Il aime prendre son temps… 5 ans sans sortir d’album et 2 ans sans faire une grande scène, Omar Pène n’est pas du genre à être angoissé par les années qui passent. Même lorsque nous sommes allés à sa rencontre mercredi dernier au Radisson Blu, lors de la cérémonie de dédicace du livre qui retrace sa vie, le lead vocal du Super Diamono ne bouleverse pas ses habitudes. Entre les photos exigées par les fans et des accolades pour ses amis, Omar Pène ne néglige aucune demande, quitte à faire patienter… Et ce, malgré le fait de ne plus posséder la force de ses 20 ans. Dans cet entretien, Omar Pène revient sur sa maladie, ses relations avec les anciens membres du Super Diamono et annonce un album en gestation pour bientôt. Il milite pour la création d’une «forte Confédération sénégambienne pour honorer la mémoire de Moussa Ngom»
Au Sénégal, nous n’avons pas l’habitude de rendre hommage à nos artistes du temps de leur vivant. Un livre vous est consacré, quelle lecture faites-vous de ce livre ?
Il faut féliciter l’auteur, car c’est quelqu’un qui a beaucoup suivi Omar Pène et son groupe. Dès l’instant qu’il m’a fait part de son idée d’écrire un livre sur moi, je lui ai assuré d’apporter mon concours. Il m’a interviewé et je me suis prêté au jeu. Et éventuellement, il a su faire son travail en tant que chercheur d’abord. Car, ce n’est pas son premier essai, il en a écrit d’autres. Mais simplement pour que les gens puissent comprendre le parcours d’Omar Pène. C’est intéressant, car les gens qui ne connaissent Omar Pène qu’à travers sa musique, pourront le découvrir grâce à ce livre. Il m’a facilité la tâche d’autant plus qu’il y a beaucoup de personnes y compris les journalistes qui veulent connaître en profondeur Omar Pène. Je vous invite à lire ce livre.
Vous venez de boucler 40 ans de carrière musicale, avec le recul comment l’avez-vous vécu ?
C’est 40 ans de ma vie et je compte encore en faire beaucoup plus, si Dieu le veut. C’est un parcours qui a eu ses hauts et ses bas qu’on a su gérer jusqu’à présent. Nous avons choisi de faire de la musique pour participer à la diffusion de la bonne parole. Nous avons la chance d’être écouté, suivi, de grandir et de vivre dans un environnement où il se passe énormément de choses. Donc, on essaie d’être la voix des sans voix, d’autant plus que on est écouté par les jeunes. J’essaie d’être utile à la société, c’est ça qui m’inspire.
Peut-on dire que vous êtes satisfait de ces 40 ans ?
En tout cas, je ne me plains pas, d’autant plus que les jeunes sont avec moi. Et c’est ce qui m’intéresse le plus. Derrière ou avec Omar Pène, il y a l’Amicale des Fans du Super Diamono. Elle est majoritairement constituée de jeunes Sénégalais originaires de toutes les franges de la société. Il y a des étudiants, des chômeurs, des salariés et des cadres d’entreprise. C’est intéressant d’être bien entouré et d’avoir des personnes qui adhèrent à ce qu’on fait. La majorité de mon staff d’aujourd’hui est issue de ce fan’s club. Je ne sais pas si je peux dire que je suis satisfait, mais en tout cas je ne me plains pas. Du moment que nous n’avons pas terminé notre carrière, nous ne pouvons pas nous prononcer sur ce sujet.
A l’occasion des 30 ans du Super Diamono, vous aviez réussi la prouesse de reconstituer pratiquement le Diamono originel avec Ismaël Lô, Bob Sène, Aziz Seck, Lappa Diagne etc. Êtes-vous prêt à rééditer ce coup pour les 50 ans ?
On ne sait jamais. Peut-être qu’avec mes collaborateurs on le fera, du moins c’est ce que nous souhaitons. Comme je l’ai dit, j’entretiens de bons rapports avec mes amis du Super Diamono. En atteste, la présence d’Ismaïla Lô. Nous nous comprenons très bien. Nous avons vécu des moments heureux et si nous avons l’occasion d’en profiter, pourquoi pas ?
Avec Moussa Ngom, vous aviez eu de très bonnes relations, pourtant il s’est offusqué de ne pas être invité lors de votre concert au Grand Théâtre. Pourquoi et comment avez-vous vécu l’annonce de son décès ?
