Après Tivaouane, les leaders syndicaux se sont rendus à Touba pour y rencontrer le porte-parole du khalife général des mourides et le médiateur de la République. Il souffle un vent de décrispation sur l’école après la multiplication d’actes de défiance.
Dans le bras de fer entre le gouvernement et les syndicats d’enseignants, il fallait l’intervention souterraine de figures responsables. Abdoul Aziz Sy Amine, Serigne Bass Abdou Khadre, porte-paroles des khalifes généraux des tidianes et des mourides et Alioune Badara Cissé, médiateur de la République, ont porté leur tenue de pompier pour éteindre ce torchon qui brûlait et allait provoquer un incendie national. Ils ont réussi à dégager les nuages au-dessus de l’école lors d’une rencontre tenue hier à Tivaouane et à Touba en présence de toutes les parties prenantes à la crise et les médiateurs. A Tivaouane, l‘Etat était représenté par le directeur des Examens et concours et l’Inspecteur d’académie de Thiès, les patrons régionaux du Cusems et du Grand cadre et Elène Tine au nom de l’Assemblée nationale, le Forum civil. En s’autoproclamant porte-parole de tous les foyers religieux, Al Amine a promis de s’investir davantage pour que l’école publique retrouve ses lettres de noblesse. Qu’elles n’auraient jamais dû perdre.
Coup de fil de Macky Sall
Mais il a surtout réussi à stopper la danse de l’école autour de l’abîme. Les syndicats ont accepté de communiquer les notes aux administrations des différents établissements. Cela permettra la tenue des conseils de classe et la délivrance des bulletins de notes du premier semestre. Cette info a été confirmée par les services de la Présidence. Le Premier ministre, qui avait prévu de faire une «importante déclaration» aujourd’hui à 8h, l’a annulée. Cette annulation est due évidemment à l’évolution de la situation qui s’est décrispée en fin d’après-midi hier. Mais le problème reste entier. La plateforme revendicative reste intacte bien que les enseignants aient accepté de croire à la médiation de Al Amine qui a promis de la poursuivre jusqu’à ce que le Protocole d’accord soit respecté par les autorités. Il dit : «C’est une affaire nationale. On doit tous s’investir pour l’intérêt supérieur de la Nation. Nous vous demandons d’arrêter la grève. Que le gouvernement arrête les sanctions parce qu’elles seront lourdes de conséquence ! Tout problème a une solution.» Le coup de fil du chef de l’Etat au moment de la rencontre laisse entrevoir une issue heureuse à cette crise. Le Président Sall a promis de recevoir en audience les grévistes dans les prochains jours. Mais il reste que l’ultimatum sur les éventuelles radiations court encore. Alors que le Grand cadre et le Cusems ont accepté de lever leur mot d’ordre. Le médiateur de la République a confirmé l’info après le face à face entre les leaders syndicaux et le porte-parole du khalife des mourides à Touba. Sidy Moctar Mbacké a en outre chargé son homme de confiance de mener les discussions entre les syndicats et les autorités.
Levée du mot d’ordre
Aujourd’hui, les porte-paroles des familles Sy et Mbacké ont réussi à déminer le front social dont l’implosion tenait à un fil, car la radiation annoncée par le gouvernement allait devenir le ferment d’une explosion annoncée et dont le souffle risquait d’atteindre plusieurs secteurs qui avaient déjà annoncé leur soutien aux syndicats d’enseignants à l’image du Sames. Dans la nuit du vendredi, le gouvernement avait publié un communiqué de dernière chance : «Il est rappelé aux enseignants dûment réquisitionnés, qui ont soit refusé de recevoir notification de leur réquisition soit refusé d’y déférer, qu’en sus des sanctions pénales prévues aux articles 7 du Statut général des fonctionnaires et L. 279–m du Code du travail, le refus de déférer à un ordre de réquisition expose le contrevenant à diverses sanctions disciplinaires, applicables sans la procédure du conseil de discipline. Il s’agit de la révocation avec suspension du droit à la pension pour le fonctionnaire, le licenciement sans préavis, ni indemnité autre que, le cas échéant, l’indemnité compensatrice de congé pour l’agent non fonctionnaire.» Pis : Après le lundi 13 juin 2016 à 8 heures, les concernés disposent d’un délai de 24 heures pour se conformer à l’ordre de réquisition. C’était la dernière note de la danse autour de l’abîme après les réquisitions et les ponctions sur les salaires. Sy salvatrice, la main de Abdoul Aziz Sy Amine l’a suspendue. Jusqu’à quand ? Sall attente.
Décrispation de l’espace scolaire : «Al Amine» demande à l’Etat de revenir sur l’ultimatum
Ndèye Fatou NIANG (Correspondante) - La décrispation en vue se profile à l’horizon de la crise scolaire, entrée dans l’escalade depuis le communiqué du gouvernement fixant un ultimatum aux enseignants grévistes, au risque d’être radiés de la Fonction publique. Mais sur initiative de Abdoul Aziz Diop, coordonnateur du Forum civil et du député Elène Tine, Abdoul Aziz Sy «Al Amine» a rencontré tous les acteurs du secteur pendant 4 tours d’horloge. Le guide religieux a lancé un appel solennel à l’endroit des deux parties en conflit, demandant à l’Etat de revenir sur son ultimatum et aux syndicats de rendre les notes. Après quoi, dit-il, il ira personnellement rencontrer Serigne Sidy Moctar Mbacké, les autres chefs religieux et le chef de l’Etat afin qu’une solution définitive soit trouvée.