu’on assume notre liberté d’expression. Il n’y a pas à s’excuser. On est dans un pays normal. Nos télévisions montrent du n’importe quoi : des gens qui s’embrassent, qui font l’amour. L’internet est accessible à tout le monde. La danse ‘’lembeul’’ dans les clips de mbalax est national. C’est un patrimoine de notre culture. Laissons les artistes avec leur liberté. Il est normal que la justice écoute les deux parties, quand il y a une plainte. Mais, je pense qu’elle a apprécié d’une manière positive cette histoire qui concerne Déesse major. Il est important que les artistes se mobilisent davantage.’’
A PROPOS DU CDVM
Le Comité des valeurs morales au Sénégal (CDVM) est une structure qui regroupe l’ensemble des familles religieuses musulmanes du Sénégal. On peut y compter, entre autres organismes, la ligue des imams et oulémas du Sénégal, SOS consommateur, Touba rek. Le président, selon nos informations, est un Mbacké-Mbacké mais, c’est le nommé Adama Mboup, un autre membre, qui pilote les dossiers en rapport avec le CDVM pour des raisons que nos sources n’ont pas voulu dire.
Toujours, selon nos investigations, ce comité a la bénédiction de toutes les familles religieuses qui ne cessent de lui montrer son soutien. Contrairement à ce qui est véhiculé, l’ONG Jamra est différent de ce comité. Autrement dit, c’est deux entités différentes. Le CDVM a été rendu célèbre par la plainte que ses membres ont déposée contre la chanteuse Déesse major pour la tenue qu’elle a portée, lors du concert organisé par Nit Doff, en octobre 2014 au stade Demba Diop.