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Procès Habré: verdict lundi à Dakar, 25 ans après la chute de l’ex-président tchadien (PRESENTATION)
Publié le samedi 28 mai 2016  |  AFP
Hissène
© aDakar.com par DR
Hissène Habré, ancien président de la République du Tchad




Dakar - Le verdict tombera lundi pour l’ex-président tchadien Hissène Habré, jugé depuis dix mois par un tribunal spécial africain à Dakar pour crimes contre l’humanité, un procès censé servir d’exemple en Afrique, un quart de siècle après sa chute.

En détention depuis le 30 juin 2013 au Sénégal, où il avait trouvé refuge en décembre 1990 après avoir été renversé par l’actuel président tchadien Idriss Deby Itno, Hissène Habré est poursuivi pour "crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de torture".

Le verdict, au Palais de justice de Dakar, est attendu à partir de 10H00 (locales et GMT), ont annoncé les Chambres africaines extraordinaires (CAE), juridiction mise en place en vertu d’un accord entre le Sénégal et l’Union africaine (UA).

Le procès s’est ouvert le 20 juillet 2015, en présence d’Hissène Habré, amené de force devant le tribunal, qu’il récuse et devant lequel il a refusé de s’exprimer ou de se défendre, une mission en conséquence confiée par les CAE à trois avocats commis d’office.

Les avocats qu’il s’est lui-même choisi n’ont pas participé au procès, suivant ses instructions, et n’assisteront pas non plus au prononcé du verdict, a affirmé vendredi à l’AFP l’un d’eux, Ibrahima Diawara.

Les audiences se sont achevées le 11 février. La défense avait alors plaidé l’acquittement.

La veille, le procureur spécial, Mbacké Fall, avait réclamé la prison à perpétuité, "une condamnation à la hauteur des crimes" dont est accusé Hissène Habré, qualifié de "véritable chef de service" de l’appareil de répression du régime, en particulier la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS, police politique).

Ce procès est le premier au monde dans lequel un ancien chef d’Etat est traduit devant une juridiction d’un autre pays pour violations présumées des droits de l’Homme.

"Il aura fallu 25 ans de travail sans relâche de la part des victimes tchadiennes pour que ce procès ait lieu", a rappelé cette semaine Reed Brody, cheville ouvrière de cette procédure au sein de Human Rights Watch (HRW). "Ce procès est un moment charnière dans la lutte contre l’impunité pour les crimes les plus graves".

- Prouver la culpabilité -

Une commission d’enquête tchadienne estime le bilan de la répression sous Hissène Habré (1982-1990) à quelque 40.000 morts.

Un des avocats commis d’office, Mbaye Sène, a affirmé à l’AFP attendre "le verdict avec beaucoup de sérénité".

"Nous avons développé suffisamment d’arguments pour prouver que Hissène Habré est innocent" et en face, il y a eu "l’impossibilité pour l’accusation et les parties civiles de prouver sa culpabilité. Si le droit est bien appliqué, nous allons droit vers l’acquittement de M. Habré", a estimé Me Sène.

Pour les parties civiles, Me Assane Dioma Ndiaye affirme au contraire "le caractère gigantesque des preuves rassemblées et qui donnent un espoir pour une issue heureuse, voir Hissène Habré déclaré coupable".

Me Ndiaye a souligné "l’enjeu (de ce procès) pour l’Afrique par rapport à une justice pénale internationale".

Ce procès doit permettre au continent, où les griefs se multiplient contre la Cour pénale internationale (CPI) siégeant à La Haye, accusée de ne poursuivre que des dirigeants africains, de montrer qu’il peut les juger lui-même, selon des juristes et défenseurs des droits de l’Homme.

Pour Me Diawara en revanche, "cette affaire n’est pas judiciaire mais politique. Il n’y a qu’une seule issue, que Hissène Habré soit condamné".

A N’Djamena, des membres de l’Association des victimes des crimes du régime de Hissène Habré (AVCRHH) ont prévu de suivre en direct le verdict sur la radio et la télévision publiques tchadiennes.

"Mon soulagement, ce serait de voir Habré condamné à vie, même si je ne sais pas dans quelles circonstances mon époux a été tué" dans les geôles de la DDS, confie Zenaba Moussa, veuve avec deux enfants à charge depuis 1988.

Un autre ancien détenu de la DDS, Mahamat Moussa, "souhaite qu’il passe le reste de sa vie en prison".

Pour Massa Moïse, détenu pendant trois ans par la DDS et qui dit ne toujours pas savoir pourquoi, "Habré doit être condamné à mort, c’est mon souhait. Il a fait trop de mal à beaucoup de familles".

L’accusé encourt jusqu’aux travaux forcés à perpétuité. En cas de condamnation, dont il peut faire appel, il purgera sa peine au Sénégal ou dans un autre pays de l’UA.

S’il est reconnu coupable, une autre phase s’ouvrira durant laquelle seront examinées d’éventuelles demandes de réparation au civil.


mrb-yas/sst/jhd/jl
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