C’était très pénible. Nous avons partagé la scène et beaucoup de moments aussi. Il a beaucoup apporté au groupe, même s’il a, aussi, beaucoup appris du Super Diamono. Son décès m’a beaucoup peiné, car nous avons beaucoup voyagé ensemble, nous avons partagé beaucoup ensemble. Ce qui l’illustre c’est qu’il a commencé au Super Diamono et avant de quitter ce bas monde, il était avec le Super Diamono. Rien que la veille de son décès, on était ensemble. Le hasard fait bien les choses.
C’est une grosse perte non seulement pour nous musiciens, mais aussi pour la Sénégambie. Il a été un fervent défenseur de la Sénégambie, c’est pourquoi il portait les chaussures de différentes couleurs. Malheureusement, les problèmes demeurent toujours. Pour honorer sa mémoire, nous avons besoin d’une forte Confédération sénégambienne. Ce serait une excellente chose !
Pourquoi n’a-t-il pas été invité à votre concert ?
Ce n’est pas moi qui ai invité les artistes. Je n’étais pas là quand on préparait le concert. Peut-être que c’est un oubli, mais il pouvait venir comme il en fait partie. Il avait fortement sa place. Mais si j’étais à sa place je me serais présenté, car j’en fais partie. C’est ce qu’a fait Maïga. Dès qu’il a appris la nouvelle, il a appelé pour dire que de toute façon j’y serai, car j’en fais partie.
Le départ de Bob Sène a été perçu comme une déchirure, car c’était votre ami d’enfance. Certains l’associent à la venue de Pape Dembel Diop, comment l’avez-vous vécu ?
Dembel est venu après le départ de Bob. Et c’est tout à fait normal, le Super Diamono est un groupe. Et si un membre veut faire une carrière solo, il peut tenter sa chance. C’est dans l’ordre normal des choses, toujours est-il qu’on entretient de bons rapports avec tous ses gens-là. C’est le plus important. Le Super Diamono reste le Super Diamono avec son style jazzy qu’on a connu depuis ses débuts.
Votre longue absence suite à votre maladie a alimenté des rumeurs. Comment avez-vous vécu cette situation ? Cela vous a-t-il choqué ?
Non ! Disons simplement que cela fait partie de la vie des hommes publics. Nous vivons dans un pays où la rumeur est très forte, mais on le prend avec beaucoup de philosophie. Je suis musulman, je rends grâce à Dieu. J’étais malade c’est vrai, j’ai rencontré d’énormes difficultés…
Etaient-elles d’ordre financier ?
Non pas du tout ! Je travaille, donc à la limite je suis discret sur ce que je fais. Si c’était le cas, je ne serai pas ici tout simplement. Aujourd’hui, je suis là et je rends grâce à Dieu encore une fois. Je continue de faire tranquillement mon travail.
Il faut reconnaitre que la fréquence de vos prestations n’est plus ce qu’elle a été. Est-ce dû au poids de l’âge ?
Non pas du tout ! On suit un programme très bien défini. Ces temps-ci on joue au Just for you. Nous avons été à Kolda pour les festivités du 4 avril. Le mois prochain, on va animer une grande soirée de gala. On suit un programme. Quand on me pose ces questions, je me dis que les gens ne sont pas au courant de ce qui se passe, sincèrement (rires).
A la fin des années 2000, vous avez opéré un changement de style musical. Pourquoi ce choix ?
On parle de 40 ans de musique. C’est juste que nous avons voulu tester un nouveau concept qui est la World music. Ça marche assez bien dans le monde. Et je crois que je suis assez outillé pour le faire. Nous avons envie de découvrir autre chose, tout le temps. Vu que j’ai la possibilité de faire de l’acoustique parce que j’ai un grenier pour parler de mon répertoire qui est assez large. Ça m’a permis de rencontrer d’autres artistes d’horizons divers, d’échanger et de découvrir une autre façon de faire de la musique. Ça m’a beaucoup apporté, car j’ai tourné très longtemps en Europe. Il faut découvrir, éventuellement tester, car la musique est une vie.
Que prépare Omar ?
Les musiciens sont actuellement en studio pour préparer un album. Il se prépare quelque chose qui a son importance et le moment venu vous serez au courant.